30 août 2019

Il y a 100 ans : « Pays riche, mais qui a besoin de médecins », nous dit M. Schrameck (1)


(Du correspondant du Petit Journal.)
Marseille, 5 août. – « Est-ce un retour définitif ou un simple congé de repos qui vous ramène en France ? » ai-je demandé à M. Schrameck, gouverneur de Madagascar, arrivé à Marseille aujourd’hui à midi.
— Un congé que je passerai tranquillement à Vichy et à Marseille, m’a répondu l’ancien préfet des Bouches-du-Rhône avec un sourire qui disait peut-être d’autres intentions. Mais je vais, tout d’abord, m’occuper des affaires de la colonie avec le gouvernement, je repartirai demain soir pour Paris. »
Et, comme je le questionnais sur la situation de Madagascar et sur son avenir, M. Schrameck m’a répondu :
« Madagascar est une colonie admirable, tant au point de vue agricole qu’au point de vue minier, et ses richesses sont considérables ; mais c’est un pays qui jusqu’à ce jour a été très insuffisamment exploité et sa situation réclame des réformes urgentes, parmi lesquelles je citerai tout d’abord une réorganisation complète des services d’assistance médicale.
« J’estime qu’il y a lieu de placer un médecin au moins à la tête de chaque province avec un personnel suffisant pour faire face aux besoins indispensables.
« Madagascar est divisé en 25 provinces ; j’en ai visité huit, et d’ailleurs j’ai passé les deux tiers de ma présence dans l’île à la parcourir pour la connaître dans ses diverses parties et c’est à la suite d’une étude approfondie que j’en suis venu à considérer comme la plus utile et la plus urgente de toutes les réformes celle de l’assistance médicale. Il nous faut des ressources pour attirer dans le pays de médecins intelligents, énergiques, dévoués et pour les conserver. Nous les trouverons. D’ailleurs, déjà ceux qui viennent sont mieux payés que ceux d’autrefois. »
M. Schrameck nous dit que la grippe espagnole a fait 50 000 victimes dans notre colonie et qu’elle a presque complètement anéanti la population de la Réunion où, faute de pouvoir enterrer les morts, ceux-ci pourrissaient à l’air comme sur un champ de bataille.
(À suivre.)
Escudier.
Le Petit Journal



Deux volumes de compilation de la presse à propos de Madagascar il y a 100 ans sont disponibles. La matière y est copieuse et variée, vous en lisez régulièrement des extraits ici. Chaque tome (l'équivalent d'un livre papier de 800 pages et plus) est en vente, au prix de 6,99 euros, dans les librairies proposant un rayon de livres numériques. D'autres ouvrages numériques, concernant Madagascar ou non, sont publiés par la Bibliothèque malgache - 82 titres parus à ce jour.

29 août 2019

Il y a 100 ans : Les prisons de la Grande Île sont malsaines


Les geôles de la Grande Île valent, elles aussi, leur pesant d’arsenic. Un homme détenu est un homme condamné à mort. La tuberculose et le paludisme en ont vite raison, quand la grippe ne se charge pas de la besogne.
Cette situation émeut quelques-uns de nos compatriotes de là-bas. Ils voudraient que l’Administration se préoccupât de donner quelque confort aux prisonniers, qu’elle prenne ses dispositions pour leur éviter le désagrément des rhumes de cerveau et autres maladies plus graves.
Nos compatriotes de la Grande Île ont-ils raison de demander des logements confortables pour les prisonniers ? Pour peu qu’on se lance dans cette voie, ils seront mieux logés que les honnêtes gens, et la prison deviendra une punition tout à fait morale. La perspective d’aller tresser des chaussons de lisière ou des chapeaux en raphia n’est certes pas de nature à empêcher un quidam de loger son couteau dans la gorge du voisin. Il en va autrement lorsque le sire sait d’avance qu’il n’échappera au bourreau que pour mourir du choléra.
Un séjour en prison n’a jamais amendé voleur ni assassin, bien au contraire – et nos juges, en général, ne se leurrent pas de cet espoir. Ils condamnent, pour préserver la société. L’oiseau qu’ils mettent en cage meurt dans sa prison : c’est fort regrettable, mais la société est débarrassée. Ce système est en réalité une sélection.
À vrai dire, on met aussi en prison, avec les gens de sac et de corde, d’invétérés paresseux qui ont commis le crime de ne pas payer l’impôt. M. Klotz trouverait sûrement que ceux-là sont les plus coupables et qu’ils sont mûrs pour la roue, la hart, etc., mais tout le monde ne voit pas les choses sous le même angle que notre grand argentier.
Ceux-ci également ne doivent pas se trouver trop bien en prison, sinon ils ne payeront jamais l’impôt.
Le Courrier colonial

Pour honorer Gallieni

Un comité s’est constitué à Madagascar pour élever un monument à l’ancien gouverneur de la grande île. À l’heure actuelle, trois cent vingt mille francs ont été recueillis – et voici la touchante particularité de cette souscription : les deux tiers de cette somme proviennent d’offrandes d’indigènes !
La Presse


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27 août 2019

Il y a 100 ans : Contributions indirectes


Une direction des Contributions indirectes est créée à Madagascar. Le titulaire du poste, un des fonctionnaires les plus aimables, en prendra possession à son retour de congé.
De L’Action.
Le fonctionnaire dont parle notre confrère est M. de Rocca-Serra qui vient d’avoir sa retraite comme Directeur des Douanes et prendra prochainement la direction des Contributions Indirectes.
Étant donné l’âge avancé et la fatigue générale résultant de son très long séjour aux Colonies, les amis de M. de Rocca-Serra auraient désiré le voir enfin prendre le repos qu’il a si bien mérité, mais il a tenu à rester sur la brèche jusqu’au bout. Nous ne pouvons que l’en féliciter en souhaitant que ce nouvel effort ne soit pas trop préjudiciable à sa santé.

Soirée théâtrale

C’est ce soir qu’a lieu la soirée théâtrale annoncée dans un de nos précédents numéros avec, au programme, « Gringoire » et « Seul Enfin » ainsi qu’une partie concert.
À ce propos, un groupe aussi peu important que remuant, n’ayant pas été satisfait de l’attribution des places, a cru devoir adresser une réclamation à Monsieur l’Administrateur-Maire !
Ce dernier n’a pu qu’être fort surpris de recevoir cette réclamation à propos d’une fête qui ne le concerne en rien. En effet, dans la circonstance, son rôle s’est borné à mettre la salle du théâtre à la disposition d’un groupe d’artistes amateurs. Ce sont ces derniers qui ont fait tous les frais et ont organisé cette représentation, qui n’a rien d’officiel, et qui disposent des places. Qu’ils se soient réservés pour eux, leurs familles et même leurs amis les places qui leur convenaient, quoi de plus légitime ! Du reste, il n’y a pas eu de location de places et aucun supplément n’a été perçu à cet effet. Conséquemment, les protestataires n’ont qu’un droit, c’est de s’abstenir d’assister à la représentation si les places qui leur sont offertes ne sont pas à leur convenance ; mais qu’ils n’essayent pas par des manœuvres intempestives d’amener le trouble et de nuire à la cordialité qui doit régner à l’occasion de notre fête nationale, doublée de celle de la victoire. Les bons Français ne le toléreraient pas.
Le Tamatave


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24 août 2019

Il y a 100 ans : Abondance


La semaine dernière, cinq bateaux stationnaient en rade de Tamatave : l’Orénoque, le Kouang-Si, le Kaggefos, le Sidon, le Malgache. Cela provenait de ce que depuis longtemps la crainte des sous-marins et les réquisitions nous avaient privés de transports ; et une fois le passage libre et les réquisitions finies, les paquebots sont arrivés tous en même temps. Ceci rappelle un épisode où des poilus isolés qui, n’ayant rien eu à manger pendant quatre jours, ont reçu, aussitôt que la liaison fut rétablie, leur ration de ces quatre jours qu’on leur avait précieusement conservée.
Cinq bateaux à la fois, on n’était guère habitué à cela. Si cet état de choses tend à se perpétuer, le futur port de Tamatave, encore à l’état de projet, va être trop petit pour les contenir. Il n’est pas encore construit et voilà qu’il demande déjà à être agrandi.
Lorsque les cinq bateaux étaient en rade, les poilus circulaient de l’un à l’autre tels que des oiseaux qui voltigent de branche en branche. L’un d’eux même, ne se doutant pas que le bateau sur lequel il se trouvait et qui n’était pas le sien allait partir, est allé aborder vers des rivages inconnus qui ne lui rappelaient guère son pays natal.
Des militaires de Tamatave passagers de l’Inga n’ont pas attendu la fin de la villégiature de ce paquebot à Diégo-Suarez, et ont sauté sur le Kouang-Si qui les a amenés à Tamatave.
L’affluence de paquebots aura pour résultat de diminuer le prix du fret et les produits pourront enfin s’écouler vers la métropole. Ils ramèneront aussi beaucoup de bras nécessaires à la reprise de la vie économique.

Voirie

Nous signalons au service de la voirie l’état déplorable de certaines rues du quartier de la Pointe-Hastie – qui sont absolument impraticables aussitôt qu’il y a une forte pluie.
Sur certains points, entre autres, entre la gare des M. F. M. et le T. C. E. petite vitesse, le quartier est transformé en véritable lac.
Ne pourrait-on pas, étant donné la proximité de la mer, construire un petit égout qui assurerait l’écoulement des eaux ?
Le Tamatave


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23 août 2019

Il y a 100 ans : Le 14 juillet 1919


Comme nous l’avons déjà dit, cette année-ci le 14 juillet revêtira un éclat particulier comme jamais 14 juillet n’en revêtit. Cette fois-ci, c’est vraiment la fête de toute la France, de tout le peuple français ; ce n’est plus seulement la fête officielle prescrite par le gouvernement où l’on était presque obligé de se réjouir malgré soi, et que beaucoup de gens, soit pour cause d’opinion, soit par aversion du bruit ou indifférence, s’abstenaient de célébrer. Il n’est personne en ce moment-ci qui ne doive s’y intéresser et qui n’ait lieu de se réjouir. Le temps a déjà tempéré en grande partie les douleurs causées par les deuils de la guerre, les pays envahis ont vu beaucoup de leurs ruines relevées, les prisonniers ont revu leur patrie, leurs foyers, les soldats de la grande guerre ont vu leur tâche héroïque terminée, leurs souffrances finies et ont repris ou reprendront le cours de leur vie antérieure, enfin tout Français a appris la paix. Toutes ces joies réunies doivent se manifester par une grande fête, et vu sa proximité de la signature de la paix, le 14 juillet 1919 est le moment qui se prête le mieux à la manifestation de ces joies.
En même temps que la prise de la Bastille et la fin d’un régime tyrannique – chose que le temps et les événements ont fait perdre de vue –, on célébrera donc en 1919 un événement d’une tout autre nature sans précédent dans l’histoire des peuples : l’héroïsme et la bravoure de nos soldats, le triomphe de la justice et du droit sur la barbarie et la force brutale.

Fête nationale américaine

Beaucoup d’animation dans nos rues à l’occasion de la fête nationale américaine, les habitants de Tamatave avaient tenu à manifester leur sympathie à la nation amie en pavoisant leurs demeures. Les bureaux étaient fermés et les écoles avaient congé.
La retraite aux flambeaux a été très suivie et très animée.

Avis

Le public est informé que l’Eugène Grosos relèvera de la Réunion pour Tamatave et Mananjary et aura pour le commerce un disponible de 2 500 mètres cubes à repartir entre les ports de Tamatave, Mananjary et Diégo.
Le Tamatave



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22 août 2019

Une révolution manquée à Madagascar, par Aurélie Champagne

Après avoir tracé une longue diagonale du sud-ouest au nord-est de Madagascar, je m’étais posé quelques jours, au début du mois d’août, dans une ville côtière plus célèbre pour la vanille qui s’y produit que pour sa participation aux événements de 1947. La vision quotidienne, près du port, d’une stèle en hommage aux martyrs de cette révolte, me renvoyait sans cesse au premier roman d’Aurélie Champagne, Zébu Boy, ancré dans un moment d’Histoire dont les protagonistes n’ont pas gardé le même souvenir.
A Madagascar, le 29 mars, date en 1947 des premiers affrontements contre les colons et, dans la foulée, du début d’une sévère répression, est aujourd’hui encore un jour férié pendant lequel la vente d’alcool, comme lors des élections, est interdite et l’occasion de cérémonies commémoratives dont le centre est plus souvent à Moramanga, dans l’est, qu’à Antananarivo, la capitale où l’on ne manque cependant jamais de se souvenir.
En France, rien ne signale dans le calendrier ce qui semble avoir été un lointain soubresaut de l’épopée coloniale au moment où le prestige de celle-ci vacillait. Jacques Chirac, lors d’une visite officielle à Madagascar en 2005, avait néanmoins évoqué cette page sombre dans les relations entre les deux pays et dénoncé, sans s’attarder sur les détails, « caractère inacceptable des répressions engendrées par les dérives du système colonial ». L’acte de contrition avait été fait, cependant, en d’étranges circonstances. Le lieu, d’abord, s’y prêtait mal, d’une part parce que Mahajanga, sur la côte ouest, se situe bien loin des régions où les combats avaient eu lieu, d’autre part parce que cette même ville avait été, en 1895, le théâtre du débarquement des troupes françaises qui entamaient la « conquête » de l’île. Ensuite, le président malgache Marc Ravalomanana avait évacué la question en rappelant qu’il n’était pas né en 1947…
Des historiens malgaches et français ont néanmoins, et très rapidement après les événements, abordé le sujet – qui reste d’ailleurs polémique. Si des écrivains malgaches, au premier rang desquels Raharimanana, en faisaient un des moments fondateurs de leur imaginaire, la littérature française y a peu puisé. En 1995, Patrick Cauvin avait publié Villa Vanille, un roman pétri de bonnes intentions mais qui passait à côté du sujet. Plus récemment, en 2012, Pierre d’Ovidio avait envoyé, pour la deuxième enquête d’une série de « grand détective », l’inspecteur Maurice Clavault à Madagascar au moment où éclataient les troubles de 1947. Ce n’était guère plus convaincant.
Aurélie Champagne, dans son premier roman, choisit un Malgache comme personnage central. Ambila a été rapatrié après avoir combattu dans la Meuse et avoir été capturé par les Allemands. Depuis six mois qu’il est rentré, il ne supporte plus d’être redevenu « le pauvre indigène qu’il était avant guerre ». Il n’est même plus vraiment le Zébu Boy dont la réputation s’était construite sur son habileté à renverser les bœufs lors des savika, les combats traditionnels. Il est prêt à sauter sur la première occasion d’occuper la place qu’il mérite dans la société. Et, précisément, sa route l’entraîne vers Moramanga au moment où éclate la rébellion.
La biographie fournie par votre éditeur signale un séjour de six mois à Madagascar en 1998. Etait-ce la toute première fois ? Et y partiez-vous dans un but précis ?
A 20 ans, après deux intenses années de classe préparatoire, j’ai eu envie de prendre le large et de sortir de mes livres. J’ai économisé et me suis offert un aller-retour à Madagascar. A l’époque, il n’y avait pour moi aucune autre terre à fouler. Je porte un double nom : Champagne-Razafindrakoto et je n’avais jusque-là aucune image, ni aucun vécu à mettre derrière ce nom malgache, hormis de vagues histoires d’orphelinat, de Reine et de privation. La mythologie familiale, chez moi, racontait en outre que ce nom de « Razafindrakoto » signifiait « Fils de Prince » et laissait entendre que nous avions peut-être des ascendants royaux. Autant dire que la première personne à Madagascar à qui j’ai raconté cette histoire a éclaté de rire. D’une certaine manière, ma quête des origines s’est arrêtée net ce jour-là, en apprenant que le nom que je portais équivalait plutôt à « Dupont » ou « Durand ». Ca a laissé de la place pour le reste, et alors c’est le pays, dans toute sa splendeur qui m’a saisie.
A quel moment avez-vous commencé à vous intéresser à l’insurrection de 1947 ? L’idée d’un roman dans ce contexte a-t-elle germé rapidement ? Ces événements avaient-ils une raison particulière de vous toucher ?
Je gardais un souvenir refroidi de l’insurrection de 1947. A peine une ligne dans un manuel d’histoire de classe de terminale. Or, à Madagascar, j’ai eu la chance de faire un petit bout de chemin avec un universitaire qui m’a raconté les Tabataba. Nous étions en 1998, au lendemain du cinquantenaire. J’ai découvert à quel point cette mémoire était vivante. A quel point elle battait encore au sein de certaines familles.
Le livre repose sur des documents écrits, et vous fournissez d’ailleurs un  embryon de bibliographie. Avez-vous utilisé aussi des témoignages oraux ?
Zébu Boy s’appuie sur un travail de documentation mais il est avant tout un roman avec un héros fictionnel. Ce n’est pas un livre d’histoire. Seulement, pour raconter la destinée romanesque d’un ancien des combats de France, rentré au pays et presque aussitôt happé par les événements, j’avais besoin de documenter le contexte historique. J’ai donc lu au fil des années toutes sortes de documents, sans vraiment me préoccuper de méthodologie. Je lisais tout ce que je trouvais : thèse, actes de colloques, témoignages, notes issues des Archives nationales d’Outre-mer à Aix, et autres sources primaires, documentaires, fictions, journaux de missionnaires ou de colons issus de l’administration… Le plus souvent, une lecture soulevait plusieurs questions, pour lesquelles j’allais chercher des réponses dans d’autres lectures. D’autres avant moi ont eu à cœur de collecter des témoignages oraux et l’ont fait merveilleusement : de l’auteur Jean-Luc Raharimanana à la documentariste Marie-Clémence Paes avec son récent Fahavalo, en passant évidemment par les historiens Faranirina Rajaonah ou Jean Fremigacci, pour ne citer qu’eux. Ces deux derniers m’ont d’ailleurs fait l’amitié de relire le roman, et de formuler des observations qui, recoupées avec celles de Françoise Raison, Martin Mourre et Jean-Noël Gueunier, ont été très précieuses pour le texte.
Si l’on comprend bien, Zébu Boy est la troisième version de ce livre. N’avez-vous pas eu envie de passer à autre chose ou bien le thème vous habitait-il au point qu’il était nécessaire de mener ce projet à son terme, c’est-à-dire jusqu’à la publication ?
Disons qu’il m’a fallu écrire plusieurs histoires pour trouver celle que j’avais réellement envie de raconter. L’intrigue s’est d’abord formulée le temps d’une nouvelle, inspirée d’une anecdote trouvée dans la thèse de Jacques Tronchon. Puis la narration s’est déployée sur quatre générations, de l’immédiat après-guerre au tournant des années 2000. Avant de se recentrer à nouveau sur 1947. Au fil des allers et retours, je me suis découragée plusieurs fois et j’ai eu effectivement envie de passer à autre chose. C’est même ce que j’ai fait : mon activité de scénariste notamment m’a donné à plusieurs reprises l’occasion d’aller me dégourdir les méninges dans d’autres univers. Mais je suis toujours revenue à 1947.
Votre personnage principal s’appelle Razafindrakoto. On suppose que ce n’est pas par hasard…
Effectivement. Razafindrakoto est en effet un clin d’œil à ma grand-mère malgache. Mais il suffit de consulter des archives du ministère de l’armée et sa base « mémoire des hommes » par exemple, pour croiser des dizaines de Razafindrakoto morts au combat ou des suites de maladie, pendant la seconde guerre mondiale.
Au fond, il n’est pas très sympathique. Pilleur de cadavres, avec toujours en tête un mauvais coup à jouer à son compagnon d’aventures, c’est un opportuniste embarqué dans l’action un peu par hasard. Ou bien on se trompe ?
Zébu Boy est un combattant hors pair, que la vie  a exposé à toutes sortes d’épreuves. Il les a toutes surmontées. Quand l’histoire commence, le héros continue à faire ce qu’il sait faire : survivre. Il épouse effectivement l’insurrection par opportunisme, plus que par idéologie et, chemin faisant, découvre ou croit découvrir sa véritable vocation.
Une anecdote en dit long sur les raisons (multiples) que peuvent avoir les Malgaches, en rentrant de la Seconde Guerre mondiale, d’en vouloir à leurs colonisateurs : ceux-ci reprennent leurs chaussures au retour. Elle est authentique ?
L’anecdote est authentique, oui. En juillet 1946, l’armée française a démobilisé 6000 Malgaches et Réunionnais. La guerre était finie depuis plus d’un an. Ces soldats comptaient parmi les derniers à rentrer. Beaucoup étaient restés dans des camps de transition, où les conditions de vie étaient déplorables, attendant pendant des mois un bateau pour les transporter. Quand ils sont enfin arrivés à Toamasina en août 1946, l’intendance militaire leur a retiré leurs chaussures pour reconstituer les réserves. Ce geste a été vécu comme une véritable humiliation.
Aviez-vous une intention particulière en parlant de cette époque, et de cette manière ?
Je crois qu’on parle souvent des révolutions avec un grand R : elles deviennent presque des abstractions, des concepts. Ce qui m’a d’abord fasciné a été la mécanique historique des événements de 1947. Mais au fil des années, le vécu des anciens combattants de métropole s’est éclairé. De même, la découverte de leur parcours au sein des frontstalags et leur retour dans l’île a contribué à ramener l’insurrection au sol. J’ai eu envie d’essayer de raconter les événements à hauteur d’homme, dans leur incarnation la plus prosaïque.

19 août 2019

Il y a 100 ans : Les tirailleurs malgaches


Les tirailleurs malgaches furent une des révélations de la guerre. Ils ont brillamment conquis leur place dans l’armée française et étonné ceux qui les ont commandés, par leur endurance et leur bravoure. On a pu dire d’eux qu’ils étaient dignes de la division marocaine et qu’ils égalaient les tirailleurs de l’Afrique du Nord et de l’Afrique occidentale.
Voici d’ailleurs une page de leur histoire héroïque : la prise du plateau de Laffaux, défendu par les meilleures troupes allemandes.
Le 14 septembre au matin, le bataillon s’ébranle et se porte à l’assaut des puissantes positions de Laffaux.
Les Malgaches encerclent cet ouvrage défensif de premier ordre, qui finit par tomber après une résistance acharnée des défenseurs. Le bataillon reprend aussitôt sa marche en avant, nettoyant tranchées et abris. Allemant est bientôt conquis et dépassé.
Au cours de cette opération, deux cents prisonniers et un énorme matériel restaient aux mains des Malgaches.
Mais la victoire n’était pas acquise sans de lourdes pertes : 397 Malgaches étaient tués, blessés ou disparus. Un pareil courage permet à la France d’être orgueilleuse de ses enfants d’adoption.
Elle saura se souvenir du sang qu’ils ont versé pour elle.

Le café dans la grande île

La loi du 5 août 1913, qui exonère des droits d’entrée les cafés des colonies françaises, a grandement favorisé le développement de la culture du caféier à Madagascar.
Jusqu’à ces dernières années, la culture était localisée dans la vallée de Mananjary. La production annuelle ne dépassait pas 200 tonnes. À l’heure présente, les plantations s’étendent un peu partout.
Des tentatives de mise en culture des vastes marais de la côte orientale se poursuivent actuellement. Ces marais paraissent se prêter admirablement à la culture du caféier de Liberia. On peut escompter pour un avenir proche que l’exploitation annuelle des cafés de la grande île dépassera 1 000 tonnes.
Les recherches portent maintenant sur les méthodes de préparation des graines, et l’on voudrait obtenir un produit analogue à celui des planteurs de Java dont les cafés sont très recherchés par le commerce.
Le Courrier colonial



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17 août 2019

Il y a 100 ans : La grippe à Madagascar


Les journaux de la Grande Île nous apprennent qu’une épidémie de grippe particulièrement grave sévit à Madagascar et à la Réunion.
Au commencement de mai plus de 6 000 décès étaient constatés à la Réunion.
Des mesures énergiques pour combattre le fléau ont été immédiatement prises dans les villes contaminées. Les réunions dans les salles de cinéma et les édifices religieux ainsi que les audiences publiques des tribunaux ont été supprimées. La fermeture des cercles, des cafés, des écoles a été décidée. Des postes pour les soins prophylactiques à donner aux indigènes ont été créés.
La population a été engagée à porter un masque ou une voilette de gaze dans la rue. Des modèles de masques ont été mis à la disposition du public dans les mairies et les commissariats de police.
En outre, les personnes désirant sortir des territoires contaminés doivent être munies d’un passeport sanitaire délivré par un médecin. Les déplacements ne sont autorisés qu’en cas de nécessité reconnue.
Des rations de vivres ont été distribuées aux indigents.
Malheureusement, par suite de la pénurie des transports et surtout de l’engorgement du port de Marseille, les médicaments manquent et dans beaucoup de centres on en est réduit, pour combattre le fléau, à des moyens de fortune qui demeurent inefficaces.
La lutte est rendue encore plus difficile par les déplorables conditions hygiéniques dans lesquelles vivent les indigènes. Une visite minutieuse de la ville de Majunga, par exemple, a amené la commission d’hygiène à faire des découvertes extraordinaires de malpropreté. Elle a dû prescrire la démolition de plusieurs immeubles malsains.
Et à ce propos nombre de fonctionnaires assurent que tous les bâtiments de l’Administration peuvent rentrer dans la catégorie des immeubles à démolir pour cause d’insalubrité.

Çà et là

Le lieutenant d’infanterie coloniale Marcel Brunaud, fils de l’ancien président de la cour d’appel de Madagascar, a succombé à une attaque de grippe, à Diégo-Suarez, à l’âge de vingt-neuf ans.
Le Courrier colonial


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16 août 2019

Il y a 100 ans : À aucun prix (2)


(Suite et fin.)
Il attiserait des haines jusqu’alors inconnues, détournerait beaucoup de gens de leur travail et créerait ces parasites qui ne vivent que de la politique. On se plaint du favoritisme, mais que dirait-on de celui qui régnerait s’il y avait des élections. C’est alors qu’on verrait les abus de pouvoir, les injustices criantes, les affaires scandaleuses.
Nous ne nous aviserons pas de plaider la cause des colonies à députés, en préconisant la suppression de la représentation coloniale. C’est leur affaire. Il nous suffira de constater l’état dans lequel la politique a mis la Réunion, autrefois si florissante, et l’exode en masse des Bourbonnais vers des terres plus hospitalières, délaissant un pays où, de leur propre aveu, « il n’y a plus rien à faire. » C’est là un fait que l’on est forcé de reconnaître et qui prouve mieux que tout argument les funestes effets de la politique aux colonies. Jamais, au grand jamais, les avantages de la représentation coloniale ne compenseront la centième partie des inconvénients qui en résulteront.
En effet, en supposant qu’ils défendent nos intérêts auprès des pouvoirs publics et même qu’ils aient gain de cause, la colonie ne prospérera pas pour cela, si on en juge d’après ce qui se passe chez nos voisins.
Non, pas de députés, nous avons assez d’embarras, assez de choses qui nous préoccupent sans nous infliger ce fléau que nous avons autant lieu de redouter que la grippe, car il affamerait le pays et ferait des victimes.
Nous ne nions pas néanmoins l’utilité incontestable d’avoir, auprès du gouvernement métropolitain, un représentant autorisé – désigné par un congrès des chambres de commerce et d’agriculture réunies. Mais il serait indispensable pour cela que les membres de ces deux corps soient élus par les commerçants, industriels ou agriculteurs et non nommés par le gouvernement local.
Nous n’aurions pas repris ce sujet que nous avons déjà traité d’une façon différente, si nous n’avions craint que l’article du Courrier colonial, bien que suivi d’une réfutation, fût de nature à inspirer à nos gouvernants l’idée de nous donner des parlementaires, chose que tout habitant de la colonie redoute au plus haut point.
Le Tamatave



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15 août 2019

Il y a 100 ans : À aucun prix (1)


Le Courrier colonial proposait dans son N° du 27 avril dernier d’étendre la représentation coloniale aux colonies qui n’ont pas de députés. On avait suffisamment rabâché cette question avant la guerre mais cette fois-ci elle se présente sous un nouvel aspect ; de nouveaux arguments sont invoqués en sa faveur. Sans faire aucune allusion aux personnalités de ceux qui ont signé les articles ni des directeurs de journaux, on devine tout de suite le mobile qui pousse certains à plaider chaudement la cause de la représentation coloniale : ils voudraient se caser ou se faire caser par leurs amis, et comme les postes des colonies à députés sont tous occupés, ils tiendraient à ce qu’il s’en créât de nouveaux. Aussi les voyons-nous prendre en pitié les colonies dépourvues de représentants. Par le seul fait, disent-ils, de s’être établi dans telle ou telle colonie, un Français perd ses droits de citoyen ; il ne peut plus faire de revendication auprès du gouvernement ; les habitants de tels territoires sont donc traités en parias. Puis ils mettent en avant le régime d’exception dont sont victimes ces colonies au point de vue financier. Si elles avaient des députés, elles ne verraient pas certains de leurs produits frappés de droits prohibitifs, elles ne se trouveraient pas de temps en temps soumises à des régimes incohérents tels que le fameux décret foncier qui a tant fait couler d’encre et plus récemment le dernier arrêté minier, autre chef-d’œuvre d’incohérence. Les denrées s’écouleraient mieux puisque qu’il y aurait en France quelqu’un pour les protéger : ce serait la richesse, la prospérité.
On a assez souvent objecté que l’exemple de nos malheureux voisins de la Réunion n’était guère de nature à nous enthousiasmer en faveur d’un pareil régime.
Il n’est pas besoin d’être bien clairvoyant pour s’apercevoir combien le système électoral serait funeste dans un pays neuf comme Madagascar. Nous n’aurions peut-être pas des bagarres ni des coups de revolver dans le genre de ceux de la Réunion, mais nous estimons qu’il y a assez de sujets de brouille entre les colons, entre commerçants comme entre fonctionnaires pour venir y ajouter celui-là, qui ne provoquerait pas seulement la brouille mais le chaos et la ruine.
(À suivre.)
Le Tamatave



Deux volumes de compilation de la presse à propos de Madagascar il y a 100 ans sont disponibles. La matière y est copieuse et variée, vous en lisez régulièrement des extraits ici. Chaque tome (l'équivalent d'un livre papier de 800 pages et plus) est en vente, au prix de 6,99 euros, dans les librairies proposant un rayon de livres numériques. D'autres ouvrages numériques, concernant Madagascar ou non, sont publiés par la Bibliothèque malgache - 82 titres parus à ce jour.

14 août 2019

Il y a 100 ans : Encore la grippe


On sait qu’après avoir ravagé l’hémisphère nord pendant qu’il y faisait froid, la grippe a visité l’hémisphère sud. C’est ce dernier qui a été le plus éprouvé. On connaît les scènes lamentables qui se sont passées à la Réunion pendant que la grippe y décimait sans pitié la population. Ceci n’est rien à côté de ce qui avait lieu en même temps à Rio de Janeiro situé à une latitude pourtant plus rapprochée de l’équateur que la Réunion. C’est cette ville qui détient le record comme mortalité. Il y est mort en 1 mois dans la ville seule 14 000 personnes soit 500 par jour. On jetait les cadavres dans la rue où ils pourrissaient. La ville s’était tout d’un coup transformée en un vaste hôpital où il n’y avait que des malades, des mourants et des morts. Un silence effrayant régnait même dans les grandes artères où il passait de temps en temps des tramways bondés de cadavres. Il n’y avait plus de pharmacies, d’épiceries ou de magasins. On ne parvenait même pas à creuser une fosse commune pour y entasser les morts faute de fossoyeurs.
C’est encore Madagascar un des pays qui ont le moins souffert de cette épidémie.
Ce sont bien les 3 fléaux réunis qui ont frappé le monde : la guerre, la peste et la famine.

Les colis postaux du « Kouang-Si »

Enfin, on se décide à nous apporter les colis postaux que nous avions commandés il y a 8 mois ou un an. Leur long séjour dans les magasins postaux leur a permis de subir, d’après leur nature, différentes transformations. Les matières grasses doivent être plutôt rances ; les parfums ont eu le temps de prendre l’odeur du goudron ; ceux qui ont demandé des graines en colis recevront peut-être des plantes dont les plus précoces porteront des fleurs ; une forte couche de moisissure doit recouvrir les objets insuffisamment emballés ; enfin on ne sera pas surpris si on trouve des champignons sur des matières facilement putrescibles.
Ces colis postaux étaient, disait-on tout d’abord, au nombre de 5 000 ; le soir, la renommée les portait à 50 000 ; ils avaient peut-être fait des petits : depuis le temps qu’ils sont en dépôt, ils en ont bien eu le temps.
Le Tamatave


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10 août 2019

Il y a 100 ans : Tamatave demande un juge Président


Dans notre numéro du samedi 24 mai dernier, nous avons reproduit les informations parues dans l’Action et la Tribune de Tananarive signalant la déplorable situation qui était faite aux justiciables de Tamatave.
À l’audience du lundi qui suivit cette information très anodine, bien que fondée, le Président intérimaire s’est cru obligé de développer, sans doute pour les plaideurs présents, une théorie, que nous saurions contredire, mais que nous n’aurions osé émettre sur le gâtisme de certain magistrat.
En bons justiciables que nous sommes, nous admettons donc comme vrai sans réserve, pas même d’appel, l’exposé fait par notre Président intérimaire en cours d’audience et nous demandons instamment à qui de droit, Monsieur le Procureur Général et au besoin Monsieur le Gouverneur Général, de nous donner, à défaut du Président titulaire en congé, un Président intérimaire apte à ces fonctions.
Pour se rendre compte du bien-fondé de notre réclamation, Monsieur le Procureur Général n’a qu’à lire les jugements rendus depuis deux mois par le Président intérimaire, il y verra qu’à part de rares exceptions, aucune de ces décisions n’est motivée, et qu’elles ordonnent presque toujours une mesure d’instruction, enquête ou expertise, même lorsqu’aucune des parties n’y conclut.
Cette façon d’agir est extrêmement préjudiciable à tous les plaideurs et à la bonne administration de la justice surtout en présence des termes de l’article 22 du décret du 9 juin 1896 qui n’autorise l’appel des jugements interlocutoires qu’avec le jugement définitif.
Ce sont des frais et des retards considérables imposés aux intéressés, sans raison, et uniquement parce qu’à Tamatave la fonction de Président du Tribunal est confiée à un magistrat très… disons fatigué, qui ne peut, paraît-il, fournir plus de dix minutes de travail consécutif.
Du reste nous avons pu nous rendre compte personnellement que le Président intérimaire est en son cabinet de 10 h 45 à 11 heures et de 16 h 45 à 17 heures.
Comme nous considérons que cette question est vitale pour Tamatave au moment où la reprise des affaires doit logiquement se produire, nous y reviendrons jusqu’à satisfaction, et publierons au besoin intégralement les décisions dont nous parlons en supprimant simplement les noms des intéressés.
Le Tamatave



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7 août 2019

Il y a 100 ans : Chemin de fer du lac Alaotra à Majunga

Le gouverneur général de Madagascar vient de charger une mission spéciale d’étudier le tracé d’une voie ferrée qui, continuant, à partir du lac Alaotra, la ligne de Moramanga à Ambatondrazaka, déjà exploitée en grande partie, rejoindrait le port de Majunga.
Dirigée par un administrateur en chef des colonies, cette mission comprend un ingénieur des travaux publics et un ingénieur agronome. Elle s’adjoindra en cours de route les administrateurs chargés du commandement des diverses circonscriptions traversées. Ainsi composée, elle pourra procéder non seulement à l’examen des questions d’ordre technique que comporte la construction d’un chemin de fer, mais également à la reconnaissance des ressources agricoles des régions à desservir. En même temps, elle s’assurera des disponibilités en main-d’œuvre des provinces parcourues.
La nouvelle ligne, destinée à relier la côte est à la côte ouest, à travers les terres particulièrement riches de la cuvette du lac Alaotra, et du bassin de la Betsiboka, constituera elle-même l’amorce d’un chemin de fer se dirigeant vers le nord de l’île.
L’exécution de ces grands travaux, qui ne pourront être entrepris que sur fonds d’emprunt, aura pour effet de grouper les agglomérations indigènes sur tout le parcours de la voie ferrée. La facilité des déplacements et des transports, la possibilité d’obtenir rapidement de la main-d’œuvre et d’écouler sans à-coups les récoltes permettront une mise en valeur complète de régions qui ne produisent actuellement qu’une faible partie de ce qu’elles pourraient donner.
La question mérite donc d’être suivie avec le plus vif intérêt.
La Petite République

Création d’une société philharmonique à Tamatave

Notre sympathique Administrateur-Maire a l’intention de créer une société philharmonique à Tamatave. Nombreux sont dans notre ville les jeunes gens qui pratiquent l’art musical et qui s’empresseraient avec joie d’en faire partie aussitôt qu’on demanderait des adhérents.
Le Tamatave



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