April 24, 2015

Il y a 100 ans : Événements et incidents à Diégo-Suarez (3)

(Suite et fin.)
Notre confrère l’Impartial ayant osé demander la lumière à ce sujet a vu son article interdit par notre administrateur local, sous prétexte d’un droit de censure inexistant et, par conséquent, à l’aide d’un de ces abus de pouvoir tendant à rétablir le régime du bon plaisir, si cher à M. Picquié.
En effet, nous avons tous vu, le 15 août 1913, en pleine nuit et en plein bal, un général faire envahir par la force armée le local privé du Cercle français, pour y faire arrêter un officier en rupture d’arrêts, ce qui tombait sous le coup des articles 184 et suivants du Code pénal : parmi les fonctionnaires et magistrats témoins de ce scandale, pas un n’a osé souffler mot contre cet abus d’autorité parfaitement caractérisé.
Depuis, le procureur-général Theulet s’est cru permis d’infliger arbitrairement quarante et quelques jours de prison préventive à notre confrère et ami, M. Chott, qui avait eu l’audace de réclamer justice ; les Annales Coloniales ont publié, à ce sujet, un vibrant article de M. Henri Cosnier, mais, à notre connaissance du moins, aucune sanction n’a été encore appliquée.
Aujourd’hui un personnage officiel, haut placé, jette la suspicion parmi nous en lançant jésuitiquement des accusations contre plusieurs des nôtres… et un représentant de l’Administration essaie d’étouffer l’affaire en interdisant la publication d’un article de journal réclamant la lumière, en violation de la Loi, car le décret du 22 août 1914, promulgué ici le 10 octobre, n’est pas applicable en l’espèce.
Où allons-nous ? deviendrons-nous véritablement les serfs de l’Administration, taillables et corvéables à merci, privés de la protection des lois cependant existantes ?
La méthode Picquié a-t-elle fait école et, lui parti, ses disciples, façonnés selon ses goûts, sont-ils parvenus, au perinde ac cadaver si prisé des jésuites ?
Sommes-nous donc revenus aux temps du Grand Roi, et pouvons-nous affirmer encore ici, en plein XXe siècle, ce qu’osait alors écrire notre immortel fabuliste, qui n’en fut cependant pas puni, car il ne vivait pas sous un régime pareil à celui de Madagascar :
Selon que vous serez puissant ou misérable
Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir.

Les Annales coloniales

Madagascar en 1914 sortira le 1er mai, Madagascar en 1913 est disponible dans une édition numérique revue et corrigée.
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