S’il était besoin d’une
nouvelle preuve de l’incapacité gouvernementale, le spectacle du désordre de la
population indigène suffirait amplement.
Il est avéré que de
nombreuses réunions ont été tenues par les tenanciers de l’ancien état de
choses au vu et au su des autorités ; que de nombreux fonctionnaires
indigènes y ont participé. Il est encore avéré que, non seulement des collectes
ont été faites, mais qu’une contribution spéciale a été votée pour tous les
membres de la caste sous prétexte de rachat des droits de noblesse et avec la
menace de fermer l’accès aux récalcitrants et aux insolvables. Il ne manque
plus qu’un porteur de contraintes.
C’est non seulement,
comme le dit notre confrère la Tribune,
une vaste entreprise d’extorsion de fonds, mais encore la manifestation
éclatante d’un inquiétant état d’esprit qu’on pouvait croire définitivement
disparu.
Nos réactionnaires
malgaches ne doutent plus de rien, ils ont décidé, en effet, de soumettre à
M. Picquié un projet d’arrêté frappant d’une amende tout membre qui se
mésallierait en épousant une femme étrangère à la Caste. On aggraverait ainsi
les anciennes dispositions frappant d’amendes ou de fers les usurpations de
qualité.
M. Picquié fera sans
doute état de sa qualité de fonctionnaire d’une République égalitaire pour
décliner ces sollicitations. Il eût sans doute mieux valu éviter l’équivoque
d’une politique qui a permis d’aussi grotesques espoirs.
Pour cela, il eût été
indispensable d’affirmer hautement les principes républicains, au lieu de se
mettre à la remorque des missions protestantes.
Une fois déjà, et dès le
début, un gouverneur protestant, M. Laroche, faillit compromettre par ses
faiblesses la domination française ; en faisant le jeu des missions
protestantes, il précipita l’explosion des ambitions et des rancunes de tous
les soutiens d’un régime condamné. Cette leçon, M. Picquié paraît l’avoir
oubliée ; les vieux Colons de Madagascar, eux, l’ont présente à l’esprit.
Ils savent par expérience
que, dans un pays livré aux sectes religieuses, la politique la plus sûre est
encore celle qui les confond toutes pour ne s’inspirer que de l’intérêt
supérieur.
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