J’entends dire – le
ministre des Colonies ne me faisant pas ses confidences, – que l’administration
de la rue Oudinot aurait refusé au gouverneur général de Madagascar,
l’autorisation d’émettre un emprunt destiné à l’établissement du port de
Tamatave.
Pour cette fois,
j’approuve pleinement l’attitude du ministre des Colonies. La colonie de
Madagascar est en état de payer les travaux du port de Tamatave sur ses
ressources ordinaires, et je n’ai jamais compris comment se justifiait le
projet d’emprunt.
Oh ! je sais bien
que les gouverneurs ont une excellente presse quand ils empruntent. C’est à
qui, dans certaines feuilles, hélas ! trop nombreuses, célébrera leurs
éminentes qualités d’administrateurs. Du moment qu’ils donnent leur clientèle
aux banquiers, émetteurs de titres étrangers et coloniaux, ils sont réputés
économistes avertis et prévoyants, comprenant la nécessité de vastes
entreprises, appuyées sur de non moins vastes capitaux. Ils peuvent, à d’autres
points de vue, accumuler les sottises, personne ne les relèvera.
Ceux des gouverneurs,
dont la situation, en raison de l’esprit favorable de leur personnel et des
colons, n’a pas besoin d’être consolidée, trouvent pour l’exécution de leurs
entreprises, dans la complicité des prêteurs, un concours extrêmement utile.
Telle affaire qui traînera indéfiniment de bureau en bureau, si la colonie qui
la propose est seule à la défendre contre l’inaction ou l’hostilité de la rue
Oudinot, sera approuvée et revêtue de toutes les autorisations sacramentelles,
en un tour de main, si des prêteurs éventuels, dont l’influence est énorme,
sont intéressés à la voir aboutir.
Tel railway africain,
d’utilité contestable, a été autorisé sans coup férir : la terminaison du
chemin de fer de Madagascar s’est heurtée, pendant deux ans, à la mauvaise
volonté du Département. Le gouverneur de Madagascar avait eu le mauvais goût de
construire son chemin de fer, sans emprunt, sur les ressources de son budget
normal : qui donc avait, en dehors de la colonie, intérêt à voir aboutir
cette entreprise ? Par contre, toutes les banques, avec leurs bulletins
financiers, soutenaient les projets africains faisant appel à leur concours.
(À suivre.)
Les Annales coloniales
Madagascar il y a 100 ans - Janvier 1913 est disponible :
en version papier (123 pages, 10 € + frais de port)
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