March 29, 2010

Jacques Rabemananjara pour le 29 mars

Pâques 48
(extrait)
Ici la complainte des murs
sur le thème de la mort
La blancheur sourde de la chaux
dit le mystère des ténèbres.

Sur le suaire du silence
passe comme sur la tombe
le frisson impur de la haine.

Les mains froides de l'Étrangleur
fouillent la gorge et les viscères
du firmament immaculé.

Mais toute l'angoisse des fleurs
un songe unique :
le baiser mâle du soleil
sous le vertige de l'azur

Prison militaire du Fort Voyron, Tananarive,
28 mars 1948.
Jacques Rabemananjara, Antidote,
cité par Alain Mabanckou dans: Anthologie. Six poètes d'Afrique francophone.

March 28, 2010

Les idées reçues sur Madagascar

Je vous annonçais, il y a quelques jours, la parution de ce Madagascar, Idées reçues par Patricia Rajeriarison et Sylvain Urfer. Je n'en savais pas grand-chose, en réalité, les quelques pages qu'on peut lire en suivant le lien que je vous donne (vers une librairie en ligne, oui...) ne suffisant pas à se forger une idée complète de l'ouvrage.
Je ne l'ai toujours pas lu, en réalité. Mais le hasard et la complicité d'amis ont fait que j'ai longuement bavardé hier avec Sylvain Urfer. Pas seulement de ce livre, d'ailleurs. Et pas non plus dans le but de réaliser une interview. Ce matin, Patricia Rajeriarison a pour sa part été interrogée sur RFI. Je vous propose donc, si vous l'avez manquée en direct (c'était mon cas), de l'écouter pendant quatre minutes quarante à partir de cette page.

Timbres de Madagascar

Après avoir rédigé l'autre jour une note renvoyant vers un blog qui présentait des timbres coloniaux de Madagascar, j'ai constaté à quel point l'intérêt était grand. Sans aucune intention de me lancer dans une vraie collection de timbres de Madagascar, je me suis demandé s'il n'était pas possible d'offrir un catalogue virtuel de ces vignettes qui sont aussi des témoins de l'Histoire.
J'ai donc glané un peu partout des timbres de Madagascar. J'ai cherché des amis philatélistes dont les catalogues m'aideraient à ranger tout cela.
Et je me suis rendu compte de ce que cela représentait. Un gros travail...
Comme il fallait bien débuter par quelque chose, j'ai commencé par deux années choisies arbitrairement: 1943 et 1963. Histoire d'avoir quelque chose à vous présenter et aussi d'obtenir vos réactions sur ces premières pages. Les images sont de qualité inégale (mais je cherche évidemment les meilleures), il manque parfois l'un ou l'autre timbre et, quand je n'ai pas encore trouve le bon catalogue (c'est le cas pour 1943), il reste des incertitudes.
Il n'empêche: je déclare donc (solennellement, hum...) ouverte cette annexe de la Bibliothèque malgache: Timbres de Madagascar. Allez voir, dites-moi ce que vous en pensez. Peut-être cet extrait de la page consacrée à 1963 vous tentera-t-il...


March 27, 2010

Laurent Graff et les noms malgaches

C'est une nouvelle du dernier livre de Laurent Graff, Selon toute vraisemblance. Une douzaine de pages pour raconter La maladie de Delphine. Très étrange maladie, inconnue des études de médecine. Née Handtschoewerckerten, Delphine a eu, on le comprend aisément, quelques problèmes dans l'enfance avec son nom de famille. Aucun professeur ne l'a jamais prononcé correctement. Passe encore. Le pire est à venir. A l'oral d'anglais du brevet des collèges, l'examinateur fait un effort et y arrive presque. Sinon qu'il oublie le "n" final. Delphine le lui fait remarquer. Mais le fameux "n" ne se trouve pas sur la convocation. Et il a même disparu de sa carte d'identité. Dès lors, le nom de Delphine se met à raccourcir, une lettre par ci, une lettre par là. Elle doit bien accepter l'évidence: son nom rétrécit progressivement. Se marie-t-elle pour devenir épouse Martin qu'elle ne tarde pas à être appelée Marti... Pour ne pas disparaître totalement, il ne lui reste qu'à trouver un mari au nom assez long pour lui durer un certain temps. Et devinez qui peut avoir cette qualité? Un Malgache, pardi! Lisez ces deux pages:
Elle s’inscrivit sur un site de rencontres franco-malgaches à but clairement matrimonial. Son intention était de contracter un mariage blanc dans les plus brefs délais. Elle fit la connaissance de Denis Rasoamanahira, Claude Imanankoasaika, Joro Andriamampianina. Mais celui qui remporta sa faveur s’appelait Naivo Randrianampoinimeria – elle ne trouva pas plus long. Elle convint d’un arrangement avec le jeune homme qui, en échange de son nom, demandait seulement un titre de séjour et un peu d’argent de poche. Delphine était prête à tous les sacrifices. Elle se déplaça à Madagascar pour essayer d’accélérer la procédure de mariage. Elle découvrit les joies et les charmes de l’Île rouge. Elle attendit d’interminables heures sur les bancs de la préfecture, du consulat, de la police, de la mairie de Maevatanana. Sous les pales indolentes des ventilateurs, elle se prenait à rêver de Las Vegas, de mariage express devant un officier d’état civil déguisé en Elvis Presley sur fond de machines à sous, dans une salle entièrement climatisée, quelques mots en anglais, une signature, un cachet, et l’affaire était réglée. Elle perdit connaissance, victime d’un malaise. On la transporta à l’hôpital.
Le consul se rendit au chevet de la jeune Française hospitalisée. On mit son extrême état de faiblesse sur le compte du changement de latitude. Le mariage
fut prononcé dans sa chambre. Delphine se rétablit.
Les deux époux prirent l’avion ensemble. À l’arrivée, ils se séparèrent, chacun partit de son côté.
Delphine considérait son nouveau nom, Randrianampoinimeria. Elle disposait de vingt lettres: elle avait un peu de temps devant elle.

March 26, 2010

Razia fait une razzia sur France Culture

J'ai beau avoir dit et répété que la culture malgache n'était pas seulement la musique, je souligne que la musique est aussi de la culture - bien entendu. Et je me réjouis quand une chanteuse malgache comme Razia fait la session d'une émission comme Le rendez-vous, sur France Culture.
C'était hier après-midi, pour présenter son album Zebu nation - ce qui me fait inévitablement penser à Bekoto (salut l'ami!) répétant, il y a quelques années - les chiffres seraient différents aujourd'hui - que Madagascar est une île peuplée de trente millions d'habitants: quinze millions d'humains et quinze millions de zébus.
Je vous ai donc remonté (ou plutôt démonté) l'émission d'hier pour n'en garder que la partie musicale. Et j'ai intégré cela à un "Zapculture" spécial Razia, que vous pouvez télécharger (et écouter) en suivant le lien dans le casque ci-dessus.
Si vous êtes comme moi et ne connaissez pas encore très bien Razia, il y a là deux chansons à écouter, interprétées en "live". Et voici la présentation du disque:

Afin de sensibiliser les gens aux effets dévastateurs de l’agriculture sur brûlis et des changements climatiques sur sa terre natale, la Malgache Razia Said propose Zebu Nation, un album de compositions originales touchant et inspiré qui célèbre la richesse de la culture musicale de Madagascar.
En plus de livrer un message d’urgence, Zebu Nation brosse un portrait personnel et émotif de Madagascar. «Les chansons de Zebu Nation amènent l’auditeur à visiter cet endroit magique que j’ai toujours connu et adoré» explique Razia. Des chansons telles que Yo yo yo et Mifohaza témoignent de la richesse des sons et des rythmes malgaches tandis que Omama constitue un message d’amour et un remerciement à sa grand-mère qui vit toujours sur l’île.

March 24, 2010

Livres sur Madagascar, de quoi emplir un panier

Il y a un bon moment, déjà, que je ne vous avais pas fourni les résultats de ma "veille" bibliographique. La fiche où je note mes trouvailles est presque pleine, il est temps de vous en donner le contenu. Quelques ouvrages récents à propos de Madagascar, présentés par les éditeurs ou les auteurs eux-mêmes...

Nivoelisoa Galibert, Des mots pour langes et quelques soties malgaches

À la fois caustique et tendre, railleur et réflexif, prosaïque et poétique, ce recueil suggère que le commerce avec l’Autre peut faire de la différence culturelle une source d’émotions inattendues… L’auteur y découpe la vie de Lisa, enfant à Madagascar puis universitaire, voyageant entre son pays natal et sa patrie d’adoption, la Francophonie. Madagascar, pays fantasmatique, devient alors «Mada», île-continent bien réelle dont les arcanes perdent un peu de leur mystère au fil des anecdotes contées!
Les textes présentés ici peuvent se lire d’une traite ou en se ménageant quelques haltes entre deux récits pour savourer une langue inédite.

Professeur de littératures comparées, née à Antananarivo, Nivoelisoa Galibert y a vécu jusqu’en 1970 puis de 1979 à 1996.
Après quelques années en alternance avec La Réunion, l’île voisine, elle est aujourd’hui basée à Bordeaux.

Hanta Rakotomavo, Libérer l'école malgache. Propositions pour une pédagogie informelle

Cet ouvrage met en surface des points forts et des faiblesses du système éducatif malgache afin d’y apporter les remédiations qui s’imposent, notamment, en développant un mode nouveau de recherche-action qui a fait ses preuves durant plusieurs années à Madagascar, pays meurtri par la pauvreté. En qualifiant cette recherche-action de «nodale», l’auteure a voulu insister sur le caractère artisanal de cette recherche qui prend peu à peu forme à partir d’un champ «informel». La logique qui préside à l’alternance des dénouements et des nouages obéit à la logique d’une dialectique ouverte, scandée par des évaluations rituelles. Mais le travail ainsi engagé vise aussi et surtout à transformer les sujets en transformant leur environnement. Il permet à chaque partenaire de s’»objectiver» dans un projet pour se «subjectiver», en intégrant les acquis de l’expérience au capital de ses ressources personnelles. Ainsi les personnes attelées à cette tâche à finalités éthique, sociale, économique et politique voient se lever devant elles un horizon d’espérance.

Hanta Rakotomavo est professeure des universités et responsable d’enseignement et de recherche à l’Ecole Normale Supérieure de l’Université d’Antananarivo. Avant d’accéder à l’enseignement supérieur où elle est titulaire de l’ Habilitation à diriger des Recherches délivrée par l’Université Paul Verlaine de Metz, elle est passée par toutes les étapes du système éducatif malgache (primaire, collège, lycée et université).

Michèle Rakotoson, Tovonay, l'enfant du Sud

Tovonay est un enfant du Sud de Madagascar qui vit dans le dénuement le plus total. Il se rend en ville où il sera pris en charge par un adulte et finira par s’en sortir.
Cet ouvrage, destiné prioritairement aux jeunes, montre comment la misère n’est pas une fatalité et que, à force d’efforts et de courage, il est possible d’améliorer son sort.

Après avoir passé 20 ans à RFI, où elle a notamment dirigé le concours de nouvelles «Les inédits de RFI-ACCT» et créé le Prix RFI Témoin du Monde, Michèle Rakotoson est rentrée à Madagascar, où elle est actuellement rédactrice en chef de la revue économique Challenger. Elle est aussi Présidente de l’association Opération Bokiko, association d’appui à l’édition à Madagascar.

(Note personnelle: J'ajoute qu'elle tient depuis peu une chronique hebdomadaire dans L'Express de Madagascar.)

Patricia Rajeriarison et Sylvain Urfer, Madagascar. Idées reçues

Regard croisé d’une Malgache et d’un Français, cet ouvrage présente les multiples facettes d’un pays trop souvent réduit à sa faune, à sa flore et à la gentillesse de ses habitants…

Au sommaire

Histoire et géographie
— « Madagascar est un pays africain. »
— « Madagascar est le pays des lémuriens. »
— « Ranavalona Ire fut une reine cruelle. »
— « Madagascar est une ancienne colonie française. »
— « 29 mars 1947 : événement ou insurrection ? »

Économie et politique
— « Madagascar est l’un des pays les plus pauvres du monde. »
— « Madagascar est le pays de la vanille. »
— « Madagascar est un pays de potentiel. »
— « Madagascar est un pays ingouvernable. »
— « À Madagascar, les Églises font de la politique. »

Culture
— « L’identité malgache est incertaine. »
— « Madagascar vit au rythme du moramora. »
— « La culture malgache est essentiellement orale. »
— « Le fihavanana est le fondement de la culture malgache. »
— « À Madagascar, on retourne les morts. »

Société
— « Il n’y a pas d’unité nationale à Madagascar. »
— « À Madagascar, on brûle les forêts. »
— « Les Malgaches sont francophones. »
— « Madagascar est une grande destination pour l’écotourisme. »
— « Les Malgaches sont un peuple non-violent. »

(Note personnelle: Selon la journaliste des Nouvelles qui se trouvait hier à la présentation de l'ouvrage, celui-ci devrait être édité localement par Foi et Justice dans environ six mois.)

Alain Mabanckou, Poésie africaine. Six poètes d'Afrique francophone

«Femme nue, femme noire
Vêtue de ta couleur qui est vie, de ta forme qui est beauté!
J’ai grandi à ton ombre»
Léopold Sédar Senghor

Dirigé et préfacé par Alain Mabanckou, ce volume réunit des poètes majeurs de l’Afrique francophone. Poètes engagés, militants de la Négritude, ils chantent le traumatisme de l’esclavage et de la traite, les souffrances de la colonisation, les illusions et désillusions de l’Indépendance de leurs pays: Sénégal, Madagascar, Côte d’Ivoire, Congo. Ils se font aussi les chantres des «valeurs nègres»: la solidarité et la fraternité de leur peuple. Six voix incontournables de la poésie africaine du XXe siècle: Léopold Sédar Senghor, Birago Diop, Jacques Rabemenanjara, Bernard Dadié, Tchicaya U’Tam’Si et Jean-Baptiste Tati Loutard.

(Note personnelle: Jacques Rabemananjara est le seul poète malgache de cette anthologie, alors que celle de Senghor en comptait trois. Mais Alain Mabanckou a dû restreindre son choix en fonction des contraintes de la collection et a quand même obtenu de haute lutte, me confiait-il, de grouper six poètes au lieu de cinq.)

Annick Desmonts, Madagascar. La nature dans tous ses états

Nouvelle édition, mise à jour et augmentée!

Madagascar appartient encore aux destinations à l’abri du tourisme de masse. Restée longtemps dans l’ombre, conséquence d’une politique en pleine mutation, ses infrastructures touristiques sont modestes, par endroits quasi inexistantes. Et c’est presque tant mieux, car la Grande Ile ne se consomme pas. Elle se vit, se découvre et s’explore au rythme lent de ses habitants, de ses pirogues à balancier et de ses pistes bourbeuses.
Mais l’exubérance de sa forêt tropicale ou la sérénité toute asiatique de ses rizières en terrasses ne doivent pas tromper. Menacée de déforestation, l’île est devenue une priorité des organisations de protection de la nature afin de préserver, entre autres, l’extraordinaire diversité de sa faune et de sa flore.
Demeurée secrète, Madagascar saura vous séduire. Le sourire, la gentillesse et l’authenticité des Malgaches ne s’achètent pas, et leur goût de la fête vous comblera.

Hubert Granier, Histoire des marins français. A Madagascar (1947-1948) et en Indochine (1946-1954)

Le cinquième volume de l’Histoire des marins français est consacré à la période 1945-1954. Après le tome 1 (1789-1815), le tome 2 (1815-1870), le tome 3 (1871-1940) et le tome 4 (1940-1945), le contre-amiral Hubert Granier se plonge dans sa période de prédilection, celle de la décolonisation, sujet de sa thèse de doctorat.
Dans cet ouvrage de près de 500 pages, le lecteur retrouvera toute la rigueur historique de l’auteur appliquée à deux grands événements de l’immédiat après-guerre: la révolte de 1947 à Madagascar et la guerre d’Indochine. Comme dans les précédents volumes, le récit chronologique est enrichi de nombreux documents et de biographies des principaux personnages.

Né à Rennes en 1932, le contre-amiral (2eS) Hubert Granier a servi dans la marine nationale de 1950 à 1988. Il est docteur en histoire de l’université de Paris-Sorbonne.

Francis Hallé, La condition tropicale

Dans cet ardent plaidoyer pour les tropiques, Francis Hallé défend une conception des basses latitudes à rebours des analyses actuelles. Ces régions, qui ont à ses yeux une importance bien supérieure à celle qu’habituellement on leur concède, constituent pour la planète tout entière une référence, un berceau, un moteur. Cette position, qui va de soi dans de nombreux domaines – climats, biologie, diversité ethnologique, maladies, techniques agricoles… –, conserve toute sa pertinence en économie: avant d’être colonisées, les populations tropicales ne respectaient-elles pas l’environnement mieux que ne le font aujourd’hui les pays riches, victimes de leur surdéveloppement? La question ici en jeu, rarement soulevée, est donc d’ordre planétaire: c’est celle de l’inégalité économique entre les tropiques et les latitudes tempérées.
Pour tenter d’y répondre, et après avoir dénoncé les contre-vérités des ignobles et tenaces théories racistes, l’auteur s’attache à évaluer les facteurs politiques – esclavage, colonisation, néocolonialisme –, mais ceux-ci, recevables pour les périodes récentes, ne permettent pas d’élucider, dans une vaste perspective historique, l’origine de ces inégalités entre les latitudes.
Il avance alors une hypothèse biologique: fondée sur la sensibilité de l’homme aux variations de longueur des jours, celle-ci expliquerait les différences comportementales qui, entre les tropiques et les latitudes tempérées, influencent profondément les structures psychologiques, les progrès scientifiques et les constructions sociales.
Face aux dérèglements actuels – changements climatiques, montée du niveau des mers, déforestation tropicale, pollution, érosion de la biodiversité, épuisement des ressources, pénurie d’eau potable –, face aux réflexes colonisateurs attisés par la mondialisation et à la survivance du racisme, il est urgent de mettre au cœur du débat cette “condition” de l’homme tropical.

(Note personnelle: S'il ne s'agit pas d'un livre sur Madagascar, la Grande Ile n'est pas oubliée par le président de l'association Forêts tropicales humides.)

March 23, 2010

Quelques nouveautés sur le blog

Je tente d'apporter, de loin en loin - quand j'y pense, quand on me le suggère, quand j'en trouve le temps - de petites améliorations à ce blog. La colonne de droite se prête bien à ces ajouts. Notamment un lien vers le groupe Facebook de la Bibliothèque malgache, créé il y a une semaine environ. 678 membres (à l'heure qu'il est) le font vivre dans des discussions qui ouvrent, pour certaines d'entre elles, de nouvelles perspectives. Dont on reparlera...

Les informations distillées ici s'entassent les unes au-dessus des autres, il est parfois difficile d'y voir clair. Et surtout de retrouver ce qu'on cherche. J'ai donc installé un moteur interne de recherche, "à la Google", un peu plus bas.

Si vous descendez encore, sous les nouveautés Internet Archive et Gallica, vous trouverez une liste de blogs, encore très réduite actuellement, que je lis et dont le début des dernières notes est affiché.

Enfin, l'inévitable compteur des visites donne la satisfaction de savoir que je ne suis pas seul sur cette planète. Le chiffre affiché pour l'instant - 35.273 - correspond au nombre de visites du blog depuis sa création, en octobre 2006.

Voilà, vous savez tout!

March 22, 2010

La culture française dans le monde: un enjeu commercial?

Dans un pays comme Madagascar - ce n'est pas le seul -, les centres culturels et les bibliothèques manquent cruellement, malgré les efforts louables menés pour des implantations locales et, dirais-je, malgacho-malgaches. A défaut d'un réseau dense et structuré, les possibilités d'enrichissement personnel sont évidemment réduites. Et il n'est pas rare que des localités n'aient que des concerts pour seules activités culturelles. Je n'ai rien contre la musique (je dois l'avoir déjà répété souvent), mais j'ai tendance à croire que la culture ne s'y résume pas.
Pour emplir un peu le vide, il faut bien se tourner vers d'autres choses qui existent. Là où une Alliance franco-malgache est présente - et il y en a une trentaine à Madagascar -, le désert culturel recule un peu. Ce qu'accomplit, à Antananarivo, le Centre culturel Albert Camus, personne d'autre ne le fait - ni ne possède les moyens de le faire, malgré l'excellent travail en profondeur réalisé par le Cercle germano-malgache, par exemple.
Ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit: je ne pense pas que Madagascar ait particulièrement besoin d'être abreuvé de culture française. En tout cas, pas plus que d'une autre. Mais voyez à quel point les artistes malgaches ont besoin de ces structures pour monter une tournée à l'étranger ou même une production locale. Et expliquez-moi comment ils feront si cela disparaît.
On n'en est pas là. Mais la pente suivie ces derniers temps est inquiétante. Elle consiste à considérer la culture comme un produit, à entrer dans une compétition commerciale, à oublier ce qui a fait la beauté (et la faiblesse) de l'exception culturelle française. Les projets de restructuration du secteur ne vont certainement pas dans le sens d'une amélioration de la situation.
Devant les menaces, j'ai copié une séquence d'Esprit critique, émission de France Inter, pour en faire ce matin un "Zapculture" spécial - Zapculture étant le nom dont j'ai baptisé une séquence hebdomadaire d'une dizaine de minutes, qu'on trouve chaque lundi sur mon autre blog. Il y est question de littérature, de musique, de cinéma, de théâtre...
Le péril devant lequel se trouve la "maison" Culture France, et dont les retombées risquent de nous atteindre, valait bien cet arrêt audio.
Vous y accédez en cliquant sur le casque d'écoute posé au début de cette note de blog, puis en téléchargeant la séquence.

March 19, 2010

Ben Arès en récital et en forum au CCAC

Ce soir (vendredi) à 19 heures et demain matin (samedi) à 10h30, rendez-vous au Centre culturel Albert Camus à Antananarivo avec le poète belge Ben Arès, installé à Madagascar et dont le travail s'ancre de plus en plus dans sa terre d'adoption.
Aujourd'hui, il donne un récital poétique qu'il présente comme une lecture-voyage ou lecture-montage de passages d'un livre à un autre livre.
Demain, il parlera de son parcours personnel et de son œuvre. Il use d’une langue métissée qui mêle parfois des mots malgaches aux mots français. Sur ce terrain d’écriture, Ben Arès poursuit sa quête, pose son regard sur les choses et les gens. Il dialoguera avec Andry Solofo Andriamiariseta, universitaire et poète.
Ces deux événements sont liés à l'exposition qui se tient depuis le début du mois au CCAC, un dialogue entre le poète Ben Arès et le photographe Jean-Marc Cransfeld.
Pour faire brièvement connaissance avec l'invité (dont le recueil Sans fil a été coédité par la Bibliothèque malgache), voici une courte vidéo où il parle de Madagascar.



Quatre autres morceaux d'entretien sont disponibles aussi sur cette page de Youtube.

March 16, 2010

Timbres coloniaux de Madagascar

J'ai, il y a très longtemps, encore enfant, commencé une petite collection de timbres. Comme beaucoup d'autres choses, j'ai laissé tomber. C'était l'âge où je n'étais pas encore certain de ce qui allait retenir toute mon attention dans les décennies suivantes - la lecture.
Mais je garde un certain goût pour les philatélistes qui, à leur manière, grâce aux petites vignettes qu'ils accumulent, gardent aussi le souvenir de l'histoire du monde.
Aussi ne puis-je résister au plaisir de partager avec vous une note récente sur le blog Timbres du monde. Elle reproduit quelques timbres de Madagascar avant l'indépendance, c'est-à-dire des timbres français qui, souvent, glorifient "l'œuvre colonisatrice" et ses artisans. Gallieni (et le Lycée qui portait son nom), Lyautey ou Duchesne y ont leur place. Mais je choisis de vous montrer une figure plus pacifique, celle de Jean Laborde.


March 12, 2010

Les parents les plus stricts du monde à Madagascar

Je me suis enfilé, comme on enfile des perles (aux cochons), deux émissions à la suite sur M6, la petite chaîne qui monte, comme on dit. C'était au moins une de trop. Quoique... De voir Les parents les plus stricts du monde à Kinshasa m'a quand même préparé à les voir ensuite à Antananarivo. Une préparation en guise d'énervement croissant devant ce "concept" (c'est parfois presque un gros mot, "concept", mais c'est ainsi qu'ils disent, sur M6) assez curieux. Si, par accident, vous n'en aviez pas entendu parler, je vous le copie/colle tel que le site officiel présente la chose:
Dans «Les parents les plus stricts du monde», deux adolescents en crise partent une semaine à l'autre bout du monde dans une famille d'accueil francophone, beaucoup plus stricte que la leur, pour découvrir d'autres règles éducatives. Immergés dans une culture aux antipodes de leurs repères familiers, ils vont devoir respecter ces nouvelles règles de vie, parfois dans la douleur. Mais, au fur et à mesure de leur vie au sein de cette famille, ils vont prendre du recul sur leur comportement habituel, deviendront moins centrés sur eux-mêmes, et réapprendront à communiquer avec des adultes et à avoir confiance en eux. Intégration, travail, culture, échanges, règles de vie sont autant de nouveautés à explorer pour mieux respecter les autres et pour se respecter soi-même.
Pourront-ils s'ouvrir au monde? Arriveront-ils à changer de comportement de retour à la maison? Réussiront-ils à mieux s'intégrer? Et au final: ce séjour les aidera-t-il à mieux vivre leur passage vers le monde des adultes? C'est au contact d'une famille différente qu'ils vont peut-être changer de vie…
Les deux émissions (et peut-être toutes les autres, que j'éviterai soigneusement de regarder à l'avenir) sont construites selon le même schéma: un garçon de 17 ans et une fille de 15 ans débarquent dans cette famille lointaine, opposent aux règles de cette famille toute l'inertie acquise pendant leurs années de je-m'en-foutisme, se ferment, boudent, piquent des colères. Puis, miraculeusement, découvrent le plaisir de faire quelque chose pour les autres, sourient, paraissent presque heureux. En une semaine (une semaine!), on passe de la répétition du mot "strict" à celle de "changer".
Magnifique, non?
Sinon qu'il est impossible d'y croire plus de quelques minutes. Cela sent à plein nez l'émission scénarisée, truquée au dernier des points, montée de toutes pièces. Soutenue par un commentaire off totalement insupportable de lourdeur.
Demandez aux éducateurs qui tentent des expériences hors du milieu des adolescents en crise s'il est facile de les faire changer sur une durée plus longue. Ces quelques jours sont une insulte au travail de fond que réalisent, péniblement, celles et ceux qui prennent réellement en charge les problèmes de ces jeunes.
On me dira que je n'ai rien compris. Que le contact avec un pays pauvre (car le pays pauvre, s'il n'est pas exprimé dans la déclaration d'intention de l'émission, fait évidemment partie du "concept") est un électrochoc permettant la prise de conscience de ce qu'ils ne sont, en réalité, pas si malheureux dans leurs familles... Tiens donc!
Tout ce qui précède concerne les deux émissions vues hier soir.
Quant à Madagascar en particulier, maintenant...
Tout au début, nous apprenons que "on y parle le malgache mais la langue officielle est le français." On a bien fait de venir. Marie et Mickaël aussi, le second glissant discrètement (mais pour que nous l'entendions bien) à l'oreille de la première, sur le trajet (en 4x4) qui les conduit d'Ivato à Tanjombato: "Ils marchent pieds nus!" Indignation, stupéfaction, incrédulité...
Heureusement (pour eux), la famille d'accueil habite une maison très correcte, dans une cité fermée par une barrière. La sécurité, vous comprenez...
Bon, je ne vais pas vous faire le récit complet de ce que vous avez peut-être manqué (auquel cas vous n'avez rien manqué). Antananarivo et Madagascar sont finalement peu présents dans ce que M6 qualifie de documentaire (à mes yeux, il s'agit plutôt d'une "docu-fiction"). Il y a bien les paysages, les maisons des Hautes Terres, les enfants, les gens qui travaillent dur, les pavillons d'Analakely et, à la fin, le parc de Tsimbazaza où l'on verse quelques larmes, soulagement, bonheur et autres sentiments mélangés, surjoués, définitivement irritants.
Madagascar, terre de contrastes pour qui n'a jamais rien vu hors de son environnement français. Oui, et alors? Une mauvaise émission reste une mauvaise émission.

P.S. Si vous l'avez pensé, vous ne vous êtes pas trompés, je suis un peu en colère...

March 11, 2010

J'en ai rêvé, Gallica l'a fait

Avant-hier (un peu plus bas dans cette colonne), je lisais le formidable article de Jean-Michel Racault sur les Quimos de Madagascar au 18e siècle. Et je me désolais, simultanément, de ne pas avoir accès à tous les ouvrages qu'il cite dans ses nombreuses notes. En particulier les textes de Maudave, dont j'ai entendu parler souvent, dont la plus grande partie sont, je crois, toujours à l'état de manuscrits, mais dans lesquels certains auteurs ont puisé d'abondance. H. Pouget de Saint-André est l'un d'eux, cité par Jean-Michel Racault pour La colonisation de Madagascar sous Louis XV d’après la correspondance inédite du comte de Maudave. Introuvable sur Internet...
Jusqu'à ce matin où, consultant comme chaque jour la colonne de droite de ce blog, à la rubrique "Nouveautés Gallica", je trouve ce livre.
C'est donc un beau début de journée.
Et la promesse d'un travail de réédition à faire très vite dans la Bibliothèque malgache électronique.
Et, tout de suite, l'introduction de cette nouvelle référence (avec trois autres) dans le Supplément permanent à la bibliographie Madagascar sur Internet.
Alors, elle n'est pas belle, la vie?

March 10, 2010

Cinq ou six ouvrages de Rabearivelo dans la Bibliothèque malgache

En réalité, c'est même six puisque la première réédition électronique de Jean-Joseph Rabearivelo groupait Presque-Songes et Traduit de la nuit. Il y a eu ensuite un essai, Quelques poètes I. Enfants d'Orphée; un opéra, Imaitsoanala, Fille d'oiseau; un autre recueil de poèmes, Volumes. Et voici maintenant, cinquième livre électronique (gratuit, comme les autres) et sixième titre, Vieilles chansons des pays d'Imerina.
Il s'agit, si mes informations bibliographiques sont exactes, du premier ouvrage posthume, sorti en 1939, deux ans après la mort de l'écrivain.
Robert Boudry, qui en a préfacé l'édition originale, le décrit comme «un recueil de courts poèmes en prose, conçus le plus souvent sous forme de petits discours ou de dialogues, suivant une esthétique semblable. On y trouve d'anciens hain-teny devenus classiques que l'auteur se borne à transcrire dans notre langue, d'autres modernes, parmi lesquels il est malaisé de distinguer ceux qui sont originaux de ceux qui sont empruntés, d'autres enfin qui sont des paraphrases ou des adaptations.»
Le préfacier ajoute: «Ces Vieilles chansons, puisées aux sources mêmes de la tradition des Hauts-Plateaux, évoquent et fixent ce qui constitue l'essentiel de la poésie de l'Imerina, le précieux et le familier, le mythique et le réaliste.»
La préface n'est pas libre de droits et n'apparaît donc pas dans notre réédition. Vous trouverez ce cinquante-sixième ouvrage de la collection sur le site de la Bibliothèque malgache, rubrique Bibliothèque malgache électronique - vous connaissez la chanson...

March 9, 2010

Les Quimos de Madagascar à la fin du 18e siècle

Dans les dernières décennies du 18e siècle, le mythe - ou la réalité - des Quimos de Madagascar porte la signature d'une époque où l'anthropologie ressemblait peu à celle qui est pratiquée aujourd'hui.
Un article très documenté de Jean-Michel Racault fait le point sur le sujet dans La revue des ressources, renvoyant à quantité de textes contemporains du mythe. Il ouvre donc des pistes multiples, au-delà de l'objet de sa recherche. Qui le "conduit à s’interroger sur le statut bien incertain de ce qu’on appelle une vérité scientifique, et peut-être à conclure qu’il est plus difficile de cerner la vérité elle-même que les « effets de vérité » qui en créent l’illusion."
Une lecture indispensable.

March 6, 2010

Dialogue entre Jean-Marc Cransfeld, photographe, et Ben Arès, écrivain

Je ne vous oublie pas. Ceux qui suivent mon autre blog, Le journal d'un lecteur, auront peut-être constaté que j'étais très occupé, ces derniers jours, et que j'avais pour une fois la tête à la Foire du Livre de Bruxelles plutôt qu'à Madagascar.
Mais il m'était impossible, vous comprendrez pourquoi un peu plus loin, de manquer l'exposition de Jean-Marc Cransfeld et Ben Arès qui se tient au CCAC du mardi 9 au samedi 27 mars. Ce Dialogue entre un photographe et un écrivain se tient dans un véritable salon, aménagé par l’Antiquaire de Tana pour la lecture de poésie, et ouvert à tous les visiteurs de l’exposition.
Des ouvrages de poésie de la Médiathèque du Centre Culturel Albert Camus seront mis en valeur et disponibles pour la lecture sur place.
Ben Arès interviendra aussi deux fois en public:
  • Le vendredi 19 mars à 19 heures, pour un récital poétique dans le cadre du Printemps des poètes.
  • Le lendemain, samedi 20 mars à 10h30, pour une rencontre où il évoquera son parcours personnel et son œuvre en compagnie d'Andry Solofo Andriamiariseta, universitaire et poète.
Pour vous mettre en appétit, voici une photographie de Jean-Marc suivie d'un texte de Ben qui présente l'exposition à sa manière.

Les photographies que Jean-Marc Cransfeld donne à voir aujourd’hui s’inscrivent dans un laps de plusieurs années, ont été prises au cours de plusieurs séjours passés à Madagascar, en divers lieux de ce pays qu’il a parcouru de long en large. C’est en quelque sorte une rétrospective sur un parcours dans le temps et l’espace de l’île rouge. Le regard qu’il pose est éloigné des clichés touristiques, de tout a priori de nouveau venu. Les images sont parlantes voire frappantes. L’amour en est le fil conducteur. De la photographie et de ses sujets. Au bout de ces années l’amour toujours et je n’en dirai pas plus.
J’en suis à mon troisième séjour depuis 2008, année où j’étais lauréat d’une bourse d’écriture en Belgique. J’étais venu une première fois en 2000, à Tana, une petite quinzaine de jours. J’ai été appelé par Madagascar après le décès de mon fils natif d’Antsirabe en 2005. Après ce premier retour au pays natal, sur les lieux épars de la vie et de la mort, j’ai découvert qu’autre chose me retenait. Que "d’autres voix" me parlaient et m’invitaient à revenir. Je ne me l’explique pas tant l’attache avec cette terre, les gens de cette terre est forte, incontrôlable. Je consacre actuellement une partie de mon temps à un roman intitulé Tromba. Quelques-uns des manuscrits de ce roman en chantier vous sont présentés ici.
Jean-Marc et moi nous sommes rencontrés grâce à Madagascar et Pierre Maury en 2008. Nous sommes nés en Belgique, dans la région liégeoise. Grâce à l’Île et l’un de ses incontournables, nous sommes devenus amis.
Je n’ai pas choisi d’illustrer les images. Cela eût été artificiel et puis quel intérêt! Les photographies de Jean-Marc se passent de mots. Le dialogue est plus fort dans les échos, les résonances, les accords, décalages et concordances. De façon trouble et discrète. Plain chant aux images d’une trajectoire. En regard quelques manuscrits liés à une autre trajectoire. Pour un dialogue des matières visuelles, textuelles. Pour un dialogue né de divers tissages. Nous avons simplement choisi quelques thématiques, avons décidé d’aller chercher dans nos matières respectives pour les relier, les confronter en exploitant l’espace de la galerie du CCAC.
Ainsi, dans l’enfilade de photographies sur le quotidien et les petits métiers, un texte dont les narrateurs sont les gens des petits métiers et sans métiers, à Toliara, ville où je réside. En relation avec la série des neuf portraits, un texte sur la question identitaire à Madagascar, sur les origines, la filiation. Un autre qui vient s’inscrire dans la série des filles de nuit. Un quatrième sur le tsapiky vécu de l’intérieur au cours d’un bal poussière, en fin d’une série de photographies, qui dialogue, tant par le sujet que par le format, avec la première image. Pour clore l’exposition, un cinquième texte dont le narrateur est un Malgache qui parle d’un takamaso, d’une tradition, qui avait bien sa place dans le petit ensemble «Religions et croyances».
Le dialogue est là. Dans la matière, les sujets traités, en exploitant l’espace. Dans les matières plastiques aussi. Sans renier la crasse, la poussière, le rhum, le sang, l’obscur qui est la vie même. Sans craindre l’illisibilité parfois, accidentelle. C’est une invitation à la nuit de la substance, à ressentir.
Lire, donner à lire, et me soucier des yeux du lecteur était l’affaire d’un autre jour, d’un autre lieu: le livre.
Ben Arès

February 28, 2010

Le cabinet singulier du Professeur Rakotolémurherherr

C'est une exposition singulière, en effet, qui se tient dans le hall de la gare d'Antananarivo. Le montage n'était pas totalement achevé quand je l'ai visitée hier matin (le vernissage avait lieu le soir). Myriam Merch, alias Sexy Expédition Yéyé, qui a réalisé l'exposition avec Anne Deguerry et Frédéric Viala, a quand même pris le temps de m'expliquer de quoi il retournait.
Visite guidée, donc, à voir tout de suite en vidéo, et sur place jusqu'au 13 mars.



February 24, 2010

Un lémurien héros de bande dessinée

Je lis peu de bande dessinée. Cela n'a pas toujours été le cas. Mais le temps me manque et je suis donc moins attentif à ce pan de la production éditoriale. (Ne me dites pas que c'est une erreur, je sais.) Heureusement, ce blog a quelques lecteurs attentifs qui jouent, lorsque le besoin s'en fait sentir, un rôle de rabatteurs. C'est donc alerté par des commentaires que je suis allé voir un article de Mediapart intitulé: Maki, un lémurien en colo.

J'ai du même coup découvert l'existence de Fabrice Tarrin, dont je sais peu de choses sinon qu'il est un des nombreux dessinateurs à avoir travaillé sur les aventures de Spirou et Fantasio.
Un pan de sa production nous intéresse tout particulièrement puisqu'il a sorti en 2008 l'album dont je vous montre la couverture, Journal intime d'un lémurien.
Pour ce que j'en sais, après la lecture de quelques articles à propos de cet album, et si j'ai bien compris, le lémurien occupe ici une place aussi éloignée de Madagascar que la Grande Île est éloignée d'elle-même dans les films Madagascar. Vous me suivez? Je veux dire que Fabrice Tarrin n'a probablement pas choisi cet animal par amour de Madagascar mais parce qu'il lui trouvait une bonne bouille et que, pour se représenter lui-même, il valait mieux une bestiole sympathique. (J'interprète un peu.) Toujours est-il que le lémurien est devenu emblématique d'une œuvre qui se poursuit notamment sur son blog où les dernières notes (dessinées, comme il se doit) terminent une histoire intitulée Charlotte Gainsbourg mon amour, et où l'on retrouve, vous l'aviez deviné, un lémurien...

Fin janvier, Fabrice Tarrin a sorti un nouvel album, Maki: un lémurien en colo. Comme je n'ai jamais vu de lémurien en colo, même à Madagascar - et, forcément, encore moins ailleurs -, je suppose que l'auteur, toujours sous l'apparence d'un lémurien, revient sur des expériences personnelles. Où, une fois encore, notre île-continent ne semble pas être évoquée. (Je me base sur le résumé et les extraits de planches fournis par l'article de Mediapart évoqué plus haut.)
Bonne nouvelle, pour ceux qui aimeront ça ou qui collectionnent compulsivement toutes les représentations de lémuriens: il devrait y en avoir d'autres, puisque l'éditeur annonce l'album comme le numéro 1 d'une série.
A suivre, donc...

February 13, 2010

Deux nouveautés en librairie: un polar et un beau livre

Je continue à scruter avec attention non seulement les numérisations d'ouvrages anciens accessibles gratuitement sur Internet, mais aussi les nouveautés qui arrivent dans les librairies françaises. La plupart du temps - c'est le cas cette semaine -, je n'ai pas lu ces ouvrages et je ne peux donc vous fournir que les informations de l'éditeur. Voici donc un roman policier et un beau livre.

François Ferbos. Grand théâtre

Fraîchement nommé chef de la section financière au SRPJ de Bordeaux, le commissaire de police Vincent Laffargue renoue avec sa ville natale.
Malgré les mises en garde de son supérieur hiérarchique, il n’hésite pas à ouvrir un dossier brûlant qui compromet un notable de la cité. Le personnage se révèle encore plus sulfureux que Vincent ne pouvait l’imaginer et sous un vernis respectable, tous les coups sont permis...
L’aventureux commissaire mène son enquête qui le conduit, contre vents et marées, des rives de la Garonne jusque dans l’océan Indien, à Madagascar et La Réunion. Dans la même veine que Traque en haute mer (Éditions Le Télégramme) ce polar nautique associe avec aisance suspense et art de la navigation.

François Ferbos a fait carrière dans la Police. De Strasbourg à la Nouvelle-Calédonie, en passant par la Bretagne, il s'est frotté de près au trafic de stupéfiants puis au terrorisme, avant d'assurer dix années durant la direction de la brigade financière de Bordeaux. Il consacrait ses moments de liberté à la croisière et à la voile, aujourd'hui il vit à plein temps sur son bateau et Traque en haute mer était son premier roman.

Philippe Aimar. Rêve de Madagascar

Dans un manuscrit laissé sous une stèle de Fort-Dauphin en 1653, Etienne de Flacourt met en garde les étrangers contre les autochtones de Madagascar en écrivant: "Prends garde, étranger. Ne fais pas confiance aux habitants de cette île, leurs flatteries réservent les plus grands dangers". Le voyage que nous offre Philippe Aimar à travers la Grande Île dément fondamentalement cette mise en garde. Les photos nous montrent la confiance qui s'établit entre les modèles et le photographe et l'attachement que ce dernier porte à la Grande Île et à ses habitants. Les résultats constatés se rapprochent de ceux obtenus par Jean Paulhan qui avait pris la peine, il y a près de 90 ans, de partager le quotidien des Malgaches, de différentes conditions, afin de saisir le sens profond des Hainteny.
Ici le photographe a adopté la même démarche et nous présente une nature attachante et un peuple des plus accueillants avec beaucoup de réalisme. Fernand Léger n'a-t-il pas défini la qualité d'une oeuvre picturale en raison directe de sa quantité de réalisme. Mais, l'interprétation d'une photographie ne peut pas être considérée comme une valeur absolue, elle est le produit d'une subjectivité particulière du regardant. Quand l'ai compulsé l'album présenté par Philippe Aimar, c'est ma propre impression devant ces oeuvres d'une rare qualité que j'essaie de faire partager à ceux qui auront le privilège de se pencher sur ces images de la Grande Île. Le photographe a su rendre l'atmosphère et la couleur de chaque région et tirer de l'individu les spécificités qui le particularisent tout en l'intégrant dans son groupe d'appartenance. Si nous regardons cette jeune femme de la page 36, avant même de lire la notation de bas de page, rien que par sa tenue et sa coiffe nous la situons d'emblée dans l'ethnie Betsileo. Il en est de même pour la plupart des portraits pris un peu partout dans l'île.
Ce qui ne manquera pas de frapper la curiosité de ceux qui ouvrent ce livre est l'itinéraire suivi par le photographe. Au lieu de se précipiter sur les lieux touristiques connus, il nous entraîne dans un parcours inédit. Après une visite prégnante chez les Merina, les Ambaniandro (ceux qui sont sous le soleil) du haut plateau central, en ayant pris soin d'éviter les sites trop vus et revus - mais qu'ils ne néglige pourtant pas (on les perçoit à travers certaines photos) - en insistant parfois sur ce que le commun des autochtones ne remarque même plus, à force de les côtoyer quotidiennement. Ainsi en va-t-il des images devenues parties intégrantes du paysage, comme ces petits marchands des bords des routes ou ces joueurs de fanorona qui s'approprient une partie de la voie, ce qui nous plonge dans un exotisme bon enfant. Le photographe porte son appareil, non directement vers l'est ou vers le nord où sont les sites touristiques les plus fréquentés, mais vers le sud. Sur sa route, il nous fait entrevoir la beauté des environs de la capitale avec ses rizières, nous montre les étals des petits producteurs de charbon de bois qui préfigurent malheureusement la déforestation. Sa première étape dans le pays des Betsileo (nombreux invincibles) est l'Isalo. Il présente en quelques photos ce qui dorénavant particularise la région: la recherche des pierres précieuses avec ce que cela implique de risque, d'effort quasi-inhumain et de misère dans l'espoir. Il ne se prive pourtant pas de nous faire admirer le sourire d'une jeune Vezo (ceux qui pagaient). Et son voyage reprend toujours vers le sud, comme si le photographe voulait se mettre sur les traces d'Etienne de Flacourt, mais il délaisse Fort-Dauphin, et s'oriente délibérément vers Tuléar, le pays des Bara (qui disent que la signification de leur nom est ceux qui ont la voix grave et sourde mais que les autres connaissent pour des simples d'esprit et des naïfs) pour nous faire appécier un crépuscule sur les dunes, là où la mer, la terre et le ciel majestueusement se confondent. Avec des paysages féériques, de jour comme de nuit, et des Antandroy (ceux des ronces) rayonnants dans la simplicité de leur quotidien le photographe-pérégrin nous fait partager son émotion cette nature d'une beauté à couper le souffle. Mais là où l'on s'attendait à le voir continuer sa route vers Morondava, il marche sur le tropique du Capricorne et se retrouve sur la côte orientale de l'île les pieds dans l'eau du canal de Pangalane, s'intéressant aux occupations aquatiques des Antaisaka (ceux de des longues vallées), des Antambahoaka (ceux du peuple) et des Betsimisaraka (nombreux qui ne se séparent pas). Toamasina est suggérée par une photo du lac sur le canal de Pangalane, puis nous voilà tout de suite au pays de la vanille et des Sakalava (ceux des longues vallées) au nord est de l'île, pour nous retrouver vers le nord face à l'île de Nossy-Bé devant des paysages grandioses d'une mer d'émeraude présentant les boutres comme des bijoux précieux et d'un ciel souvent bleu à la limite possible de la couleur.
Cet ouvrage de Philippe Aimar ne doit pas être vu uniquement comme une présentation de la nature mais aussi comme une étude de l'homme malgache dans un essai chaleureux et subtil. Le photographe a mis dans son travail toute sa passion et son attachement pour l'île et ses habitants. Il propose une approche originale et vivante de la société malgache mettant en évidence un réseau d'affinités et d'échanges qui le relie à un monde qui le subjugue, l'intrigue et l'attache. Je dirais même une confrontation affective de deux visions du monde différentes avec ce que cela implique de subjectivité. Chapitre après chapitre nous faisons connaissance avec les différentes ethnies malgaches. Ce qui m'a aussi ému dans ce livre c'est l'objectivité du photographe. Il ne s'est pas contenté de montrer la beauté de l'Ile avec des gens heureux, mais il fait toucher du doigt le paradoxe de la beauté et de la misère en montrant comment les Malgaches acceptent leurs destins et que les gens pauvres ne sont pas toujours tristes.
Qu'attend-on d'un livre de photographies si ce n'est de nous faire connaître un pays et de nous procurer du plaisir? Les deux objectifs sont atteints dans ce livre de Philippe Aimar et je ne puis que souhaiter à tous ceux qui l'ouvriront le même plaisir et émotion que j'ai eus en le consultant.

Philippe Aimar est né en 1958 à Paris. Il est journaliste professionnel et collabore régulièrement avec des magazines français et internationaux. Il fait ses débuts chez Sipa Press en 1986. En 1991, il part aux Etats-Unis et devient correspondant permanent pour le compte de cette agence à Los Angeles. A cette époque, une série d'événements riches en actualité interviennent. 1992, les émeutes de Los Angeles font la une des magazines du monde entier. Les photos de Philippe Aimar sont diffusées et largement publiées (Newsweek, Time, Paris Match, VSD etc..). En 1994, incendies et tremblements de terre frappent la Californie. De nouveau, ses photos sont largement publiés. Il réalise également de nombreux portraits des personnalités du show business américain. En 2002, à son retour en France, il prend la rédaction en chef de l'agence photo Corbis Sygma. Quelques temps plus tard il se consacre à son premier livre photo sur Madagascar. En 2005, il édite avec son confrère Salem Trabelsi (rédacteur en chef du quotidien tunisien La Presse) un livre sur la Tunisie. En 2008, il rejoint l'agence Hamsa Press (M6, Canal +, TF1...) et réalise plusieurs documentaires. En 2009, il publiera un livre intitulé Vanille - La route bourbon.

February 10, 2010

Une bibliographie en expansion permanente

Je vous l'annonçais il y a un mois, je le rappelle pour les distraits qui auraient perdu l'information de vue: au lieu de publier ici, à un rythme qui était mensuel l'an dernier, des suppléments à la bibliographie de Madagascar sur Internet (le n° 54 de la Bibliothèque malgache électronique, téléchargeable sur le site de la Bibliothèque malgache), je tiens à jour une page intitulée sobrement, ou presque, Supplément permanent à la bibliographie Madagascar sur Internet.
Ce supplément grandit à vue d'œil, à raison pour l'instant d'un titre par jour en moyenne. Je ne saurais trop conseiller aux amateurs de livres anciens sur Madagascar de s'y reporter régulièrement. Ils y trouveront, par exemple, cette référence introduite hier vers une numérisation effectuée par Gallica d'un ouvrage que je ne connaissais pas et que je vais regarder de plus près dès que j'en trouve le temps: Sous les Tropiques. Impressions de voyage d'un gamin de Paris à Madagascar, par Auguste Mailloux, dont j'extrais une illustration.


February 8, 2010

Madagascar, l'ailleurs par excellence

Dans Robe de marié, un thriller de Pierre Lemaitre qui a connu un joli succès l'an dernier et qui vient de reparaître en poche, Sophie a toutes les raisons de vouloir partir loin. Je ne vous raconte pas pourquoi, c'est l'objet du livre et il vaut la peine d'être découvert.
Si j'y fais allusion, c'est parce que l'idée de cet ailleurs dont elle rêve se confond, le temps de passer devant une agence de voyages, avec l'image de Madagascar. L'ailleurs par excellence, semble-t-il...
Extrait.
Sophie est dans le bus. Aller vite. Ses yeux fixent le vide devant elle. Comment faire pour aller vite? Elle regarde sa montre: juste le temps de rentrer et de dormir deux ou trois heures. Elle est épuisée. Elle remet ses mains dans ses poches. C’est curieux ce tremblement, c’est par moments. Elle regarde par la vitre. Madagascar. Elle tourne la tête et aperçoit un très court instant l’affiche qui a attiré son attention. Une agence de voyages. Elle n’est pas certaine. Mais elle se lève, appuie sur le bouton et guette l’arrêt suivant. Elle a l’impression de parcourir des kilomètres avant que le bus s’arrête enfin. Elle remonte le boulevard, de sa démarche de jouet mécanique. Ça n’était pas si loin, finalement. L’affiche montre une jeune femme noire au sourire naïf et charmant, portant une sorte de turban sur la tête, le genre de truc qui doit avoir un nom dans les mots croisés. Derrière elle, une plage de carte postale. Sophie traverse la rue et se retourne pour voir de nouveau l’affiche avec la distance. Manière de réfléchir.
– Affirmatif, a dit le sergent-chef. Moi, je n’aime pas tellement ça, vous savez, je suis pas un grand voyageur, mais enfin, on a des possibilités quand même. J’ai un copain, il est sergent-chef comme moi, il va partir à Madagascar. Remarquez, je comprends: sa femme est de là-bas. Et finalement, on ne le croirait pas mais il n’y en a pas tant que ça qui veulent quitter la métropole, vous savez! Pas tant que ça…!