20 mars 2017

Il y a 100 ans : Les pavés de l’ours (2)

(Suite.)
L’Administration a fait saisir les journaux donnant sur cette affaire, si peu importante en elle-même, les récits les plus fantaisistes, de nature à effrayer le public et à dénigrer Madagascar aux yeux de l’étranger. Mais les propriétaires des journaux, s’estimant plus malins, ont fait réimprimer clandestinement leur canard, qui cette fois devenait une vipère, et l’ont fait répandre tant en France qu’à l’étranger.
Suivant ce qu’ils affirmaient, – avec des réticences qui en laissaient deviner bien plus long, – il s’en fallait de l’épaisseur d’un cheveu que les Français, Gouverneur en tête, n’eussent été tous exterminés à Madagascar. De nombreuses barriques de poison violent (tanghin) étaient prêtes pour permettre aux cuisiniers et serviteurs indigènes d’empoisonner leurs patrons à la même heure ; grands dépôts d’armes sur divers points, complicité des soldats indigènes, appui du Japon qui devait accourir avec sa flotte, négligence ou ineptie de l’Administration supérieure qui n’avait rien su prévoir, que sais-je encore ; rien n’y manquait, sauf que tout cela n’existait que dans l’imagination dépravée desdits journalistes.
À lire ces balivernes, les colons de la première heure, connaissant bien la mentalité des Malgaches et sachant ce dont ils sont capables, ont accueilli ces racontars par un immense éclat de rire.
Mais ailleurs il en a été tout autrement. Cette campagne, qu’on ne sait comment qualifier, a produit la plus déplorable impression tant sur notre colonie que sur son administration supérieure.
M. Garbit, s’il n’a pas d’ennemis – bien que chacun ait les siens –, a du moins des compétiteurs qui sont anxieux de prendre sa succession, et qui ne reculent devant aucun moyen pour arriver à ce but. Les voyez-vous se précipitant au Ministère en brandissant d’une main les journaux de Madagascar, ces malheureux journaux qu’une administration se sentant coupable a voulu étrangler pour que la vérité ne fût pas connue.
 (À suivre.)

Le Tamatave

Deux volumes de compilation de la presse à propos de Madagascar il y a 100 ans sont maintenant disponibles. La matière y est copieuse et variée, vous en lisez régulièrement des extraits ici. Chaque tome (l'équivalent d'un livre papier de 800 pages et plus) est en vente, au prix de 6,99 euros, dans les librairies proposant un rayon de livres numériques. D'autres ouvrages numériques, concernant Madagascar ou non, sont publiés par la Bibliothèque malgache - 57 titres parus à ce jour.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire