10 mars 2010

Cinq ou six ouvrages de Rabearivelo dans la Bibliothèque malgache

En réalité, c'est même six puisque la première réédition électronique de Jean-Joseph Rabearivelo groupait Presque-Songes et Traduit de la nuit. Il y a eu ensuite un essai, Quelques poètes I. Enfants d'Orphée; un opéra, Imaitsoanala, Fille d'oiseau; un autre recueil de poèmes, Volumes. Et voici maintenant, cinquième livre électronique (gratuit, comme les autres) et sixième titre, Vieilles chansons des pays d'Imerina.
Il s'agit, si mes informations bibliographiques sont exactes, du premier ouvrage posthume, sorti en 1939, deux ans après la mort de l'écrivain.
Robert Boudry, qui en a préfacé l'édition originale, le décrit comme «un recueil de courts poèmes en prose, conçus le plus souvent sous forme de petits discours ou de dialogues, suivant une esthétique semblable. On y trouve d'anciens hain-teny devenus classiques que l'auteur se borne à transcrire dans notre langue, d'autres modernes, parmi lesquels il est malaisé de distinguer ceux qui sont originaux de ceux qui sont empruntés, d'autres enfin qui sont des paraphrases ou des adaptations.»
Le préfacier ajoute: «Ces Vieilles chansons, puisées aux sources mêmes de la tradition des Hauts-Plateaux, évoquent et fixent ce qui constitue l'essentiel de la poésie de l'Imerina, le précieux et le familier, le mythique et le réaliste.»
La préface n'est pas libre de droits et n'apparaît donc pas dans notre réédition. Vous trouverez ce cinquante-sixième ouvrage de la collection sur le site de la Bibliothèque malgache, rubrique Bibliothèque malgache électronique - vous connaissez la chanson...

9 mars 2010

Les Quimos de Madagascar à la fin du 18e siècle

Dans les dernières décennies du 18e siècle, le mythe - ou la réalité - des Quimos de Madagascar porte la signature d'une époque où l'anthropologie ressemblait peu à celle qui est pratiquée aujourd'hui.
Un article très documenté de Jean-Michel Racault fait le point sur le sujet dans La revue des ressources, renvoyant à quantité de textes contemporains du mythe. Il ouvre donc des pistes multiples, au-delà de l'objet de sa recherche. Qui le "conduit à s’interroger sur le statut bien incertain de ce qu’on appelle une vérité scientifique, et peut-être à conclure qu’il est plus difficile de cerner la vérité elle-même que les « effets de vérité » qui en créent l’illusion."
Une lecture indispensable.

6 mars 2010

Dialogue entre Jean-Marc Cransfeld, photographe, et Ben Arès, écrivain

Je ne vous oublie pas. Ceux qui suivent mon autre blog, Le journal d'un lecteur, auront peut-être constaté que j'étais très occupé, ces derniers jours, et que j'avais pour une fois la tête à la Foire du Livre de Bruxelles plutôt qu'à Madagascar.
Mais il m'était impossible, vous comprendrez pourquoi un peu plus loin, de manquer l'exposition de Jean-Marc Cransfeld et Ben Arès qui se tient au CCAC du mardi 9 au samedi 27 mars. Ce Dialogue entre un photographe et un écrivain se tient dans un véritable salon, aménagé par l’Antiquaire de Tana pour la lecture de poésie, et ouvert à tous les visiteurs de l’exposition.
Des ouvrages de poésie de la Médiathèque du Centre Culturel Albert Camus seront mis en valeur et disponibles pour la lecture sur place.
Ben Arès interviendra aussi deux fois en public:
  • Le vendredi 19 mars à 19 heures, pour un récital poétique dans le cadre du Printemps des poètes.
  • Le lendemain, samedi 20 mars à 10h30, pour une rencontre où il évoquera son parcours personnel et son œuvre en compagnie d'Andry Solofo Andriamiariseta, universitaire et poète.
Pour vous mettre en appétit, voici une photographie de Jean-Marc suivie d'un texte de Ben qui présente l'exposition à sa manière.

Les photographies que Jean-Marc Cransfeld donne à voir aujourd’hui s’inscrivent dans un laps de plusieurs années, ont été prises au cours de plusieurs séjours passés à Madagascar, en divers lieux de ce pays qu’il a parcouru de long en large. C’est en quelque sorte une rétrospective sur un parcours dans le temps et l’espace de l’île rouge. Le regard qu’il pose est éloigné des clichés touristiques, de tout a priori de nouveau venu. Les images sont parlantes voire frappantes. L’amour en est le fil conducteur. De la photographie et de ses sujets. Au bout de ces années l’amour toujours et je n’en dirai pas plus.
J’en suis à mon troisième séjour depuis 2008, année où j’étais lauréat d’une bourse d’écriture en Belgique. J’étais venu une première fois en 2000, à Tana, une petite quinzaine de jours. J’ai été appelé par Madagascar après le décès de mon fils natif d’Antsirabe en 2005. Après ce premier retour au pays natal, sur les lieux épars de la vie et de la mort, j’ai découvert qu’autre chose me retenait. Que "d’autres voix" me parlaient et m’invitaient à revenir. Je ne me l’explique pas tant l’attache avec cette terre, les gens de cette terre est forte, incontrôlable. Je consacre actuellement une partie de mon temps à un roman intitulé Tromba. Quelques-uns des manuscrits de ce roman en chantier vous sont présentés ici.
Jean-Marc et moi nous sommes rencontrés grâce à Madagascar et Pierre Maury en 2008. Nous sommes nés en Belgique, dans la région liégeoise. Grâce à l’Île et l’un de ses incontournables, nous sommes devenus amis.
Je n’ai pas choisi d’illustrer les images. Cela eût été artificiel et puis quel intérêt! Les photographies de Jean-Marc se passent de mots. Le dialogue est plus fort dans les échos, les résonances, les accords, décalages et concordances. De façon trouble et discrète. Plain chant aux images d’une trajectoire. En regard quelques manuscrits liés à une autre trajectoire. Pour un dialogue des matières visuelles, textuelles. Pour un dialogue né de divers tissages. Nous avons simplement choisi quelques thématiques, avons décidé d’aller chercher dans nos matières respectives pour les relier, les confronter en exploitant l’espace de la galerie du CCAC.
Ainsi, dans l’enfilade de photographies sur le quotidien et les petits métiers, un texte dont les narrateurs sont les gens des petits métiers et sans métiers, à Toliara, ville où je réside. En relation avec la série des neuf portraits, un texte sur la question identitaire à Madagascar, sur les origines, la filiation. Un autre qui vient s’inscrire dans la série des filles de nuit. Un quatrième sur le tsapiky vécu de l’intérieur au cours d’un bal poussière, en fin d’une série de photographies, qui dialogue, tant par le sujet que par le format, avec la première image. Pour clore l’exposition, un cinquième texte dont le narrateur est un Malgache qui parle d’un takamaso, d’une tradition, qui avait bien sa place dans le petit ensemble «Religions et croyances».
Le dialogue est là. Dans la matière, les sujets traités, en exploitant l’espace. Dans les matières plastiques aussi. Sans renier la crasse, la poussière, le rhum, le sang, l’obscur qui est la vie même. Sans craindre l’illisibilité parfois, accidentelle. C’est une invitation à la nuit de la substance, à ressentir.
Lire, donner à lire, et me soucier des yeux du lecteur était l’affaire d’un autre jour, d’un autre lieu: le livre.
Ben Arès

28 février 2010

Le cabinet singulier du Professeur Rakotolémurherherr

C'est une exposition singulière, en effet, qui se tient dans le hall de la gare d'Antananarivo. Le montage n'était pas totalement achevé quand je l'ai visitée hier matin (le vernissage avait lieu le soir). Myriam Merch, alias Sexy Expédition Yéyé, qui a réalisé l'exposition avec Anne Deguerry et Frédéric Viala, a quand même pris le temps de m'expliquer de quoi il retournait.
Visite guidée, donc, à voir tout de suite en vidéo, et sur place jusqu'au 13 mars.



24 février 2010

Un lémurien héros de bande dessinée

Je lis peu de bande dessinée. Cela n'a pas toujours été le cas. Mais le temps me manque et je suis donc moins attentif à ce pan de la production éditoriale. (Ne me dites pas que c'est une erreur, je sais.) Heureusement, ce blog a quelques lecteurs attentifs qui jouent, lorsque le besoin s'en fait sentir, un rôle de rabatteurs. C'est donc alerté par des commentaires que je suis allé voir un article de Mediapart intitulé: Maki, un lémurien en colo.

J'ai du même coup découvert l'existence de Fabrice Tarrin, dont je sais peu de choses sinon qu'il est un des nombreux dessinateurs à avoir travaillé sur les aventures de Spirou et Fantasio.
Un pan de sa production nous intéresse tout particulièrement puisqu'il a sorti en 2008 l'album dont je vous montre la couverture, Journal intime d'un lémurien.
Pour ce que j'en sais, après la lecture de quelques articles à propos de cet album, et si j'ai bien compris, le lémurien occupe ici une place aussi éloignée de Madagascar que la Grande Île est éloignée d'elle-même dans les films Madagascar. Vous me suivez? Je veux dire que Fabrice Tarrin n'a probablement pas choisi cet animal par amour de Madagascar mais parce qu'il lui trouvait une bonne bouille et que, pour se représenter lui-même, il valait mieux une bestiole sympathique. (J'interprète un peu.) Toujours est-il que le lémurien est devenu emblématique d'une œuvre qui se poursuit notamment sur son blog où les dernières notes (dessinées, comme il se doit) terminent une histoire intitulée Charlotte Gainsbourg mon amour, et où l'on retrouve, vous l'aviez deviné, un lémurien...

Fin janvier, Fabrice Tarrin a sorti un nouvel album, Maki: un lémurien en colo. Comme je n'ai jamais vu de lémurien en colo, même à Madagascar - et, forcément, encore moins ailleurs -, je suppose que l'auteur, toujours sous l'apparence d'un lémurien, revient sur des expériences personnelles. Où, une fois encore, notre île-continent ne semble pas être évoquée. (Je me base sur le résumé et les extraits de planches fournis par l'article de Mediapart évoqué plus haut.)
Bonne nouvelle, pour ceux qui aimeront ça ou qui collectionnent compulsivement toutes les représentations de lémuriens: il devrait y en avoir d'autres, puisque l'éditeur annonce l'album comme le numéro 1 d'une série.
A suivre, donc...

13 février 2010

Deux nouveautés en librairie: un polar et un beau livre

Je continue à scruter avec attention non seulement les numérisations d'ouvrages anciens accessibles gratuitement sur Internet, mais aussi les nouveautés qui arrivent dans les librairies françaises. La plupart du temps - c'est le cas cette semaine -, je n'ai pas lu ces ouvrages et je ne peux donc vous fournir que les informations de l'éditeur. Voici donc un roman policier et un beau livre.

François Ferbos. Grand théâtre

Fraîchement nommé chef de la section financière au SRPJ de Bordeaux, le commissaire de police Vincent Laffargue renoue avec sa ville natale.
Malgré les mises en garde de son supérieur hiérarchique, il n’hésite pas à ouvrir un dossier brûlant qui compromet un notable de la cité. Le personnage se révèle encore plus sulfureux que Vincent ne pouvait l’imaginer et sous un vernis respectable, tous les coups sont permis...
L’aventureux commissaire mène son enquête qui le conduit, contre vents et marées, des rives de la Garonne jusque dans l’océan Indien, à Madagascar et La Réunion. Dans la même veine que Traque en haute mer (Éditions Le Télégramme) ce polar nautique associe avec aisance suspense et art de la navigation.

François Ferbos a fait carrière dans la Police. De Strasbourg à la Nouvelle-Calédonie, en passant par la Bretagne, il s'est frotté de près au trafic de stupéfiants puis au terrorisme, avant d'assurer dix années durant la direction de la brigade financière de Bordeaux. Il consacrait ses moments de liberté à la croisière et à la voile, aujourd'hui il vit à plein temps sur son bateau et Traque en haute mer était son premier roman.

Philippe Aimar. Rêve de Madagascar

Dans un manuscrit laissé sous une stèle de Fort-Dauphin en 1653, Etienne de Flacourt met en garde les étrangers contre les autochtones de Madagascar en écrivant: "Prends garde, étranger. Ne fais pas confiance aux habitants de cette île, leurs flatteries réservent les plus grands dangers". Le voyage que nous offre Philippe Aimar à travers la Grande Île dément fondamentalement cette mise en garde. Les photos nous montrent la confiance qui s'établit entre les modèles et le photographe et l'attachement que ce dernier porte à la Grande Île et à ses habitants. Les résultats constatés se rapprochent de ceux obtenus par Jean Paulhan qui avait pris la peine, il y a près de 90 ans, de partager le quotidien des Malgaches, de différentes conditions, afin de saisir le sens profond des Hainteny.
Ici le photographe a adopté la même démarche et nous présente une nature attachante et un peuple des plus accueillants avec beaucoup de réalisme. Fernand Léger n'a-t-il pas défini la qualité d'une oeuvre picturale en raison directe de sa quantité de réalisme. Mais, l'interprétation d'une photographie ne peut pas être considérée comme une valeur absolue, elle est le produit d'une subjectivité particulière du regardant. Quand l'ai compulsé l'album présenté par Philippe Aimar, c'est ma propre impression devant ces oeuvres d'une rare qualité que j'essaie de faire partager à ceux qui auront le privilège de se pencher sur ces images de la Grande Île. Le photographe a su rendre l'atmosphère et la couleur de chaque région et tirer de l'individu les spécificités qui le particularisent tout en l'intégrant dans son groupe d'appartenance. Si nous regardons cette jeune femme de la page 36, avant même de lire la notation de bas de page, rien que par sa tenue et sa coiffe nous la situons d'emblée dans l'ethnie Betsileo. Il en est de même pour la plupart des portraits pris un peu partout dans l'île.
Ce qui ne manquera pas de frapper la curiosité de ceux qui ouvrent ce livre est l'itinéraire suivi par le photographe. Au lieu de se précipiter sur les lieux touristiques connus, il nous entraîne dans un parcours inédit. Après une visite prégnante chez les Merina, les Ambaniandro (ceux qui sont sous le soleil) du haut plateau central, en ayant pris soin d'éviter les sites trop vus et revus - mais qu'ils ne néglige pourtant pas (on les perçoit à travers certaines photos) - en insistant parfois sur ce que le commun des autochtones ne remarque même plus, à force de les côtoyer quotidiennement. Ainsi en va-t-il des images devenues parties intégrantes du paysage, comme ces petits marchands des bords des routes ou ces joueurs de fanorona qui s'approprient une partie de la voie, ce qui nous plonge dans un exotisme bon enfant. Le photographe porte son appareil, non directement vers l'est ou vers le nord où sont les sites touristiques les plus fréquentés, mais vers le sud. Sur sa route, il nous fait entrevoir la beauté des environs de la capitale avec ses rizières, nous montre les étals des petits producteurs de charbon de bois qui préfigurent malheureusement la déforestation. Sa première étape dans le pays des Betsileo (nombreux invincibles) est l'Isalo. Il présente en quelques photos ce qui dorénavant particularise la région: la recherche des pierres précieuses avec ce que cela implique de risque, d'effort quasi-inhumain et de misère dans l'espoir. Il ne se prive pourtant pas de nous faire admirer le sourire d'une jeune Vezo (ceux qui pagaient). Et son voyage reprend toujours vers le sud, comme si le photographe voulait se mettre sur les traces d'Etienne de Flacourt, mais il délaisse Fort-Dauphin, et s'oriente délibérément vers Tuléar, le pays des Bara (qui disent que la signification de leur nom est ceux qui ont la voix grave et sourde mais que les autres connaissent pour des simples d'esprit et des naïfs) pour nous faire appécier un crépuscule sur les dunes, là où la mer, la terre et le ciel majestueusement se confondent. Avec des paysages féériques, de jour comme de nuit, et des Antandroy (ceux des ronces) rayonnants dans la simplicité de leur quotidien le photographe-pérégrin nous fait partager son émotion cette nature d'une beauté à couper le souffle. Mais là où l'on s'attendait à le voir continuer sa route vers Morondava, il marche sur le tropique du Capricorne et se retrouve sur la côte orientale de l'île les pieds dans l'eau du canal de Pangalane, s'intéressant aux occupations aquatiques des Antaisaka (ceux de des longues vallées), des Antambahoaka (ceux du peuple) et des Betsimisaraka (nombreux qui ne se séparent pas). Toamasina est suggérée par une photo du lac sur le canal de Pangalane, puis nous voilà tout de suite au pays de la vanille et des Sakalava (ceux des longues vallées) au nord est de l'île, pour nous retrouver vers le nord face à l'île de Nossy-Bé devant des paysages grandioses d'une mer d'émeraude présentant les boutres comme des bijoux précieux et d'un ciel souvent bleu à la limite possible de la couleur.
Cet ouvrage de Philippe Aimar ne doit pas être vu uniquement comme une présentation de la nature mais aussi comme une étude de l'homme malgache dans un essai chaleureux et subtil. Le photographe a mis dans son travail toute sa passion et son attachement pour l'île et ses habitants. Il propose une approche originale et vivante de la société malgache mettant en évidence un réseau d'affinités et d'échanges qui le relie à un monde qui le subjugue, l'intrigue et l'attache. Je dirais même une confrontation affective de deux visions du monde différentes avec ce que cela implique de subjectivité. Chapitre après chapitre nous faisons connaissance avec les différentes ethnies malgaches. Ce qui m'a aussi ému dans ce livre c'est l'objectivité du photographe. Il ne s'est pas contenté de montrer la beauté de l'Ile avec des gens heureux, mais il fait toucher du doigt le paradoxe de la beauté et de la misère en montrant comment les Malgaches acceptent leurs destins et que les gens pauvres ne sont pas toujours tristes.
Qu'attend-on d'un livre de photographies si ce n'est de nous faire connaître un pays et de nous procurer du plaisir? Les deux objectifs sont atteints dans ce livre de Philippe Aimar et je ne puis que souhaiter à tous ceux qui l'ouvriront le même plaisir et émotion que j'ai eus en le consultant.

Philippe Aimar est né en 1958 à Paris. Il est journaliste professionnel et collabore régulièrement avec des magazines français et internationaux. Il fait ses débuts chez Sipa Press en 1986. En 1991, il part aux Etats-Unis et devient correspondant permanent pour le compte de cette agence à Los Angeles. A cette époque, une série d'événements riches en actualité interviennent. 1992, les émeutes de Los Angeles font la une des magazines du monde entier. Les photos de Philippe Aimar sont diffusées et largement publiées (Newsweek, Time, Paris Match, VSD etc..). En 1994, incendies et tremblements de terre frappent la Californie. De nouveau, ses photos sont largement publiés. Il réalise également de nombreux portraits des personnalités du show business américain. En 2002, à son retour en France, il prend la rédaction en chef de l'agence photo Corbis Sygma. Quelques temps plus tard il se consacre à son premier livre photo sur Madagascar. En 2005, il édite avec son confrère Salem Trabelsi (rédacteur en chef du quotidien tunisien La Presse) un livre sur la Tunisie. En 2008, il rejoint l'agence Hamsa Press (M6, Canal +, TF1...) et réalise plusieurs documentaires. En 2009, il publiera un livre intitulé Vanille - La route bourbon.

10 février 2010

Une bibliographie en expansion permanente

Je vous l'annonçais il y a un mois, je le rappelle pour les distraits qui auraient perdu l'information de vue: au lieu de publier ici, à un rythme qui était mensuel l'an dernier, des suppléments à la bibliographie de Madagascar sur Internet (le n° 54 de la Bibliothèque malgache électronique, téléchargeable sur le site de la Bibliothèque malgache), je tiens à jour une page intitulée sobrement, ou presque, Supplément permanent à la bibliographie Madagascar sur Internet.
Ce supplément grandit à vue d'œil, à raison pour l'instant d'un titre par jour en moyenne. Je ne saurais trop conseiller aux amateurs de livres anciens sur Madagascar de s'y reporter régulièrement. Ils y trouveront, par exemple, cette référence introduite hier vers une numérisation effectuée par Gallica d'un ouvrage que je ne connaissais pas et que je vais regarder de plus près dès que j'en trouve le temps: Sous les Tropiques. Impressions de voyage d'un gamin de Paris à Madagascar, par Auguste Mailloux, dont j'extrais une illustration.


8 février 2010

Madagascar, l'ailleurs par excellence

Dans Robe de marié, un thriller de Pierre Lemaitre qui a connu un joli succès l'an dernier et qui vient de reparaître en poche, Sophie a toutes les raisons de vouloir partir loin. Je ne vous raconte pas pourquoi, c'est l'objet du livre et il vaut la peine d'être découvert.
Si j'y fais allusion, c'est parce que l'idée de cet ailleurs dont elle rêve se confond, le temps de passer devant une agence de voyages, avec l'image de Madagascar. L'ailleurs par excellence, semble-t-il...
Extrait.
Sophie est dans le bus. Aller vite. Ses yeux fixent le vide devant elle. Comment faire pour aller vite? Elle regarde sa montre: juste le temps de rentrer et de dormir deux ou trois heures. Elle est épuisée. Elle remet ses mains dans ses poches. C’est curieux ce tremblement, c’est par moments. Elle regarde par la vitre. Madagascar. Elle tourne la tête et aperçoit un très court instant l’affiche qui a attiré son attention. Une agence de voyages. Elle n’est pas certaine. Mais elle se lève, appuie sur le bouton et guette l’arrêt suivant. Elle a l’impression de parcourir des kilomètres avant que le bus s’arrête enfin. Elle remonte le boulevard, de sa démarche de jouet mécanique. Ça n’était pas si loin, finalement. L’affiche montre une jeune femme noire au sourire naïf et charmant, portant une sorte de turban sur la tête, le genre de truc qui doit avoir un nom dans les mots croisés. Derrière elle, une plage de carte postale. Sophie traverse la rue et se retourne pour voir de nouveau l’affiche avec la distance. Manière de réfléchir.
– Affirmatif, a dit le sergent-chef. Moi, je n’aime pas tellement ça, vous savez, je suis pas un grand voyageur, mais enfin, on a des possibilités quand même. J’ai un copain, il est sergent-chef comme moi, il va partir à Madagascar. Remarquez, je comprends: sa femme est de là-bas. Et finalement, on ne le croirait pas mais il n’y en a pas tant que ça qui veulent quitter la métropole, vous savez! Pas tant que ça…!

5 février 2010

En librairie : deux ouvrages liés à Madagascar

Aucun de ces deux ouvrages n'est exclusivement consacré à Madagascar. Mais les liens sont assez significatifs pour que je signale leur existence. D'autant plus que le premier est coédité avec Tsipika, à Madagascar.

Mutations entrepreneuriales, sous la direction de Victor Harison et Claudine Ratsimbazafy

Traiter des mutations entrepreneuriales invite à se donner le temps d'une introspection pour mieux appréhender le phénomène. D'évolution en changement durable, par le passage d'un état à un autre de façon brusque ou d'une manière plus pondérée, dans son approche comme dans son contenu, l'étude de l'entrepreneuriat révèle des aspects novateurs qui sont mis à jour à différentes tribunes. Les mutations ainsi décrites se retrouvent dans la conceptualisation de la dynamique entrepreneuriale, dans la pratique de l'acte et dans le statut attribué à l'environnement. Dans ce schéma, comment les acteurs locaux peuvent-ils dynamiser leur territoire? Comment l'entrepreneur appréhende-t-il le monde? Comment cette vision est-elle intégrée dans la stratégie d'une entreprise solidaire? Quelles sont les modes de réponses des entreprises face aux mutations contextuelles? Comment les mutations financières sont-elles intégrées tant par les Institutions de microfinance que par les bénéficiaires? Telles sont les questions débattues dans la trentaine d'articles qui composent cet ouvrage.
Ces articles ont été choisis parmi les cinquante communications présentées lors des Journées Scientifiques du Réseau Entrepreneuriat de l'Agence Universitaire de la Francophonie qui se sont tenues à Antananarivo du 23 au 26 mai 2007.

Victor Harison, professeur à l'Institut National des Sciences Comptables et de l'Administration d'Entreprises (INSCAE) à Madagascar, est membre de la Commission Régionale d'Experts du Bureau Régional de l'Océan Indien de l'AUF. Il est ancien membre du Conseil d'Administration de l'Institut de la Francophonie pour l'Entrepreneuriat à l'île Maurice.
Claudine Ratsimbazafy, professeur à l'Institut National des Sciences Comptables et de l'administration d'Entreprises (INSCAE) à Madagascar, est membre du Comité de Réseau du réseau Entrepreneuriat de l'AUF. Elle est aussi responsable du laboratoire de recherche BRAIN de l'INSCAE. Elle est également correspondante scientifique de la revue Techniques Financières et Développement et membre du comité scientifique de la revue roumaine Management et Ingénierie Economique.

Gérard Alle, Lancelot fils de salaud (La fugue de l'escargot, L'arbre des chimères, Le vin des rebelles)

Lancelot, enfant, vit à Bordeaux. Adolescent, il s'enfuit en Bretagne, retrouve les traces de son grand-père breton, marié avec une jeune Berbère, et découvre que ni son père ni son grand-père ne sont des héros. Il exhume les secrets de famille enfouis au Maroc et en campagne bretonne au XIXe siècle. A 20 ans, il suit la trace de son père à Madagascar pour le tuer.

Madagascar vu du ciel dans un roman de Hugo Boris

Même Yann Arthus-Bertrand n'a jamais vu, et encore moins photographié, Madagascar d'aussi haut. Dans son nouveau roman, Je n'ai pas dansé depuis longtemps, Hugo Boris imagine l'expérience d'un cosmonaute soviétique qui passe plus d'une année en orbite terrestre. Ivan ne sait pas exactement à quoi il s'engage, puisque personne n'a encore vécu aussi longtemps en apesanteur. Il fait des ronds dans le ciel, en 1991 et 1992, comptant les orbites jusqu'à la 6798ème.
Un jour, un élément de la station tombe en panne. L'équilibre de l'appareil devient précaire. Il faut s'orienter à vue...
Ivan s'approche du hublot, cherche un repère à la surface de la Terre: l'île de Madagascar fera l'affaire.
- Qu'est-ce que tu fais? demande Bogdan.
- J'essaye de voir si on a déjà pris du roulis, dit-il en la masquant de son pouce.
Le doigt en l'air, un œil fermé, il attend qu'elle réapparaisse.
Petit à petit, l'île se dévoile sous son ongle.
La forêt est épaisse, mais traversée par un bras de sang. L'eau du fleuve est bien rouge, estime-t-il.
- Alors? fait Bogdan.
- Attends...
Il n'avait jamais remarqué. Une telle couleur, à cet endroit, ce n'est pas normal. Elle lui rappelle celle du sable dans certaines régions désertiques. Peut-être que le fleuve est plein de vase? Il ne voit pas d'autre explication possible au saignement de l'île. Le sol est devenu friable, les berges s'émiettent dans l'eau.
- Tu as vu comme ils ont attaqué la forêt, les Malgaches? demande Ivan.

29 janvier 2010

Des lémuriens au Botswana?

Je suis toujours de bonne humeur quand paraît une nouvelle enquête de Mma Ramotswe, qui dirige à Gaborone, Botswana, l'Agence N° 1 des Dames Détectives. J'aime sa manière de ronchonner, qui cache mal une grande bonté. J'aime surtout imaginer, comme un clin d'œil répété de livre en livre, ce que sont "les personnes de constitution traditionnelles", une catégorie dans laquelle se range Mma Ramotswe, tout le contraire d'un mannequin anorexique.
Pourquoi, vous demandez-vous peut-être, est-ce que je me mets à vous parler du Botswana?
Pour une raison toute simple: après avoir ôté la bande qui me cachait le bas de la couverture de Vérité et feuilles de thé, j'ai découvert, comme vous le voyez, ce couple de lémuriens dont la présence est pour le moins inattendue sur le continent africain.
On doit cette présence à la liberté de l'artiste Hannah Firmin, qui illustre depuis les débuts les couvertures originales de la série et qui a d'ailleurs, pour l'une d'entre elles, obtenu en 2004 le prix de la meilleure couverture de l'année en Grande-Bretagne. Une artiste a bien le droit, après tout, d'imaginer des lémuriens au Botswana si elle en a envie. Au fond, les films Madagascar n'avaient qu'un rapport très lointain avec la Grande Île...

27 janvier 2010

Le patrimoine au menu du Café de la Gare, vendredi


Vendredi 29 janvier de 17h30 à 19h30 au Café de la gare, Soarano (Antananarivo)
Le café littéraire vous invite à partager vos réflexions autour de la question suivante:
Faut-il défendre le patrimoine?
avec:
Serge Rodin: universitaire, responsable du parcours médiation culturelle, écrivain
Désiré Razafindrazaka: psycho-sociologue, Président de l'association des amis du patrimoine de madagascar (apm), Président du festival Madajazzcar
Johary Ravaloson: Chercheur, écrivain, juriste
animé par
Isabelle Motchane-Brun:
Directrice déléguée au journal l'Express
Michèle Rakotoson: , écrivain, rédactrice en chef du Magazine Challenger

23 janvier 2010

En librairie : deux nouveautés

Sur Madagascar - et l'océan Indien -, deux ouvrages sont récemment parus. Je ne les ai pas lus et, comme de coutume, je vous confie donc les textes de quatrième de couverture.

Christiane Rafidanarivo, Empreinte de la servitude dans les sociétés de l'océan Indien.

La question de la traite est l'un des champs de recherche les plus actifs de ces vingt dernières années. Les migrations causées par les traites arabe, malgache, africaine et européenne ont constitué un apport de peuplement important dans l'océan Indien et l'Atlantique, du IXe au XIXe siècle. Plus de soixante-dix pour cent de la population réunionnaise a une ascendance malgache et africaine, majoritairement issue des migrations de la traite. Cette dernière a contribué aux dynamiques majeures des structures politiques et économiques des sociétés de l'océan Indien.
Christiane Rafidinarivo montre que traite et esclavage, juridiquement abolis depuis le XIXe siècle, sont toujours à l'œuvre dans les sociétés de l'océan Indien où ils restructurent et retravaillent institutions, mémoires et savoirs. Certes, il s'agit le plus souvent d'un imaginaire social recomposé, parfois déconnecté des réalités historiques, mais dont les effets sont réels et récurrents dans la plupart des rapports sociaux, les relations interpersonnelles, les rapports marchands, le champ des représentations politiques (le discriminant noir et blanc, par exemple), et jusque dans l'occupation de l'espace.
La permanence de ces phénomènes, tant chez les descendants d'esclaves que chez ceux des maîtres, obsède les sociétés postcoloniales. Leur décodage s'avère d'autant plus complexe que s'est constituée au cours du temps une sédimentation de représentations issues des contextes économiques et politiques qui ont suivi la traite et l'esclavage (colonisation, post-colonisation, mondialisation) et dans lesquels la rémanence se trouve dissociée du fait historique proprement dit.
Ce livre analyse les processus de transmission de ces empreintes de servitude. Sur le chemin de la mémoire au savoir, il peut nous aider à une appropriation de la liberté pour aujourd'hui.

Politologue à l'université de la Réunion. Christiane Rafidinarivo est habilitée à diriger des recherches en sciences politiques. Consultante internationale et présidente de l'association Recherche océan Indien, elle est auditeur de l'Institut des hautes études de défense nationale (SR 177).

Jean-Claude Leprun, Une jeunesse malgache, 1942-1966.

Un enfant européen né dans la brousse malgache se souvient. Son père est gendarme. C'est l'époque coloniale, le temps de la guerre en Europe, de la défaite de la France, du Général de Gaulle, du débarquement anglais à Diégo-Suarez qui a tant marqué ses premiers souvenirs. Il va grandir en osmose avec cette brousse, ses habitants, sa végétation et sa faune. Cette expérience va le conduire à sa vocation de naturaliste. Le récit, agrémenté d'anecdotes, est fondé sur des faits réels et conte les vingt premières années de l'auteur dans ce pays, les habitations successives: Joffreville, Anivorana, Diégo, Nosy Be, Majunga, Tamatave, l'école primaire difficile car tardive, puis l'École primaire supérieure (EPS), et les lycées Rabearivelo et Gallieni, les premières années d'université à Tananarive, les copains, les premières amours, la découverte de la France au cours des premiers congés paternels, sa rencontre avec Fabienne, le service militaire au Gabon. Un attachement profond, qu'il essaie de faire partager, le lie à ce pays où il a vécu intensément une jeunesse heureuse et riche d'enseignements au sein d'une famille unie et où, malheureusement, son père est mort prématurément.

Âgé de soixante-dix ans, Jean-Claude Leprun est né à Diégo-Suarez et a vécu ses vingt premières années dans la Grande Ile. Pédologue, docteur ès sciences et directeur de recherches à l'IRD (ex Orstom), il a travaillé dix années dans différents pays d'Afrique de l'Ouest puis quatorze années au Brésil, d'abord sur le terrain puis comme représentant d'organismes de recherches français à Brasilia.

21 janvier 2010

Une bibliothèque malgache en malgache, un jour?

Le site Haisoratra reprend un article de Madagascar Matin déjà vu sur le portail Moov et signé Tivoniaina. L'article original, publié, je crois, tel quel par Moov, s'intitule: Numérisation. Des livres sur Madagascar en ligne gratuitement et parle de la Bibliothèque malgache.
Merci.
La rédaction de Haisoratra ajoute, en guise de conclusion, une réflexion pertinente: "Il reste à faire la numérisation des textes et livres anciens en malgache et libres de droit."
En effet.
Je suis le premier à déplorer l'origine très majoritairement coloniale des ouvrages que je réédite. Et presque tous sont, à l'origine, écrits en français. Une seule exception notable pour l'instant, je crois, avec le récit de voyage d'Ida Pfeiffer...
Les limites du fonds disponible sont évidement fixées par les règles sur le droit d'auteur. Je rappelle que les ouvrages ne deviennent en effet libres de droits que 70 ans après l'année du décès de leur auteur.
Les limites linguistiques qui sont les miennes me conduisent par ailleurs à ne rééditer que des ouvrages en français.
Les sources en malgache sont certes moins nombreuses. Mais elles existent. Un exemple, ci-dessous.
Qui aurait le courage de s'y mettre?


12 janvier 2010

Chez les Hova, de Jean Carol, en ebook gratuit

Je vous l'avais promis: après la publication du livre sur papier, je devais le rendre disponible gratuitement en téléchargement. C'est donc le cinquante-cinquième volume de la Bibliothèque malgache électronique. Comme le texte n'a évidemment pas changé, je ne peux que redire ce que j'avais déjà écrit il y a quelques semaines...

Jean Carol est le nom de plume de Gabriel Laffaille (1848-1922). Journaliste et romancier, il s’embarque pour Madagascar fin 1895 pour être le secrétaire particulier du résident général Hippolyte Laroche. Au départ de celui-ci, il devient directeur de l’Imprimerie nationale, jusqu’au moment où Gallieni, irrité par ses prises de position, l’en écarte.
On comprend pourquoi en lisant Chez les Hova: son ouvrage tranche singulièrement avec la littérature coloniale de l’époque. Sans remettre en cause la supériorité de la race blanche, considérée comme un fait irréfutable, et les enjeux économiques liés à la possession de la Grande Île, il s’en prend violemment aux méthodes mises en œuvre par la France.
Tentant de se placer d’un point de vue malgache (sans y parvenir toujours), il trouve à la population des qualités que les colons ne veulent pas voir. Il s’étend en particulier sur l’institution du fokonolona et sur le Code malgache de 1881, y relevant les marques d’une sagesse que les législateurs européens n’ont pas donnée à leurs textes.
Un grand livre.

On peut le charger, en suivant les liens directs, au format DOC ou PDF. Je rappelle que tout le catalogue de la Bibliothèque malgache électronique est à cette page, mais que la visite complète du site est conseillée, à partir de sa page d'accueil.
Je rappelle aussi, pour les lecteurs sur papier (les derniers?), le lien qui permet de commander l'ouvrage et celui de tous les ouvrages papier de la Bibliothèque malgache publiés chez Lulu.

Rendez-vous prochainement ici pour d'autres nouveautés et, avant cela, pour d'autres informations culturelles.

Esther Duflo : Lutter contre la pauvreté

Il y a un an, presque jour pour jour, je vous parlais d'Esther Duflo et de son parcours qui l'avait menée (en simplifiant un peu) de Madagascar au Collège de France. Aujourd'hui, elle publie dans Le Monde un long article intitulé: Microcrédit, miracle ou désastre? Surtout, les textes des quatre leçons qu'elle a données en janvier 2009 viennent de paraître. Cela nous concerne.

Dans Le développement humain. Lutter contre la pauvreté (I), il est d'ailleurs directement question de Madagascar. Elle utilise deux expériences qui y ont été conduites récemment.
L'une concernait des classes d'écoles primaires rurales où différents moyens ont été utilisés pour améliorer la perception de l'enseignement par les parents des élèves. Le résultat a été, dans tous les cas, une augmentation de l'assiduité des élèves, mais dans des proportions diverses selon le type des rencontres qui avaient été organisées.
L'autre expérience consistait à comparer, par des tableaux de bord, une école avec d'autres, en misant probablement sur une émulation entre différents établissements. Résultat nul, contrairement à d'autres écoles où une ONG a utilisé ces tableaux, avec les parents, pour envisager des améliorations.
Ces deux exemples sont caractéristiques de la démarche d'Esther Duflo: elle se base sur un travail de terrain afin d'en évaluer la pertinence. Au contraire de bien des intervenants dans les secteurs abordés par ce premier volume: "aujourd'hui, les systèmes officiels d'éducation et de santé sont, dans une large mesure, le produit de l'imagination de bureaucrates et d'experts qui n'ont de rapports directs ni avec les besoins des personnes, ni avec les réalités du terrain."

Dans l'autre volume, La politique de l'autonomie. Lutter contre la pauvreté (II), il n'est pas directement question de Madagascar (sauf distraction de ma part). Mais il y est en revanche question de microfinance et de corruption, deux sujets sur lesquels les réflexions d'Esther Duflo peuvent éclairer la réalité malgache.
A propos du microcrédit, elle s'interroge: "aide-t-il vraiment les pauvres?" Si l'on ne creuse pas la question, elle semble absurde. La spécialiste en économie du développement nous persuade cependant du contraire.
Sur la corruption, au lieu d'envisager les comptes en banque bien fournis des dictateurs africains, elle s'intéresse au phénomène quotidien: "c'est le policier qui n'enregistre pas votre plainte si vous ne lui glissez pas un billet, ou bien le maire qui demande un bakchich pour délivrer la carte d'alimentation à laquelle vous avez droit."
Où l'on voit que l'Inde ou le Brésil ne sont pas sans rapports avec Madagascar...

9 janvier 2010

Mise à jour permanente de la bibliographie Madagascar sur Internet

Tout compte fait, me disais-je hier, ne pourrais-je pas simplifier la vie des chercheurs et des curieux en proposant, plutôt que des suppléments mensuels, une mise à jour permanente de la bibliographie où je reprends tous les ouvrages disponibles gratuitement sur Internet - et concernant Madagascar?
C'est fait. En suivant ce lien (qui sera affiché, cela va de soi, en permanence dans la colonne de droite), vous afficherez un document Google où se trouvent les références enregistrées après la deuxième édition de la bibliographie (disponible sur le site de la Bibliothèque malgache). Il y en a déjà près d'une quinzaine, Gallica venant de mettre en ligne un joli paquet d'ouvrages.
Dont celui-ci, qui me fournit une illustration.


7 janvier 2010

Quelques nouveautés en librairie

Puisque je n'ai pas pu en parler en décembre, au moment où j'aurais voulu le faire, voici quelques ouvrages parus à la fin de l'année dernière, et j'y ajoute deux guides classiques dont les nouveaux millésimes sont disponibles.

Je commence par le numéro très attendu de Riveneuve Continents, Escales en mer indienne. Il ne concerne pas que Madagascar puisque les Comores, Maurice, la Réunion et les Seychelles y sont aussi présentes. Mais une demi-douzaine de textes valent qu'on s'y arrête.
Raharimanana revient, dans De là où j'écris, et à la manière d'un écrivain plutôt que d'un polémiste, sur les déboires de la pièce 47.
Johary Ravaloson, dans Ainsi les jours fumeux, livre des conversations tenues (ou qui auraient pu l'être) le 26 janvier 2009 à Tana, du côté d'Ankorondrano, quand les émeutes se sont transformées en pillages.
Du haut de la ville, Soa Hélène apercevait, ce jour-là, les mêmes fumées. Elles apparaissent dans les pages de son Journal.
Magali Nirina Marson voit Rouge dans le premier texte de fiction que je lis vraiment d'elle (après en avoir découvert un fragment plus tôt). Mais une fiction fortement ancrée dans le réel, et nourrie de colère.
Kere, de "notre" Jean-Claude Mouyon ("notre", puisqu'il est édité par la Bibliothèque malgache), est extrait d'un roman à paraître, Moi Antoine, dit l'idiot du Sud, et parle notamment, pour ceux qui ne l'auraient pas compris, d'une famine chronique dont Christian Chadefaux fournit les clés.
Hery Mahavanona donne Le roman inachevé, fiction urbaine où la création se heurte aux aléas de la vie quotidienne.
Des textes d'une belle tenue, publiés à proximité d'un Mauricien auquel le prix Nobel de littérature a donné une renommée mondiale, J.M.G. Le Clézio...

Ambass Ridjali, qui a déjà écrit deux pièces de théâtre et deux romans pour la jeunesse, dirige depuis 2004 la bibliothèque municipale Tsingoni à Mayotte. Il publie mahajang@madagascar.com, un bref roman qui semble s'adresser à la jeunesse, et dont voici les premières lignes.
@ un ami sur le net
Cher ami, tout d'abord merci d'avoir répondu à mon mail. C'est que j'ai tapé une adresse au hasard sans jamais penser qu'elle existait. Mais comprends-moi, j'ai tellement de choses dans la tête, dans le cœur que j'ai l'impression qu'ils vont éclater d'un moment à l'autre. Alors il faut que je parle. Il faut que je les vide.
Cher ami, tu peux ne pas me donner ton nom. Peu importe. Cela me suffit que tu lises mes courriers. Que tu m'écoutes avec tes yeux. Toi qui habites loin. Loin de mon île, loin de chez moi. Laisse-moi te conter ma vie, mes joies, mes peines et mes souffrances.
Les extraits du roman, que l'on peut lire ici, ne suscitent pas vraiment l'enthousiasme.

On a déjà rencontré Jean-Pierre Haga dans les pages de ce blog. Le revoici avec un roman, L'œil du cyclone, que je n'ai malheureusement pas lu et sur lequel je me contenterai donc de fournir quelques détails pêchés sur le site de son éditeur.
Jean-Pierre Haga passe à la loupe les faits et gestes des personnages, leurs pensées, tout en jouant avec les onomatopées (à la manière d’une Anna Gavalda), les quiproquos, le suspense, l’humour, le fantastique - déjà mis en scène dans son roman jeunesse, Vert de peur (Editions Magnard, 2005) et dans sa nouvelle Sitarane blues (Editions Orphie 2008).
Jean-François Samlong, Notre Librairie. Revue des littératures du Sud - 2005

L’histoire dans un style alerte, met en scène des personnages ordinaires que l’on croise sur son chemin sans leur prêter grande attention ; et puis, il y a ceux qu’il ne fait pas bon de rencontrer à la brune ou dans des coins isolés, Judex Roupaye par exemple, de la pire espèce des voyous qui n’abandonnent pas leur proie et ne meurent jamais. La seule solution c’est la fuite, avec dans la bouche un goût de litchi vert. Mais où fuir pour se sentir en toute sécurité ? Heureusement qu’il existe aussi sur la route un gramoun Sacha, qui ouvre les portes de l’aventure à Charlie et Inès. Et quelle aventure!
Je signale déjà que Jean-Pierre Haga sera l'invité d'un forum littéraire au CCAC, le samedi 23 janvier à 10h30, pour présenter ce roman.

J'aurais voulu vous parler longuement d'un roman que, en revanche, j'ai lu. Le bonheur est un drôle de serpent, de Raymond Alcovère, m'a cependant beaucoup trop ennuyé pour qu'à mon tour je vous ennuie avec ça. Et Madagascar n'est qu'un des lieux arpentés par les personnages.

Je termine donc par les traditionnels guides de voyage, dont les éditions 2010 arrivent à point pour les touristes décidés à nous visiter cette année.

Le petit futé Madagascar a beaucoup grandi depuis ses débuts. Plutôt en bien, d'ailleurs. Mais l'argumentaire n'a pas beaucoup changé, puisque La Grande Ile, malgré les remous qui l'agitent parfois, reste fondamentalement la même.
Madagasikara, entre Afrique et Asie; sur cette terre des peuples venus d'Extrême Orient, d'Afrique, d'Inde, d'Arabie et d'Europe ont créé la société pluriculturelle malgache. La terre y est indissociable des gens, imprégnée de mémoire, tour à tour étendue désertique, terre rouge, collines vertes, ou forêt parsemée d'orchidées. Les îles du Nord, telle Nosy Bé, sont maintenant très courues des touristes avides d'espaces vierges et de plongées idylliques, mais il reste encore des lieux préservés et c'est un continent que l'on découvre en abordant la terre malgache. La vie y est rude, la pauvreté omniprésente, mais la joie et le sourire sont au rendez-vous. Soyez généreux avec cette terre qui vous accueille.
L'incontournable Guide du routard Madagascar est aussi au rendez-vous. La nouvelle édition est parue cette semaine. Je ne connais pas la proportion des informations mises à jour mais je sais, pour avoir longuement bavardé avec le principal responsable des rafraîchissements de ce guide, qu'ils sont faits sérieusement.
Et, plutôt que de vous redonner les quelques phrases en forme, inévitablement, de clichés, je vous renvoie aux deux derniers carnets de voyage mis en ligne sur le site du Routard: Un Vazaha chez les Vezo et Trek chez les Zafimaniry.

Bonnes lectures!

4 janvier 2010

Une exposition à Perpignan

L'information vient du Midi Libre: La cave coopérative de Terrats accueille l'exposition "Visages de Madagascar" de Cécile Cellerier Maurel, jusqu'au 31 janvier.
Comme elle le présente elle-même: "Visages de Madagascar" est une exposition qui mêle une série de portraits / paysages en noir et blanc réalisés à Madagascar en mai 2007 et des dessins à l'encre, inspirés des portraits. Touchée par les regards "directs, francs, sincères, ouverts et curieux" des Malgaches, la photographe a voulu illustrer l'immense variété et richesse de l'île africaine au travers des visages de ses habitants. Fixer sur la photo des instants d'émotion dans un souci de partage et de réelle sincérité, tel est l'un des soucis majeurs de l'artiste. Marquée profondément par la puissance de ces regards saisis, le dessin lui a aussi permis de prolonger et restituer pleinement son émotion, se libérant du cadre de la photo. Cécile Cellerier Maurel traque avec douceur et respect la part lumineuse des gens, dans le détail d'une pose, d'un geste, d'un regard pour le restituer avec une maîtrise à la fois sensible et professionnelle.
Je ne sais pas si l'illustration que je joins appartient à l'exposition. Elle vient de la galerie de photos de Cécile Cellerier Maurel. Je la montre pour donner une idée de son travail.


2 janvier 2010

Deuxième édition de la bibliographie Madagascar sur Internet

D'un livre électronique à tous les autres - sur Madagascar et en français seulement, il ne faut pas exagérer -, j'avais l'an dernier, en juillet, proposé un volume de bibliographie.
Constatant, au fil des mois, que le nombre d'ouvrages disponibles allait croissant à une belle vitesse, j'ai publié ici des mises à jour provisoires qui sont maintenant intégrées dans la deuxième édition.
Elle a été considérablement augmentée puisqu'en six mois elle est passée de 74 à 89 pages. Un nombre important de liens en plus, donc. Et je constate, en rédigeant cette note, que cela continue: dans la colonne de droite, ce matin, Internet Archive en fournit déjà deux autres (mais l'un des deux ne correspond pas au livre annoncé), en particulier celui qui mène à un livre consacré au tanguin. Je continuerai donc à introduire ici les compléments d'information à un rythme soutenu, probablement une fois par mois.
Ce cinquante-quatrième volume bis, premier de 2010, annonce de nouvelles publications. Les prochaines seront Chez les Hova, de Jean Carol (déjà disponible sur papier chez Lulu), les Vieilles chansons des pays d'Imerina de Jean-Joseph Rabearivelo et le Bulletin du Comité de Madagascar de septembre 1897.
Rendez-vous, pour les chargements, sur le site de la Bibliothèque malgache, sur la page de la Bibliothèque malgache électronique.