13 septembre 2019

Il y a 100 ans : Un tableau trop sombre de Madagascar (3)


(Suite et fin.)
M. Schrameck n’a pas réussi davantage à changer la mentalité des Malgaches sur ce point. Puisqu’il se plaint de la main-d’œuvre et la déclare insuffisante et défectueuse, c’est qu’il n’a pu l’améliorer. Aussi bien les circonstances s’y prêtaient-elles mal. Avant tout, il fallait enrôler des indigènes pour la métropole et il eût été maladroit de mécontenter la population, quand s’imposait l’envoi de milliers de Malgaches.
Mais aujourd’hui les conditions ne sont plus les mêmes. Nous sommes les maîtres de la situation, nous ne redoutons plus d’insurrection, le temps de l’oisiveté est passé, colons et sujets français doivent travailler assidûment à la prospérité de la Grande Île. Ce n’est que par un effort considérable et régulier que cette magnifique colonie peut être mise pleinement en valeur.
Et si les indigènes protestent, que l’administration supérieure leur dise ce que l’Allemagne aurait fait d’eux si le destin avait fait tomber Madagascar entre ses mains. Tous les maîtres d’école de cette colonie n’ignorent pas le français. Invitons ceux qui le connaissent à donner lecture aux enfants des passages les plus saillants des rapports officiels sur la manière dont les Allemands comprenaient la colonisation au Cameroun, par exemple. Que les instituteurs invitent leurs élèves à répéter dans leurs familles ce qu’ils auront entendu.
Nos sujets connaîtront ainsi le régime auquel la maison O’Swald et tous les Allemands déjà fixés à Madagascar se proposaient de les soumettre. Ayant fait la comparaison entre le sort qui les attendait et celui que nous leur faisons, ils s’estimeront heureux de travailler avec nous.
Madagascar aura assez de main-d’œuvre et de bonne main-d’œuvre quand l’administration supérieure empêchera celle-ci de se dérober à la loi du travail.
Des techniciens, des ingénieurs, des médecins, des routes, des chemins de fer, des ports, il y en aura quand les capitaux afflueront dans la Grande Île. Mais pour qu’ils en prennent le chemin, il est maladroit de faire au public métropolitain un tableau trop désenchanté de ce pays et de ceux qui le colonisent.
Je reste persuadé que M. Schrameck a une meilleure opinion de ces derniers et qu’il saisira la première occasion de rendre hommage à leurs efforts.
F. Mury
Le Courrier colonial



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