7 février 2018

Il y a 100 ans : Fiandravasana

Nos confrères de la Grande Île protestent énergiquement contre des coutumes déplorables, désastreuses dans leurs conséquences, et cependant respectées encore dans certaines parties de la province du Betsiléo : il s’agit du Fiandravasana qui se traduit surtout par des orgies dont l’alcool fait les principaux frais.
Lorsqu’un indigène meurt, on s’abstient d’abord de déclarer le décès dans les délais prévus par la loi, jusqu’à la venue de ses proches dont le domicile est parfois très éloigné ; en attendant leur arrivée, on organise la « veillée des morts » qui n’est pas ordinaire car on y convie tous les voisins et même les… autres, notamment des filles et des garçons de huit à quinze ans… puis on commence la veillée, c’est-à-dire que tous les soi-disant veilleurs se livrent à une débauche d’alcool que l’orgie suit bientôt.
Les historiens ont voué à l’exécration les noms de Louis XV et de Napoléon III pour le parc aux cerfs de Marly et le parc aux biches de Compiègne. Nos indigènes n’ont pas eu besoin de lire l’Histoire pour s’inspirer de ces illustres exemples ; quand l’orgie est à son comble, on voile la tête des filles qui gagnent la campagne et la chasse commence ; les garçons se lancent sur leurs traces et se saisissent de celle qui leur tombe sous la main. Cette « fête » dure trois jours.
Dans un village du Betsiléo, il y eut dernièrement cinq décès dans le mois, ce qui occasionna quinze jours d’orgie.
Notre confrère la Tribune de Madagascar fait observer avec raison que laisser vivre de semblables coutumes, c’est vouloir la destruction d’une race qui fut jadis vigoureuse.
Pour mettre un terme à ces déplorables mœurs, il ne suffira pas d’exiger la déclaration prompte du décès, mais il faudra interdire la coutume ; ce sera l’affaire des fonctionnaires indigènes, des médecins de colonisation qui sont, par leur origine même, plus à même de comprendre la mentalité du Betsiléo et de constater les regrettables effets de ces réunions.
Respecter les coutumes nationales d’un peuple est bien et parfois d’une bonne politique, mais il en est tout de même quelques-unes – et le Fiandravasana est de celles-là – dont les Malgaches eux-mêmes accepteront la suppression quand ils pourront apprécier les avantages qui en résulteront.

Le Courrier colonial

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