En même temps que nous sont rendus les malheureux
départements qui, si longtemps courbés sous le joug de l’ennemi, ont supporté
sa rage et ses déprédations, nous reviennent des populations ruinées et
manquant absolument de tout. Des centaines, des milliers, des millions d’hommes
qui ont souffert pour nous tout ce qui peut être imaginé tombent à notre
charge, et il faut avant toute chose, avant de penser aux loisirs de la paix,
songer à les nourrir, à les vêtir, à les abriter, à leur procurer les
instruments de travail, en un mot à leur fournir toutes choses nécessaires à
l’existence.
On a offert aux plus malheureux des Concessions de terre
dans nos colonies, notamment à Madagascar, mais presque tous ont refusé,
voulant rester sur le sol qui les a vus naître et, comme disait l’un d’eux,
cultiver le champ unique que son père lui avait légué.
Ces malheureux sont pleins de courage et disposés aux
travaux les plus pénibles pour remettre en état ce qui a été détruit par les
barbares. Il est donc de notre devoir de leur venir en aide et de partager avec
eux le pain, la viande, le charbon, etc.
D’autres frères sont revenus d’Allemagne, ce sont autant de
têtes à nourrir encore et qui diminueront la part de chacun d’entre nous. On
serait tenté de s’alarmer de la charge considérable qui nous incombe de par la
victoire même : heureusement le moment d’épreuve sera relativement court.
On compte beaucoup sur les colonies pour venir en aide à la
Métropole, en blé, fruits, sucre, café, farines, etc. Bien que la crise des
transports doive se prolonger encore, bien que les distances soient grandes à
parcourir et les bateaux plus rares pour amener à pied d’œuvre tous les
matériaux de reconstitution nécessaires, peu à peu les choses s’équilibreront.
Il faut en tout cas envisager sans sourciller les délicats
problèmes qui se posent et ne pas s’imager trop promptement que vont revenir
les années aux vaches grasses, afin de ne pas avoir de douloureuses surprises.
Il faut nous attendre à souffrir encore malgré la victoire, à cause même de la
victoire, et nul de nous ne se devra plaindre de porter ce dernier fardeau s’il
pense à celui que nous aurions infailliblement porté si l’Allemagne nous avait
vaincus.
Le Tamatave
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