27 décembre 2017

27 - La peste à Madagascar (1931)


La peste par conviction

Le samedi 28 novembre 1930, une jeune fille, du nom de Razanabelo, âgée de 14 à 15 ans, tomba malade. Son oncle, Rakotovao, accompagné de sa femme, Razanamaro, demeurant à Morarano, quartier de Mahazoarivo, conduisit la malade chez le médecin Rabe-Régis, à l’ouest du lac Mahazoarivo. Après la consultation, le médecin dit aux parents de la jeune fille : « Son cas est grave, faites-la soigner à l’hôpital indigène de Befelatanana. » Puis, il en rendit compte au bureau d’hygiène. Mais la jeune fille mourut tandis qu’on la transportait à l’hôpital de Befelatanana. Ses parents firent rapporter le corps à la maison.
Le lendemain matin, dimanche 29 novembre, Rakotovao fit appeler le médecin. Arrivèrent à la maison mortuaire MM. Bouvier, inspecteur de police, le docteur commandant Faucon d’Ambotofotsileky, l’infirmier Rajaona, des prisonniers, etc., etc.
Le docteur commandant entra dans la maison pour examiner la morte.
Il ressortit au bout d’un moment en disant à l’inspecteur qu’il ne trouvait pas le bubon dont avait parlé le médecin Rabe-Régis. Il retourna auprès du cadavre, et s’écria de nouveau : « Je ne trouve rien.»
Alors on se demanda, puisque le docteur n’avait pas trouvé de bubon, qu’allait-on faire du corps de Razanabelo. Pour répondre à cette question, on décide d’attribuer quand même le décès à la peste (sans qu’il ait été fait aucune analyse de sang).
La maison fut désinfectée, le mobilier et tous les effets furent brûlés ; le corps fut confié aux prisonniers jusqu’à l’endroit où se trouvaient les autos de service. Rakotovao, sa femme Razanamaro, son beau-frère Rakotovao furent internés au lazaret d’Ambohimiandra où ils furent isolés pendant dix jours, les bœufs et les animaux de basse-cour furent confiés aux voisins.
Mais, jusqu’à présent, les habitants ne sont nullement convaincus que la malheureuse jeune fille soit morte de la peste, puisqu’aucun médecin n’a reconnu cette maladie. Il est vrai qu’il y a eu peste par conviction.
C’est par des procédés de ce genre que l’on dissuade les Malgaches de l’existence véritable de la peste à Madagascar, et qu’on les entretient dans la conviction que la peste, dans ce pays, n’est qu’une peste politique, à l’usage des autochtones non naturalisés seuls.
L’Aurore malgache

Vendredi 1er mai 1931.

Extrait de La peste à Madagascar 1898-1931, un livre numérique de la Bibliothèque malgache disponible dans toutes librairies proposant un rayon ebooks (2,99 €) et, à Antananarivo, à la Librairie Lecture & Loisirs (9.000 ariary).

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