2 octobre 2017

Il y a 100 ans : La main-d’œuvre indigène (1)

Un ami est venu nous conter ce qui suit avec prière de le porter à la connaissance de M. qui de droit. Nous nous empressons de lui donner satisfaction.
Il y a trois jours, je revenais de la brousse avec mes porteurs et mes bourjanes, lorsque, arrivés près de Tamatave, l’un de ces derniers tombe malade. Ayant remarqué un village tout proche, vers lequel d’ailleurs les sons d’une musique malgache attiraient notre attention, je conçus l’espoir d’y trouver une aide pour finir d’arriver à Tamatave, dont à peine deux kilomètres nous séparaient.
Dans la case où avait lieu le concert, j’ai trouvé une demi-douzaine de jeunes gens de dix-huit à trente ans qui, assis en rond sur des nattes, s’évertuaient à tirer de leurs instruments primitifs des sons plus ou moins harmonieux, destinés à frapper l’ouïe de deux dames qui devaient être les propriétaires de la case. Celles-ci, assez proprement vêtues, écoutaient avec une satisfaction visible le concert qui leur était donné.
Je demande un homme de bonne volonté pour nous aider à gagner Tamatave, l’affaire d’une demi-heure tout au plus, et en payant bien entendu. Un éclat de rire homérique accueillit ma proposition. Eux, travailler !…
Allons donc !… Et le plus dégourdi de la bande, s’exprimant en français assez correct, me fit connaître qu’ils étaient allés à l’école, par suite ils ne pouvaient se commettre à remplir l’office de bourjane, que pour son compte il briguait un emploi de planton, etc., etc.
Piqué au vif, j’ai pris des renseignements.
Ces dames avaient leurs maris ?… au front et à ce titre recevaient une allocation de la colonie, et ces Messieurs venaient les consoler de l’absence du mari, tout en prenant leur part dans l’allocation.
C’est là la moralité malgache la plus pure.
Réfléchissant, je me suis souvenu que tout le long du chemin, nous avions entendu des concerts semblables dans les villages que nous avions traversés. En revanche nulle part nous n’avions trouvé d’indigène travaillant son champ ou préparant son terrain pour une culture quelconque.
(À suivre.)

Le Tamatave

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