21 mars 2019

Il y a 100 ans : Pour faire travailler le Malgache (1)

A tout hasard, et pour éviter tout malentendu, je répète ce que j'ai déjà dû écrire ici ou là: cette compilation de la presse d'il y a 100 ans ne reflète, évidemment, que les idées de cette époque - et non les miennes.


Le Malgache est-il foncièrement paresseux ?
Est-ce une affaire d’appréciation et dépend-elle du bout de la lorgnette dont on se sert ?
« Lynx pour nos pareils et taupes envers nous », a dit le fabuliste, tant les travers humains sont pareils, aussi bien dans la Métropole qu’aux colonies.
D’après les observations qu’un abonné a adressées à notre excellent confrère la Tribune de Madagascar, l’indigène de la Grande Île n’est pas plus paresseux qu’un autre, mais on a toujours négligé de l’encourager au travail, on l’a laissé croupir dans sa routine comme on a laissé rouiller dans la brousse les charrues que Gallieni avait fait venir d’Europe pour conquérir le Malgache à nos méthodes agricoles européennes.
En même temps qu’on négligeait de l’éduquer, on se refusait à étudier sa mentalité ; le Malgache n’est pas réfractaire à l’effort, mais, outre qu’il n’a pas l’argent nécessaire pour s’outiller, il aime les bénéfices immédiats qui se réalisent assez facilement. Or, il ne paraît guère qu’on lui a facilité la besogne.
Ainsi, l’année dernière, on a demandé aux indigènes de cultiver les légumes et même de surproduire, leur récolte a été réquisitionnée, payée un prix raisonnable il est vrai, mais…
Mais – et c’est que n’admet pas l’indigène, simpliste – des intermédiaires ont surgi de partout, vendant des produits qu’ils n’avaient point récoltés, pour lesquels ils n’avaient point peiné ; ils les ont vendus, à Tananarive par exemple, cinq fois plus cher qu’ils ne leur avaient coûté ; or les indigènes travailleurs se demandent encore à l’heure actuelle pourquoi ce ne sont pas eux, producteurs, qui bénéficient des augmentations de prix.
Mais ceci n’est qu’un côté de la question, ainsi que le fait justement observer l’abonné de la Tribune.
Ce qu’il faut à l’indigène, c’est un bénéfice immédiat et assuré, et il est très possible de le satisfaire.
Quand le manioc et la patate ont atteint des prix élevés, il ne fut pas nécessaire d’exhorter les Malgaches à les cultiver ; ils défrichèrent d’eux-mêmes tous les terrains disponibles.
(À suivre.)
Le Courrier colonial



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