18 septembre 2014

Il y a 100 ans : L’exode des Mauriciens vers Madagascar (1)

Un assez vif mécontentement règne en ce moment dans la population blanche de Maurice, qui constate avec amertume la réapparition dans leur île de procédés vexatoires qu’ils espéraient abolis pour toujours.
On sait qu’après la prise de l’île par l’Angleterre en 1810, le gouvernement de Londres avait fait preuve d’un libéralisme… intéressé, respectant les coutumes locales et nommant des Mauriciens à de hauts emplois dans l’administration. Il espérait par ces faveurs faire des Mauriciens, hier encore Français, des sujets dévoués du gouvernement britannique.
Mais ce mariage de raison n’alla point sans heurt : en 1830, survint la crise de l’abolition de l’esclavage et l’Angleterre, n’ayant su s’assimiler ses nouveaux sujets par la douceur, prétendit se les assimiler par la force.
Ce fut une dure période de réaction au cours de laquelle les Mauriciens traités en « sujets » eurent à lutter contre leurs maîtres qui affichaient ouvertement l’intention de faire de l’ancienne île de France l’île d’Angleterre, en forçant les Franco-Mauriciens à s’expatrier et à céder leurs biens à des citoyens du Royaume-Uni. N’y ayant point réussi, l’Angleterre voulut les noyer dans un flot d’Hindous.
La lutte fut longue et tenace de part et d’autre, mais la population d’origine française conserva quand même sa prépondérance sociale et territoriale.
En 1883, le cabinet de Londres nomma gouverneur de l’île Maurice un Irlandais, sir John Pope Hennessy, qui, partout où il avait été jusque-là, s’était montré l’adversaire des fonctionnaires anglais et des colons et le protecteur des indigènes. Le Colonial Office espérait que sir John appliquerait à Maurice ces mêmes pratiques et qu’il viendrait à bout des planteurs franco-mauriciens.
Ce fut exactement le contraire qui se produisit : sir John Pope Hennessy, Irlandais nationaliste, avait pris ailleurs le parti des indigènes contre la classe dirigeante anglaise ; à Maurice, il prit le parti des Mauriciens contre les fonctionnaires anglais. Comme ceux-ci étaient, pour la plupart, des laissés pour compte de l’administration métropolitaine, il ne lui fut pas difficile de les prendre en faute, et il les remplaça par des Mauriciens.
(À suivre.)
Francis Mury.

Le Courrier colonial


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