Ce ne sera pas un des moindres services rendus par la presse
au cours de cette guerre que d’avoir inlassablement lancé, sous des formes
variées, d’heureux cris d’appel qui auront probablement ému l’opinion et
obtenu, grâce à la pression de celle-ci sur les pouvoirs publics, un effort de
plus en plus puissant, sans lequel la victoire nous aurait échappé.
« Des canons ! Des munitions ! » s’écrie
tous les jours Charles Humbert dans le
Journal.
« Des carottes ! Des épinards ! »
supplie Laforest dans le Matin.
« Des aéros ! Des avions ! » conjure un
troisième confrère.
Et canons et munitions, carottes et épinards, aéros et
avions, sortent de terre à ce pressant appel que toute la presse reprend
quotidiennement, si bien que les esprits les plus imbus des vieilles routines
doivent, bon gré mal gré, emboîter le pas.
La presse coloniale n’a malheureusement pas pareille
influence sur les hommes dont dépend la reprise de notre activité coloniale.
Tous les jours, elle réclame : « Des bateaux ! Des
bateaux ! » sans pouvoir faire appareiller ces bateaux aussi vite
qu’entrent en ligne les nouveaux canons, que poussent les carottes et les
épinards, que s’élancent dans les airs les nouveaux aéros et avions.
C’est une besogne bien ingrate que celle qui incombera au
journaliste colonial jusqu’au jour où il sera parvenu, comme son confrère
métropolitain, à imposer ses desiderata à l’attention de ceux qui président aux
destinées de nos territoires d’outre-mer. Espérons qu’il ne prêchera pas
toujours dans le désert et qu’à force de crier : « Des
capitaux !… Des colons !… De la main-d’œuvre !… » il verra
enfin l’argent affluer dans nos possessions, les colons venir en grand nombre
les mettre en valeur, les indigènes se décider à travailler raisonnablement.
Car c’est bien de l’insuffisance de ces trois éléments de prospérité que
souffrent la plupart de nos colonies.
Prenons Madagascar, par exemple : voilà une île qui a
atteint un certain degré de prospérité et qui voit d’autant mieux ce qui lui
manque pour poursuivre son ascension, c’est-à-dire des capitaux, des colons, de
la main-d’œuvre, enfin des bateaux pour enlever ses produits.
(À suivre.)
F. Mury
Le Courrier colonial
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