23 août 2018

«Les jours rouges», de Ben Arès

Communiqué de presse
de la Bibliothèque malgache

À Toliara et alentours, Malgaches, Karana et Vazaha se croisent, se mêlent et s’emmêlent pour le meilleur et pour le pire. On nage. Dans le cours imprévisible, les remous, la mêlée, parfois hors des flots. On vit en ville comme au village. Dans les gargotes, sur les routes de goudron éclaté et les pistes de sable. Comme chez soi en dur, en tôles ou en vondro. Reclus ou en ribote. On improvise. Aux détours d’un zébu, d’un fou, d’un trépassé ou d’un éloquent soudard. Dans le charivari infernal, le vif des traditions locales, les êtres marchent au charbon ou flottent, dévient malgré eux de foutaises en désespoirs, de malentendus en traquenards ou états de grâce. On se chamaille. On palabre pour un bien commun, un canard qu’on déplume ou un sort venu de nulle part. On s’étripe pour le sel et la terre, on rouscaille, chante la guigne ou la poisse, on s’esclaffe, se dégage, rit de l’homme, la femme qui n’a pas fini d’en voir. Et si au final les genres, les classes, les origines se confondaient pour laisser planer tous les doutes ? Et si, pétris et navigués, dénudés, au lieu de fuir, nous acceptions que tous étions du même cru, de la même trempe, sans distinction ? Qu’il en déplaise à Dieu, aux illustres Aînés, aux arrogants et férus du langage sinistré, il nous est offert de boire la vie jusqu’à la lie, la lune nouvelle et l’art de résonner du tsapiky au soleil de l’amour noir.
B. A.

Mise en vente le 23 août 2018
Édition exclusivement numérique, 3,99 € (12.000 ariary à Madagascar)
ISBN : 978-2-37363-074-9


Les premières lignes

Nous l’attendions, elle si rare, si précieuse dans notre sud aride, déshérité par les eaux divines et les coins de verdure. Depuis des lunes et des lunes, pas une goutte n’était tombée des cieux ! Les prières des plus grands sorciers, de nos plus illustres ombiasy n’étaient, semble-t-il, point entendues.
Le soleil, chaque jour, nous assommait, conduisait nos corps de commerçants des rues – gargotiers, vendeurs de soupes, d’ailes ou de cuisses grillées, tireurs de posy posy, conducteurs de charrettes à bras ou à zébus, réparateurs de bicyclettes ou de chaussures, porteurs, légumières, bouchers de saucisse, de porc ou de bœuf et poissonnières étalant des crabes, poulpes, crevettes, calmars, mérous, cabots, thons, marguerites et capitaines parmi les colonies de mouches tournoyant autour des jus, du sang, de la saumure et des sueurs, charbonniers parmi les sacs, le charbon étendu pour être débité, trié à proximité du tas d’ordures, dépotoir fumant du quartier, vendeuses de mangues, citrons, sambos ou ces beignets triangulaires fourrés d’oignon, de pomme de terre et de viande hachée, soky ou pâtés d’oursin, démerdeurs, ivrognes, filles traînant ci et là à l’affût de quelque picaille – à l’état d’inertie.

L’auteur


Ben Arès est né le 28 mars 1970 à Liège en Belgique. Dans les années 2000, il attacha beaucoup d’importance à la place du poète dans sa ville et fut l’animateur de revues littéraires et de lectures publiques en divers viviers de la cité avec David Besschops et Antoine Wauters. Fin 2009, sous l’impulsion d’une motivation singulière et intime, il quitta la Belgique pour aller vivre à Toliara au sud-ouest de Madagascar où une vie au corps à corps l’attendait. Il partage désormais son temps entre l’enseignement de l’Histoire-Géographie et des Arts plastiques au Collège Français, sa vie de famille dense, pleine de surprises, et l’écriture. Il est soucieux de plus en plus de dépeindre les tableaux de la vie courante et les sentiments des êtres appelés à s’en sortir par-delà le Bien et le Mal.


Ses livres

Aux secrets des lèvres, poésie, Tétras-lyre, Liège, 2006
Eau là eau va, poésie, éditions (o), Bordeaux, 2007
Entre deux eaux avec C. Decuyper, poésie, Le Coudrier, Bruxelles, 2007
Rien à perdre, poésie, La Différence, Paris, 2007
Ne pas digérer, roman, La Différence, Paris, 2008
Là où abonde le sel, récit, Boumboumtralala, Liège, 2009
La déferlante, poésie, Maelström, Bruxelles, 2009
Cœur à rebours, poésie, La Différence, Paris, 2009
Sans fil, poèmes, L’Arbre à paroles/Bibliothèque malgache, Amay/Antananarivo, 2009
Ali si on veut, récit, avec Antoine Wauters, Cheyne éditeur, 2010
Naître, adieu, une fuite, compte d’auteur, Tana, 2010
Aux Dianes, long poème, Tétras-lyre, Bruxelles, 2012
Mon nom est Printemps, un triptyque, L’Arbre à paroles, Amay, 2013
Tromba, une transe, Maelström, Bruxelles, 2013
Je brûle encore, nouvelles, Dodo vole, Caen, 2017

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire