8 septembre 2013

Il y a 100 ans : Le bassin de radoub de Diégo-Suarez (3)

(Suite et fin.)
Une discussion s’élevait-elle entre l’ingénieur et l’entrepreneur ? Le capitaine de frégate la tranchait, souvent contre l’avis du technicien responsable, au moins en théorie. Ce dernier s’inclinait parfois, parfois résistait. Dans cette deuxième hypothèse, le différend était porté devant le ministre, d’où des retards invraisemblables dans les règlements et parfois même dans la continuation des travaux.
Aussi, la direction technique changea-t-elle sans cesse. On vit défiler des officiers de l’artillerie coloniale, du génie, des ingénieurs civils, des officiers d’administration à la tête du service technique. Les mutations étaient le plus souvent déterminées par des conflits entre les ingénieurs civils ou militaires et le capitaine de frégate. Pour le choix des techniciens, la marine se préoccupait avant tout de leur grade, il fallait qu’il fût inférieur au capitaine de frégate, qu’il n’eût pas plus de quatre galons. Militaires du génie et de la coloniale étaient capitaines, du corps des ponts ils ne pouvaient être qu’ingénieurs ordinaires.
Ce que donnerait cette organisation, il était facile de le prévoir, et l’événement a tristement justifié les prévisions. Le bassin, commencé depuis douze ans, ayant englouti des millions, n’est pas achevé. La dernière bévue retardant son ouverture est de taille : les portes de fer, envoyées de France, étaient trop larges ! Il a fallu les retourner et on attend celles qui seront à la mesure.
La marine se désintéresse de l’achèvement. Fachoda est loin, l’entente cordiale vaut mieux que les points d’appui. La défense mobile sera supprimée un jour ou l’autre.
Les six torpilleurs, ridicules rafiots qui pendant toute la mousson ne pouvaient sortir de la rade et étaient d’une valeur militaire nulle, sont démolis et vendus : nous avons là-bas encore quelques marins sans bateaux, ils continuent.
Et la marine s’en ira, laissant en plan le bassin inutilisable, passant par profits et pertes les millions qu’il a coûtés.
Nous ne pouvons laisser s’accomplir un gaspillage si scandaleux.
Victor Augagneur.
Député du Rhône, ancien Ministre, ancien Gouverneur Général de Madagascar

Les Annales coloniales

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