(Suite et fin.)
Malgré toute l’horreur
qu’il en ressentait, l’être le plus inoffensif pouvait aller jusqu’à s’associer
à un meurtre lorsque son Frère de Sang l’en avait requis. Une année, un lépreux
avait refusé tout soin et s’était lentement laissé mourir de frayeur. On ne
savait pas d’abord pourquoi, mais on le sut plus tard. Le malheureux avait
contracté l’engagement du Sang avec une femme, avait fait tort un jour au mari
de cette sœur du Sang et sentait l’Esprit vengeur venir le chercher. Il
l’attendait avec le sentiment de l’expiation !
*
Grâce aux Missionnaires
et aux Sœurs, la colonie d’Anbatoabo devenait peu à peu chrétienne, et la
douceur naturelle des convertis se transformait très vite en une charité naïve
qu’ils s’empressaient d’exercer les uns vis-à-vis des autres. Païens comme
Chrétiens, d’ailleurs, recevaient les mêmes soins des Sœurs, et des soins
admirables, malgré la pauvreté de la Mission, dont les ressources étaient aussi
petites que les dévouements y étaient grands et qu’ils s’y prodiguaient
simplement.
— Nous n’aurions
besoin que d’un peu plus d’aide, disaient seulement quelquefois les
Religieuses, mais les petits anges qui nous quittent et que le mal nous prend
tout de suite nous en enverront de là-haut
Hélas ! il y a
quelques mois, le 16 octobre dernier, un incendie d’une violence
extraordinaire dévorait tout en quelques instants… Un vent de cyclone s’était
subitement élevé, des flammèches avaient volé sur les cases, et, des six villages,
il ne restait plus rien. Aujourd’hui, tout est à reconstruire, mais la Mission
est toujours là, et s’est déjà remise à l’œuvre. Qui l’aidera, en dehors des
petits anges du Paradis ?…
Et qui sait ?… Le
fléau a réapparu en France. Tout s’en va pour revenir, et tout cesse pour
recommencer. Peut-être, avec tous nos progrès, toute notre science, toutes nos
merveilles, toutes nos magnificences, tous les miracles de notre incomparable
génie, verrons-nous un jour une ville genre Anbatoabo, quoiqu’un peu plus
perfectionnée, sur les bords de la Seine, dans les environs de Paris !
Maurice Talmeyr.
Le Gaulois
L'intégrale en un livre numérique (un volume équivalant à 734 pages d'un ouvrage papier), disponible en deux endroits:
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