Après beaucoup de
discussions, les naturalistes maintenant s’accordent à reconnaître que les
crocodiles malgaches, vulgairement et à tort appelés caïmans, appartiennent à
deux espèces différentes, l’une, le crocodilus
robustus, plus grande et plus spéciale aux lacs de la région centrale, et
l’autre, le crocodilus madagascariensis,
plus abondamment répandue sur les côtes. Mais il est encore après tout possible
que les naturalistes se trompent, que ce qu’ils ont pris pour caractères
spécifiques ne soit que variation individuelle ou locale, d’âge ou de sexe, et
que tous les crocodiles de Madagascar ne forment qu’une unique et seule espèce.
La forme et la couleur du
crocodile malgache varient fort en effet au cours de sa vie. Tout jeune, il est
agréablement paré d’une livrée grise et jaune qui s’efface avec les ans, et sa
tête, d’abord très longue relativement à son corps, devient avec l’âge
proportionnellement beaucoup plus courte et beaucoup plus massive, ce qui finit
par donner aux individus très vieux un faciès tout particulier. À cela il faut
ajouter : 1° que chez ces sauriens les caractères sexuels sont assez
tranchés ; 2° que les caractères morphologiques, donnés comme
distinctifs par les auteurs, sont peu constants ; 3° que l’on a
jamais surpris chez ces animaux ces différences de mœurs, d’habitude, de faciès
qui aident si souvent les naturalistes, travaillant sur le vif, à distinguer
les vraies espèces des simples formes ou variations accidentelles, et enfin, en
dernier lieu, que presque tous les types spécifiques malgaches, largement
répandus dans l’île, ont des variétés ou des races spéciales à chacun des
climats très divers de l’île.
Toutes ces raisons
permettent évidemment de croire à l’unité spécifique du crocodile malgache,
mais il se peut aussi que mon ignorance seule m’ait empêché de voir les vrais
caractères distinctifs des deux espèces. Aussi, laissant à d’autres, plus
savants que moi, le soin de résoudre un si litigieux problème, me
contenterai-je d’avouer ici simplement qu’après avoir observé des crocodiles
dans toutes les régions de l’île et en avoir examiné de très nombreux
exemplaires, je n’ai jamais su voir entre eux des différences assez tranchées
pour les séparer spécifiquement.
(À suivre.)
Perrier de la Bathie.
Bulletin de l’Académie malgache
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