October 5, 2017

Il y a 100 ans : La main-d’œuvre indigène (3)

(Suite.)
Ils sont donc des frères en état de minorité complète, ignorants et incapables de se conduire par eux-mêmes. Il nous incombe dès lors le devoir absolu de les éduquer et de les diriger.
Est-il permis à nos jeunes frères d’échapper aux devoirs que, dans leur propre intérêt, nous avons cru devoir leur imposer ? Personne ne l’admettra.
Même parmi ceux qui travaillent, à de rares exceptions près, le sans façon, on ne peut plus irrespectueux, avec lequel ils traitent leur patron, surtout lorsque celui-ci est un Européen, est à peine croyable. Entre eux, ils ne désignent ce dernier que par un sobriquet qui caractérise le défaut culminant qu’ils ont découvert en lui.
Qu’une observation faite par lui ne leur convienne pas, quelque justifiée qu’elle soit, ils le plantent là, quelque pressé que soit le travail, quelque dommage qui puisse en résulter pour leur patron, sans terminer le mois pour lequel ils se sont engagés, ni même quelquefois la journée commencée.
Bien mieux, si le bruit d’une fête arrive jusqu’à eux, ou si un enterrement passe dans le voisinage, – car un enterrement est pour eux une très grande fête où l’on se soûle et où l’on fait ripaille, – ils n’hésitent pas à planter là leur travail, sans crier gare et sans même avertir leur employeur.
Cela ne les empêche pas de venir aussitôt après réclamer insolemment le montant de ce qui leur est dû.
Et vite de vous exécuter, car sans cela le conseil d’arbitrage vous attend.
Le conseil d’arbitrage !!! Ah ! quel bon boulet nous a légué là le socialiste Augagneur. Ce n’est pas qu’en elle-même cette institution ne soit pas une admirable chose. Dans l’Émyrne et le Betsileo elle donne peut-être de bons résultats. Mais, appliquée dans le reste de la colonie, notamment sur la côte Est, où l’indigène n’a pas de domicile fixe, et change de nom plus souvent que de chemise, cette institution n’est plus qu’un déplorable anachronisme.
À ce sujet, il est à remarquer que l’administration centrale prend souvent des mesures englobant la colonie entière sans tenir compte des milieux, des différences de zones, de la mentalité malgache, et surtout sans consulter les intéressés. C’est une sorte de lit de Procuste, auquel tous doivent s’ajuster.
 (À suivre.)

Le Tamatave

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