12 septembre 2019

Il y a 100 ans : Un tableau trop sombre de Madagascar (2)


(Suite.)
Retournera-t-il à Madagascar ? demande notre confrère.
Il semble bien que M. Schrameck n’y songe guère, car il semble avouer sa propre impuissance à faire mieux.
Certes, je suis tout à fait d’accord avec M. Schrameck quand il demande que l’on balaye spéculateurs, incompétents, maîtres d’école ne sachant pas un mot de français, etc. Mais la Grande Île serait-elle ce qu’elle est aujourd’hui si elle n’avait connu que ces indésirables ? Par quel prodige les terres cultivées occupent-elles aujourd’hui une telle étendue, produisent-elles du riz, du manioc, du café, de la vanille, etc., en si grande abondance, le commerce a-t-il pris une assez grande extension pour tenter les Allemands, si la colonie en est encore à attendre des colons, des commerçants sérieux ?
Et cependant, que d’entraves ont été apportées au développement de ce pays depuis que le général Gallieni l’a quitté ! Ce qui m’étonne, au contraire, c’est que Madagascar ait résisté aussi vaillamment à toutes les tornades administratives et autres qui se sont abattues sur elle ! Il n’y aurait plus un colon français dans la Grande Île que je n’en serais aucunement surpris. Durant les quelques mois que j’y ai passés il y a onze ans, j’ai entendu les doléances de nos compatriotes qui se plaignaient d’être trop souvent brimés par l’administration supérieure, de ne pouvoir trouver de main-d’œuvre pour leurs exploitations, parce que le gouverneur général répétait à satiété aux indigènes qu’ils étaient libres de ne pas travailler s’ils le voulaient, si bien que les Malgaches, paresseux comme tous les primitifs, s’empressaient de ne plus rien faire.
Au nord, au sud, à l’est, à l’ouest de la Grande Île, les récriminations étaient identiques. Cependant nos colons sont restés. Il est vrai qu’ils ont connu des gouverneurs généraux comme MM. Picquié et Garbit, qui ne professaient pas des idées aussi subversives en matière de colonisation. Toutefois, ces hauts fonctionnaires n’ont pu remonter tout à fait le courant. C’est qu’il est beaucoup plus aisé d’obtenir des indigènes qu’ils se livrent quotidiennement aux douceurs du farniente que de les décider à travailler régulièrement quand ils ont pris l’habitude de la paresse.
 (À suivre.)
F. Mury
Le Courrier colonial



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