August 31, 2009

Nicolas Fargues n'a pas oublié Madagascar

Comme je vous l'avais annoncé, je me suis baladé dans le sud. Où les connexions ne sont pas toujours idéales pour mettre un blog à jour. Je vous raconterai une ou deux choses de ce voyage.

Mais je voulais aussi dire quelques mots du nouveau roman de Nicolas Fargues, Le roman de l'été, qui vient de paraître. On se souvient de Rade Terminus, qu'il avait écrit quand il était en poste à l'Alliance française de Diego. Voici autre chose, puisqu'il me l'a dédicacé avec ces mots: «Voici le petit dernier, enfin affranchi de l’influence Madagascar».
Admettons.
Sinon qu’il semble difficile de renier les conséquences de quatre années passées à Madagascar.
Page 104, sur une étagère, voici un cendrier Three Horse Beer (un cendrier avec une faute d’orthographe, d’ailleurs, puisqu’il aurait fallu écrire Three Horses Beer).
On se dit que c’est un détail, et qu’il n’y en aura pas d’autres.
Ben si!
Et ce n’est plus un détail, cette fois. Le journaliste politique Bruno Belval, vedette de la télé (dans cette fiction), est de passage dans la ville où se déroule le livre. Il a écrit un roman. Du moins, il l’a signé – car un homme de son envergure n’a pas le temps de se consacrer à la littérature. Le titre est furieusement influencé par la Grande Île: Le Sanglot madécasse. Madécasse, pas malgache, comme dans les Chansons madécasses de Parny…
Mais le roman de Bruno Belval est un ramassis de clichés. Cela commence avec la brousse qui «s’étendait sous les yeux de Pierre, hostile et mystérieuse.» Puis arrive la femme: «“Clandestine, câline, mutine, féline, sublime”, songea Pierre en regardant s’ébrouer parmi les draps blancs le corps ébène d’Amalia.»
Si vous voulez tout savoir sur ce roman qui n’existe pas, et n’est ni à écrire ni à lire, le mieux est encore d’en donner la quatrième de couverture:
Pierre Bonaventure est un journaliste déterminé dans un monde plein de confusion. A cinquante ans, sur un coup de tête, il quitte sa rédaction parisienne et sa seconde femme pour Madagascar, afin de mener l’enquête sur les dessous de la filière vanille. Mais l’Île rouge se révèle aussi entêtante qu’ensorcelante, et Pierre aura tôt fait de comprendre que, sous les intérêts particuliers des uns et des autres, se cachent des compromissions politiques d’envergure internationale.
Alors, Nicolas, vraiment affranchi de l’influence Madagascar ?

7 comments:

  1. http://www.lesoir.be/culture/livres/2009-08-13/bonnes-feuilles-roman-nicolas-fargues-722681.shtml

    ReplyDelete
  2. Le romancier de l'automne, c'est Nicolas fargues
    commentaires
    Agrandir la taille du texte Réduire la taille du texte | Imprimer Envoyer par e-mail
    Nicolas Fargues aurait pu se contenter d'être le beau gosse de la littérature, une place à laquelle les critiques jaloux l'auraient volontiers laissé. Avec son septième livre, Le Roman de l'été (P.O.L), l'un des meilleurs de la rentrée, Nicolas Fargues finit de prouver que les belles gueules ne sont pas toujours vouées à la figuration.

    Pour la première fois, il ne situe son histoire qu'en France, dans le Cotentin, sur les longues plages de La Hague à la centrale nucléaire de Flamanville. Le roman, normand et choral, entrecroise la vie de deux familles voisines liées par une épineuse histoire de fenêtre : entre beaufs et bobos, manuels et intellectuels, famille Groseille et Parisiens pur jus, c'est le choc des civilisations.

    Le roman de Nicolas Fargues sent bon notre époque : de la chasse à la place de parking à l'hypermarché au dîner de notables chez le maire, tout sonne juste. Le secret tient d'abord à la langue, irrésistiblement précise : les tics de langage, les expressions révèlent mieux que des pages de description les caractères et le milieu social des personnages. La dextérité pleine de grâce avec laquelle il tisse cette histoire légère et malicieuse témoigne de la maturité d'un écrivain qui n'a pas encore dit son dernier mot. W

    Karine Papillaud

    ReplyDelete
  3. Le match des beaux gosses

    par Baptiste Liger
    Lire, septembre 2009


    arbitré par Baptiste Liger

    Le roman de l'été par Nicolas Fargues
    L'auteur: Révélé en 2000 avec Le tour du propriétaire, Nicolas Fargues est l'auteur de quelques romans à succès - parmi lesquels le remarquable Beau rôle. Le livre: Dans Le roman de l'été, Fargues nous plonge dans une petite agglomération de la Manche. On y trouve le fils d'un peintre célèbre et une splendide amie italienne. Il faudra aussi compter sur les voisins travaillant à la société Soreda (avec son projet écolo NuéClair!), un maire UMP, sans oublier... Nicolas Sarkozy! La phrase: «T'es sur Facebook, toi?» Points forts: Derrière sa légèreté, Le roman de l'été brosse un malicieux portrait de la France contemporaine. Avec une certaine verve, Fargues croque nombre de travers et hypocrisies de l'époque. Points faibles: L'auteur peine toutefois à agencer la profusion de personnages, parfois caricaturaux. Et son jeu avec le langage parlé n'est pas toujours convaincant.

    ReplyDelete
  4. précédente critique de
    Karine Papillaud,parue ce jour,dans "20 Minutes" journal gratuit

    http://www.20minutes.fr/article/344305/Culture-Le-romancier-de-l-automne-c-est-Nicolas-fargues.php

    ReplyDelete
  5. NIcolas Fargues
    J'étais derriére toi" 2006

    Philippe Sollers Le Nouvel Observateur, 16 mars 2006

    La guerre des sexes



    Un couple marié, avec enfants, se déchire.
    Sur l'amour, la jalousie, l'humiliation, le désir et l'enfer, le trentenaire Nicolas Fargues a écrit un roman magnifique


    C'est une chose qui se voit, se dit, s'écrit, se chuchote : le mâle (et surtout le mâle français) va mal, il est prêt à abandonner la partie, il est fatigué, usé, déprimé, contradictoire, ruminant, ralenti, poussif. Il perd le pouvoir, les femmes s'en emparent, retour de bâton historique, revanche normale. Un effondrement a donc eu lieu, mais pourquoi ? Le stupéfiant roman de Nicolas Fargues radiographie la situation. Jamais on n'a encore aussi bien décrit, dans un style soutenu et vif, la nervure de la guerre des sexes et l'aliénation masculine de notre époque, celle des hommes de 30 ans dont les mères semblent avoir perturbé le tonus. Modiano nous a déjà dit les ravages de sa mère "au coeur sec". Houellebecq, de son côté, a insisté sur le traumatisme subi dans son enfance par l'absence de tendresse de la sienne. Fargues, lui, va plus loin : son narrateur est constamment lessivé par sa vie de couple. Il va s'en tirer, mais à quel prix.




    C'est une confession crue, brûlante et hâtive. Le narrateur blanc adore sa femme noire, ils ont deux enfants, ils vivent dans un drôle de pays tropical. Le contrat est celui d'une fidélité absolue et d'une transparence réciproque constante. On est donc en pleine idéalisation fusionnelle, fatale erreur. Le narrateur fait un petit écart de conduite et il l'avoue : deuxième erreur. A partir de là, sa femme le trompe à son tour, mais le lui reproche, et c'est la violence déchaînée, la cruauté jalouse au jour le jour. Le narrateur ne se fait pas de cadeau, il se trouve monstrueux, sacrilège, coupable, il parle de "sa sale gueule de saccageur d'épouse et de mère", il accepte toutes les humiliations, au point de se faire tabasser par son épouse avec un manche à balai en aluminium dévissé de sa brosse. "En fait, constate-t-il, j'ai épousé une folle." Portrait : "Alexandrine m'impressionne trop, elle est trop grande, trop femme, trop froide, trop distante, trop sévère, trop altière, trop intelligente, trop exigeante, trop imprévisible, trop foudroyante, trop punitive, trop crispée, trop âpre, trop perpétuellement insatisfaite de tout, trop orgueilleuse, trop agressive [...], le cul entre nous, c'était pas de la rigolade, c'était un drame, c'était devenu pour moi un vecteur d'angoisse absolue, et pas moyen de rigoler avec ça..."
    Voilà l'enfer : on ne rigole pas, on s'appartient corps et âme, on n'a pas droit au secret, on doit dire la vérité en jurant sur la tête des enfants, on ne passe rien, on s'espionne, on se soupçonne, on souffre, on croit qu'on a raison de souffrir. Et tout cela parce que le narrateur, "Don Juan contrarié, fidèle, idéaliste, romantique ", a cru pouvoir éviter la guerre, ce qui revient à la porter à son comble. Moralité : "Je viens de réaliser que je viens de perdre tant d'années de ma vie à chercher et à recevoir de la douceur et de la bonne humeur d'une femme qui me trouvait trop doux, pas assez mec à son goût." En somme, il est resté "comme un môme avec sa môman". Stupide.

    ReplyDelete
  6. fin de l'article de P Sollers

    Et voici le contre-poison : le narrateur est en Italie, il dîne dans un restaurant avec des membres de sa famille, il va très mal, mais le serveur lui apporte un petit mot en italien signé Alice : "J'étais derrière toi", avec un numéro de téléphone. Une fille le drague donc. "Je trouvais ça osé, sexy, féminin, italien." Fargues n'a pas assez de mots admiratifs pour la vie en Italie, la vie toute simple, l'air, la détente, au-delà des clichés et des stéréotypes culturels. Il va téléphoner à son Italienne, une étudiante de 20 ans. Elle est très jolie, c'est "une nana vive, vivante, marrante, alerte, critique, pas narcissique". Les plus belles pages du livre racontent cette rencontre. C'est tout de suite l'entente consciente, la souplesse, et pourquoi pas, l'amour. Bien entendu, la guérison n'est pas immédiate, le narrateur retourne en enfer, avoue, obéit à sa femme, lui promet de rompre avec son Italienne, se trouve minable, lâche, odieux, se voit obligé de jouer dans une mauvaise série télé, plaint sa femme en larmes, dont il dit très justement : "Elle me haïssait de ne pas être aussi malheureux qu'elle." Il apprend la clandestinité, les coups de téléphone en douce, les SMS envoyés à des milliers de kilomètres, avec des réponses en italien qu'il est obligé de traduire. (Alice et lui, quand ils se parlent, le font dans un anglais approximatif.) Pour finir, il cesse de se sentir coupable, apprend à être "impie" en mentant sur la tête de ses enfants, et va même, miracle, jusqu'à citer Nietzsche : "Tout ce qui ne me tue pas me rend plus fort." C'était bien une question de vie ou de mort. Adieu donc Alexandrine, bonjour le désir, bonjour l'Italie, bonjour Alice, et surtout bonjour à soi-même, après une vie de chien tenu en laisse par sa propre peur. "Je me suis sauvé la vie", dit-il. On sent décidément que ce magnifique roman est beaucoup plus qu'un roman, et c'est pourquoi on a envie de souffler à l'auteur : bonne chance.

    ReplyDelete
  7. Fargue chez "Alain Veinstein"
    http://sites.radiofrance.fr/chaines/france-culture2/emissions/jour_lendemain/fiche.php?diffusion_id=76265

    chat sur "Libération"
    Nicolas Fargues: «Je prends mon inspiration du côté du cinéma»
    http://www.liberation.fr/livres/1201179-livres-dialoguez-avec-nicolas-fargues

    intéréssant de consulter page "face book " de Nicolas
    aprés la critique pleine d'affection, de D.Fernandez dans l'"Obs"
    "Fargues et attrapes :Le Balzac du Facebook " sympa,sans ambiguité

    http://bibliobs.nouvelobs.com/20090820/14236/fargues-et-attrapes

    ReplyDelete