Pour qu'il n'y ait aucune ambiguïté, et au cas où on aurait oublié le principe d'une chronique qui plonge dans le passé colonial, je précise que cet article date bien de 1918...
De quelque côté de l’opinion que l’on se trouve, il est un
fait sur lequel tout le monde tombe d’accord : c’est qu’on sent à divers
symptômes non équivoques qu’enfin la France recommence à être gouvernées depuis
que Clemenceau a repris le pouvoir.
Le marchandage parlementaire a diminué. Les faits de
trahison sont mis au jour ; une simple énumération de noms suffit :
Turmel, Loustalot, Caillaux, etc. ; et, brochant sur le tout, le complot
de Saint-Étienne.
Ce n’est pas tout. La lecture des journaux de France montre
que les Tribunaux ont tout à coup augmenté leur sévérité à l’encontre des vils
profiteurs de guerre ; les lois sont appliquées avec plus de fermeté et de
rigueur… La France semble être enfin gouvernée.
Pouvons-nous en dire autant de notre grande île de
Madagascar ? Hélas !…
Il faut mettre à part le temps de Galliéni, qui fut une
époque toute spéciale d’organisation.
Mais, depuis, on est forcé de constater que les Gouverneurs
Généraux, quels qu’ils fussent, n’ont jamais réussi à se saisir complètement de
leur autorité.
Nous fûmes et nous sommes plus que jamais voués au néfaste
régime des « Bureaux ». Et ces Bureaux-là sont malheureusement,
invariablement représentés par quelques personnages, toujours les mêmes, qu’on
retrouve comme étant les auteurs de tous les empêchements et de toutes les
avanies, se servant de l’autorité qu’ils détiennent pour combler leurs féaux,
traquer quelques-uns, s’indifférer du plus grand nombre. Ceux-là sont cause
qu’au lieu D’une question d’affaires, la Colonisation de Madagascar est devenue
une question de personnes, avec déchaînement de haines irréconciliables, parce
qu’elles sont malheureusement justifiées.
Dans le réquisitoire de l’affaire Franceschi, le Procureur-Général
a prononcé ces paroles redoutables qui caractérisent toute une époque :
« Des jugements n’ont pas été exécutés. » Ce qui montre bien que ceux
qui détiennent l’autorité en usent selon leurs convenances personnelles.
Devons-nous attendre quelque bien d’un nouveau
changement ? Peut-être ! Qui peut répondre, dès à présent ?
Mais sans doute obtiendrons-nous davantage, nous autres
colons, si nous nous décidons à nous organiser convenablement pour enfin
gouverner nous-mêmes notre Colonie.
Le Tamatave
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