La peste (2)
(Suite et fin.)
Tel est bien loin d’être
notre cas, car on a pu remarquer que, parmi plusieurs individus habitant une
même maison, un ou deux seulement étaient atteints, et que tous les autres
étaient indemnes, et ils le sont encore d’ailleurs. On a vu aussi que, parmi
des indigènes logeant dans un même local, plusieurs présentaient les symptômes
de la maladie, mais qu’ils ne continuaient à se manifester que chez l’un d’eux,
les autres n’éprouvant plus rien dans la suite.
Tout cela porte à croire
que les bacilles de la maladie sont bien répandus dans toute la ville, mais que
par suite d’une longue incubation sans doute, ils ont perdu beaucoup de leur
virulence, de sorte qu’ils ne déterminent la maladie que dans les terrains
propices, c’est-à-dire chez les gens qui y sont sujets, et qu’ils n’ont qu’une
action très faible ou nulle chez les autres.
Malgré le peu de violence
de l’épidémie, on n’en prend pas moins des mesures énergiques. Tous les
bâtiments où des cas se sont produits sont désinfectés, plusieurs ont été ou
seront brûlés. Une commission d’évaluation déterminera auparavant le prix de
l’immeuble et des objets détruits.
Il y a lieu de remarquer
que c’est dans des cases d’Indiens que le fléau s’est déclaré, tout comme en
1898. Seulement, à cette époque, les Indiens étaient cent fois moins nombreux
qu’à présent, et n’occupaient pas la formidable quantité d’immeubles qu’ils
détiennent à l’heure actuelle. Or il est à remarquer quelle prise facile ces
gens offrent aux épidémies de peste comme cela a pu se constater dans l’Inde
même, à Maurice et ailleurs. En 1898, en effet, les Indiens furent les premiers
contaminés ; il en mourut une très forte proportion, et à la suite de
cela, toutes leurs marchandises furent jetées à la mer, car c’était bien là que
le bacille de la peste pouvait se développer à son aise. D’après de vieux
Tamataviens, nous serions de la sorte menacés d’avoir comme à Maurice la peste
à l’état latent. Mais si on voulait à l’heure actuelle procéder à semblable
opération, se doute-t-on du travail monstre et de la dépense fantastique que
cela occasionnerait ? Il n’y aurait pas d’autre ressource que de se
contenter de désinfectants. C’est à la science médicale de se prononcer sur
leur efficacité.
Le Tamatave
Mercredi 16 mars 1921.
Extrait de La peste à Madagascar 1898-1931, un livre numérique de la Bibliothèque malgache disponible dans toutes librairies proposant un rayon ebooks (2,99 €) et, à Antananarivo, à la Librairie Lecture & Loisirs (9.000 ariary).
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