23 avril 2014

Il y a 100 ans : Le justiciable indigène à Madagascar

Nous avons eu souvent l’occasion de nous élever contre les lacunes et les imperfections du système judiciaire à Madagascar qui se ressent encore trop des vieilles mœurs du temps des Hovas. La superposition de notre procédure à ces coutumes locales déroute l’indigène et le laisse trop souvent sans défense devant un appareil judiciaire qu’il ne comprend pas.
Ses hésitations, le sentiment de son ignorance, en font la proie des trop nombreux intermédiaires qui se placent entre lui et la justice. Et d’abord, il lui faut payer ses témoins, car, ainsi que nous l’avons exposé avec preuves  l’appui, l’indigène ne s’est pas encore fait à l’idée qu’un témoignage puisse être sincère, s’il n’est rémunéré.
Lorsqu’il veut faire appel d’une décision de justice, il doit d’abord déposer 50 fr., qui a, ensuite, toutes les peines du monde à se faire rembourser ; le justiciable métropolitain, lui-même, en sait quelque chose. De plus, 50 francs, c’est une grosse somme pour un Malgache.
Cette pénalité avant la lettre peut donner lieu à de véritables abus de la part de certains fonctionnaires, qui s’en servent pour obliger l’indigène à accepter leurs décisions.
Enfin le justiciable malgache doit compter avec l’esprit de solidarité des fonctionnaires européens qui n’envisagent qu’avec répugnance l’idée de désavouer un collègue. Le juge du premier degré, grâce à cette mentalité très particulière qui lui fait croire que le prestige de l’administration tout entière est lié au sien propre, est trop souvent tenté de voir dans l’infirmation d’un de ses jugements une humiliation d’amour-propre.
Qu’il y ait du vrai dans cette façon d’envisager les choses, ce n’est pas douteux : l’indigène qui a obtenu gain de cause devant un tribunal supérieur alors qu’en première instance il a été condamné par son administrateur direct, a une tendance assez naturelle à narguer celui-ci. C’est donc avec une extrême prudence qu’une cour d’appel doit apprécier un premier jugement répressif.
Encore faut-il considérer que le meilleur moyen de nous attirer la fidélité et la confiance de l’indigène est de lui rendre pleine justice.
Il y a donc là une situation très délicate, qui mérite de retenir toute l’attention de l’autorité.
Le Courrier colonial


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