(Suite.)
L’industriel qui veut s’en servir se heurte à une sorte de
socialisme d’État qui le jette pieds et poings liés entre les mains de
M. Lebureau et celui-ci le tient en lisière sous sa direction et son
contrôle absolu. Or, l’ignorance, l’outrecuidance et le mauvais vouloir de
M. Lebureau, en général, ont acquis à ce dernier une réputation
universelle. Et, suprême ironie, l’industriel, l’homme de science et
d’expérience, ne peut se mouvoir que sous sa coupe, obligé, pour ainsi dire, de
se faire son homme-lige.
Que la Colonie se réserve la propriété absolue de toutes les
eaux de Madagascar, sans que leur aliénation puisse jamais être permise, passe
encore.
Qu’en accordant une autorisation de prise d’eau, elle fasse
toutes réserves utiles quant aux droits des tiers et aux dommages que la
retenue des eaux pourrait causer aux propriétés riveraines, rien de plus juste.
Mais qu’un agent ignare qui, de sa vie, n’a vu une prise
d’eau, encore moins une usine quelconque, vienne imposer sa manière de voir à
un homme d’expérience connaissant bien son métier, il n’y a que dans notre pays
où l’on puisse admirer une chose aussi… paradoxale (soyons modérés).
De par la législation en la matière, l’industriel est
obligé, dans un délai fixé, de soumettre ses plans et devis à l’approbation de
M. Lebureau. Mais si l’industriel doit soumettre ses plans dans un délai
fixe, aucun délai n’est imposé à M. Lebureau pour les examiner, de sorte
que si l’industriel n’est pas persona
grata et n’a pas montré… patte
blanche, ou graissé les rouages, il attendra longtemps, – des mois, des
années, – des nouvelles de ses plans. Quand, lassé d’attendre, il ira,
respectueusement, en référer à M. Lebureau dans son cabinet, il entendra
celui-ci lui répondre d’une voix mielleuse :
« Désolé, mon cher Monsieur ; mais j’ai
73 affaires à étudier avant la vôtre. Patience ! votre tour
viendra. »
Malheureusement pour M. Lebureau, l’industriel qui
attendait depuis deux heures dans la salle d’attente l’avait entendu faire une
réponse identique aux réclamants qui l’avaient précédé. Il avait pour chacun 73 affaires à étudier avant la
sienne (authentique).
(À suivre.)
Le Tamatave
Deux volumes de compilation de la presse à propos de Madagascar il y a 100 ans sont maintenant disponibles. La matière y est copieuse et variée, vous en lisez régulièrement des extraits ici. Chaque tome (l'équivalent d'un livre papier de 800 pages et plus) est en vente, au prix de 6,99 euros, dans les librairies proposant un rayon de livres numériques. D'autres ouvrages numériques, concernant Madagascar ou non, sont publiés par la Bibliothèque malgache - 62 titres parus à ce jour.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire