October 3, 2014

Il y a 100 ans : Les crocodiles malgaches (6)

(Suite.)
Il aime aussi beaucoup les volailles domestiques, poules, canards, oies et dindons, qu’il avale aussi aisément qu’une sarcelle. C’est un grand pillard de poulailler et son goût prononcé pour les poules lui fait souvent parcourir de longues distances sur la terre ferme ou accomplir des escalades et des tours d’acrobate, dont on n’aurait pas cru capable son vilain corps. Cet amour de la volaille le met même parfois en fâcheuse posture, tel ce caïman qu’un de mes amis trouva un beau matin dans sa volière, dont il avait mangé consciencieusement tous les hôtes.
Ses autres proies habituelles les plus volumineuses habitent la terre ferme, où il ne peut songer à les poursuivre. Aussi attend-il patiemment que la soif ou toute autre cause les amènent au bord de son domaine. Caché au loin dans l’onde, ses yeux jaunes effleurant à peine à la surface, il surveille attentivement les allées et venues de la proie qu’il guette et, sitôt qu’elle approche du rivage, plonge et s’approche de la berge en suivant le fond. Si l’animal convoité s’approche alors à sa portée, il le saisit d’un grand coup de mâchoires et l’entraîne dans les eaux. Il noie ainsi sa victime et, lorsqu’elle est réduite à l’impuissance, l’emporte vers son réduit ou aux environs et attend patiemment, couché dessus, que la chair soit dans un état de putréfaction assez avancée pour qu’il puisse la dépecer à son aise.
Je ne crois pas d’ailleurs que ce soit par simple goût que le crocodile malgache fasse ainsi faisander les grosses pièces de ses chasses, car on le voit avaler presque vives toutes les autres proies qui peuvent passer entières dans son vaste gosier. Je crois plutôt que cette habitude bizarre est nécessitée par la conformation des mâchoires de ces sauriens, plus propres à arracher la chair par lambeaux qu’à la découper. Quoiqu’il en soit, une des conséquences à retenir de cette habitude est que l’on peut toujours espérer retrouver le corps d’une de leurs victimes et même, dans certains cas, lorsqu’elle ne s’est pas défendue ou s’est vite évanouie, cette victime elle-même encore en vie.
(À suivre.)
Perrier de la Bathie.
Bulletin de l’Académie malgache


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