L’indigène, en sa qualité de primitif, a un langage riche en
images. Mais son intelligence reste inapte à saisir tout ce qui n’est pas
concret. Plusieurs générations séparent encore le Malgache, par exemple, du
moment où il pénètre sans trop de difficultés le sens d’idées abstraites que
nous exprimons souvent devant lui sans prendre garde que les mots frappent son
oreille, mais que leur signification lui échappe.
Cherchez à faire comprendre à un Malgache qu’entre le
travail et la liberté il y a d’étroits rapports, vous vous apercevrez que vous
avez perdu votre temps. Il estime, au contraire, qu’un abîme les sépare.
Par exemple, ils m’entendront si je leur dis : « Résignez-vous
au travail parce qu’il vous procurera l’argent nécessaire au payement de l’impôt
et des petites jouissances matérielles dont vous commencez à être friands. »
Ce langage, leur intelligence est apte à le comprendre.
Ensuite, il faut inculquer à chacun le sens de sa valeur
individuelle, en supprimant radicalement le déplorable système du travail à la
journée, pour lui substituer celui du travail à la tâche.
Le premier favorise la paresse et décourage ceux que le
désir d’un gain plus élevé inciterait à fournir un effort plus grand. Le
travail aux pièces est le meilleur moyen auquel on puisse avoir recours pour
triompher de l’apathie naturelle des Malgaches et les amener peu à peu à un travail
régulier.
L’engagement de groupements d’indigènes donne aussi de bons
résultats, comme on l’a vu dans les régions de Madagascar où nos colons ont
fait venir et établi des familles entières pour cultiver le riz. Ainsi
déracinées, celles-ci s’attachent au sol qu’elles mettent en valeur et ne songent
plus à le quitter comme le font les travailleurs qui vont chercher de la
besogne loin de leurs villages et s’empressent de revenir chez eux dès qu’ils
ont réalisé quelques économies.
Cette fixité est la base principale de tout progrès dans l’utilisation
de la main-d’œuvre.
(À suivre.)
Le Tamatave
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