(Suite.)
Une autre preuve que les travaux du colon sont lettre morte
pour l’autorité administrative, c’est le droit reconnu aux Malgaches du Sud,
génériquement nommés Antimores, de circuler dans toute l’île, soi-disant pour
chercher du travail salarié, alors qu’ils ne travaillent, en réalité, que si
cela leur plaît. Un vagabondage aussi caractérisé, le refus formel d’accepter
le travail qui leur est offert, cela paraît chose toute naturelle à
l’administration : le colon se plaint à elle que des centaines de ces nomades
s’installent à proximité de ses plantations pour y cultiver de maigres rizières
insuffisantes à les faire vivre et fait remarquer, à juste titre, que pour une
si minime occupation, il n’était pas nécessaire de les autoriser à émigrer de
leur pays. On répond pourtant de Tananarive que c’est très bien ainsi !
Divers colons, chefs d’importantes entreprises agricoles,
qui avaient cherché à utiliser cette main-d’œuvre de gens du Sud en leur
donnant de grandes facilités pour le voyage et des avantages sérieux à tous
égards, n’ont pu trouver auprès de l’administration l’appui nécessaire au point
de vue tant matériel que moral.
Promesses et belles paroles, suivies du regret de ne
pouvoir… Partout et toujours ce principe de non-intervention, principe formel
et appliqué en dépit de l’intérêt apparent avec lequel les autorités suivent
les efforts de la colonisation.
Quel dommage, déplore-t-elle, que ces efforts demandent de
la main-d’œuvre, alors que celle-ci est si rare à Madagascar ! Or, les
bras abondent et le recensement des individus en état de fournir du travail se
traduirait par des chiffres imposants, qui dépasseraient de beaucoup les
besoins de toutes les entreprises.
Tout le mal vient de la déplorable direction que l’on a
imprimée, depuis le passage de M. Augagneur, et que l’on imprime de plus
en plus à la mentalité malgache, en répétant aux indigènes : travaille qui
le veut bien.
Le Syndicat des Agriculteurs de Madagascar, composé de gens
qui ont vu de près la question, qui ont souffert et souffrent de cette
situation, verra se joindre à lui les diverses assemblées de l’île :
Chambre des mines, Chambres de commerce, etc.
(À
suivre.)
Paul Desloy.
Le Courrier colonial
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