March 16, 2008

Et si Dany Laferrière était un écrivain malgache?


Dany Laferrière vient de publier un roman au titre étonnant : Je suis un écrivain japonais. Etonnant, puisque tout le monde croyait qu’il était un écrivain haïtien – certes exilé depuis longtemps, au Canada, puis à Miami, et maintenant de retour à Montréal.
C’est un livre dont je pense beaucoup de bien. Mais je ne vais pas refaire ici l’article que j’ai publié dans Le Soir. D’ailleurs, ce n’est pas tant de l’ouvrage lui-même que je veux parler ici, mais seulement d’un détail qui trouve parfaitement sa place dans ce blog.
Pendant tout le récit, le narrateur, qui ressemble comme un frère à l’auteur, se débat avec l’idée d’écrire un livre intitulé, précisément, Je suis un écrivain japonais. A tel point qu’au Japon, on commence à faire beaucoup de bruit autour d’un roman qui n’existe pas. Et que cela donne des idées à d’autres. Un jour, Monsieur Tanizaki, de l’ambassade du Japon à Montréal, vient voir l’écrivain :
— C’est une vraie révolution là-bas… Votre livre est en train de devenir un phénomène de société.
— Quel livre ? Je n’ai pas écrit de livre.
— Je parle du livre que vous êtes en train d’écrire.
M. Tanizaki semble survolté. Il agite un mince bouquin sous mon nez. Je l’examine sans parvenir à déchiffrer un traître mot – c’est écrit en japonais. Il me le reprend des mains.
— Le titre de ce livre c’est Je suis un écrivain malgache, et c’est écrit par un Japonais.
— Et alors ?
— C’est ainsi que les jeunes écrivains manifestent leur mépris envers le nationalisme littéraire. Pour eux un écrivain japonais n’écrit pas forcément un roman japonais. D’ailleurs ça n’existe plus un écrivain japonais.

Vous vous en doutez : l’écrivain malgache, alors que Laferrière aurait pu choisir n’importe quelle autre nationalité, m’a intrigué. Comme j’avais l’occasion de l’avoir au bout de sa messagerie électronique, je lui ai posé la question.
Et voici sa réponse :
D’abord c’était un clin d’œil à mon ami l’écrivain Jean-Luc Raharimanana… Ensuite, je ne connais pas malheureusement Madagascar, et j’aime visiter en fiction les endroits que je ne connais pas dans la vie. Et puis j’aime la musique de ce nom : Malgache. De la musique avant toute chose.

Merci pour le clin d’œil, Dany. Et, si Jean-Luc lit ces lignes, je n’oublie pas Za, ton dernier roman, rassure-toi – seulement un peu, beaucoup, débordé d’urgences…