De la Tribune :
Les parents européens de
Tananarive sont dans la joie. Un décret, publié dans le dernier numéro de l’Officiel de la Colonie, donne
satisfaction à l’un de leurs plus vifs et plus légitimes désirs.
Depuis plusieurs années
déjà, ils demandaient à ce que leurs enfants, après avoir suivi les cours
réguliers du collège de Tananarive et franchi les différents degrés de l’enseignement
secondaire, puissent obtenir sur place, sans être obligés d’effectuer le
voyage, long et onéreux, de Madagascar à la Réunion, un diplôme de fins d’études
correspondant au baccalauréat de nos Facultés de France.
Ce vœu était d’autant
plus légitime que le niveau des éludes au collège de Tananarive était, d’année
en année, plus élevé. Les élèves arrivés à la classe préparatoire au
baccalauréat se trouvaient en général dans d’excellentes dispositions et munis
d’une culture parfois supérieure à celle de la plupart des élèves de nos lycées
et collèges de France.
Malheureusement, les
frais à faire pour s’en aller chercher à la Réunion la consécration officielle étaient
considérables et jusqu’à présent, beaucoup de parents – colons principalement –
hésitaient à les engager ou parfois même se trouvaient dans l’impossibilité
absolue de le faire. Il en résultait que des jeunes gens, intelligents et
instruits, ne pouvaient obtenir le diplôme grâce auquel ils auraient obtenu,
dans la colonie, une situation en rapport avec leur savoir.
Le nouveau décret, en
instituant à Madagascar un brevet de capacité correspondant au baccalauréat,
met fin à cette situation regrettable et ouvre largement la voie des études
supérieures à toutes les intelligences et à toutes les activités.
Le jury chargé d’examiner
les candidats présentera les mêmes conditions d’indépendance et de savoir que
les jurys d’examen métropolitains. Les membres seront, en effet, choisis parmi
les professeurs titulaires du collège, dont chacun connaît, à Tananarive, la
science et les qualités pédagogiques, parmi les fonctionnaires civils,
licenciés ès-lettres ou ès-sciences, enfin, parmi les docteurs en médecine et
les élèves des grandes écoles.
L’éclectisme de ce choix
constituera la meilleure des conditions d’impartialité et les candidats reçus
auront pleinement mérité le diplôme qui leur sera délivré.
Comme en France, il y
aura à Tananarive deux sessions d’examen : l’une à la clôture, l’autre au
commencement de l’année scolaire. D’autre part, les jeunes gens munis du brevet
de capacité pourront l’échanger contre le diplôme de bachelier de l’enseignement
secondaire sous la condition d’acquitter, au compte du trésor public, les
droits exigés en France des candidats au même titre. En plus, ils devront justifier
qu’à l’époque où ils se sont présentés devant le jury d’examen colonial, ils
résidaient depuis un an au moins à Madagascar ou encore qu’ils sont fils de
fonctionnaires en exercice à Madagascar.
Le décret contient bien
une pierre assez sérieuse d’achoppement, mais il est à penser que les Facultés
de France useront rarement de la latitude qui leur est laissée.
Il est dit, en effet,
dans le décret que la Faculté à laquelle le lauréat s’adressera pour l’échange
des diplômes pourra, si elle juge les compositions insuffisantes, se refuser au
dit échange. Dans ces conditions, le porteur du brevet de capacité devrait
subir à nouveau, devant la Faculté métropolitaine, les épreuves du
baccalauréat.
Nous avons la conviction
que les Facultés de France n’useront pour ainsi dire jamais du droit qui leur
est concédé par le décret.
Verbis.
Le Tamatave
Extrait de Madagascar il y a 100 ans. Février 1913.
(A paraître dans quelques jours)
Janvier 1913 est disponible :
en version papier (123 pages, 10 € + frais de port)
en version epub (4,99 €).
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