On nous écrit :
Tout le monde à Tamatave se plaint de la rareté de la
monnaie d’argent, surtout des pièces de cinq francs. Je viens vous faire
connaître de quelle façon ces pièces-là disparaissent de la circulation, afin
que, par l’intermédiaire de votre vaillante feuille, à votre tour, vous le
signaliez en haut lieu.
Tous les jours, sur la place de Tamatave, des Hovas et des
Indiens et un ou deux Français que je pourrais nommer, raflent, moyennant une
légère prime, la monnaie de toute nature, et toutes les pièces de cent sous
qu’ils peuvent découvrir. Chaque semaine cette rafle atteint le chiffre
respectable de 100 à 120 000 francs. Par le courrier du mardi soir,
cette somme est portée à Tananarive, où elle est mise à la disposition des
prospecteurs et négociants moyennant une prime de 2 et demi %. À tel point
que les commerçants sont dans l’obligation de majorer d’une pareille somme de 2
et demi % les articles qu’ils vendent, lorsque ceux-ci leur sont payés en
papier-monnaie.
C’est là une spéculation honteuse et antipatriotique au
suprême chef ; mais il est parfaitement inutile de parler patriotisme à de
tels spéculateurs. C’est, pour eux, un mot vide de sens, et qu’ils ne
comprennent pas. Je ne me fais pas une idée des mesures qu’on pourrait prendre
pour mettre fin à cet odieux commerce.
D’aucuns opinent qu’il serait possible d’imposer le cours
forcé aux billets de banque. À mon avis, ce serait une très mauvaise opération
qui discréditerait complètement cette précieuse monnaie. On pourrait peut-être
procéder d’une autre manière, et, par exemple, démonétiser toutes les pièces de cinq francs sans exception, en
accordant aux détenteurs un délai de six mois par exemple pour remettre leurs
pièces soit au Trésor, soit aux caisses publiques, passé lequel délai, ces
pièces n’auraient plus cours et ne seraient plus reçues. Je gage qu’il ne
faudrait pas longtemps pour voir les caisses du Trésor regorger de pièces de
cinq francs.
C’est ainsi d’ailleurs qu’après la conquête on a procédé
pour la monnaie coupée.
Voilà mon idée. Que celui qui en aura une meilleure la
donne, car la situation est intenable, et exige un prompt remède.
Le Tamatave
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