Un assez vif
mécontentement règne en ce moment dans la population blanche de Maurice, qui
constate avec amertume la réapparition dans leur île de procédés vexatoires
qu’ils espéraient abolis pour toujours.
On sait qu’après la prise
de l’île par l’Angleterre en 1810, le gouvernement de Londres avait fait preuve
d’un libéralisme… intéressé, respectant les coutumes locales et nommant des
Mauriciens à de hauts emplois dans l’administration. Il espérait par ces
faveurs faire des Mauriciens, hier encore Français, des sujets dévoués du
gouvernement britannique.
Mais ce mariage de raison
n’alla point sans heurt : en 1830, survint la crise de l’abolition de
l’esclavage et l’Angleterre, n’ayant su s’assimiler ses nouveaux sujets par la
douceur, prétendit se les assimiler par la force.
Ce fut une dure période
de réaction au cours de laquelle les Mauriciens traités en « sujets »
eurent à lutter contre leurs maîtres qui affichaient ouvertement l’intention de
faire de l’ancienne île de France l’île d’Angleterre, en forçant les
Franco-Mauriciens à s’expatrier et à céder leurs biens à des citoyens du
Royaume-Uni. N’y ayant point réussi, l’Angleterre voulut les noyer dans un flot
d’Hindous.
La lutte fut longue et
tenace de part et d’autre, mais la population d’origine française conserva
quand même sa prépondérance sociale et territoriale.
En 1883, le cabinet de
Londres nomma gouverneur de l’île Maurice un Irlandais, sir John Pope Hennessy,
qui, partout où il avait été jusque-là, s’était montré l’adversaire des
fonctionnaires anglais et des colons et le protecteur des indigènes. Le Colonial Office espérait que sir John
appliquerait à Maurice ces mêmes pratiques et qu’il viendrait à bout des
planteurs franco-mauriciens.
Ce fut exactement le
contraire qui se produisit : sir John Pope Hennessy, Irlandais
nationaliste, avait pris ailleurs le parti des indigènes contre la classe
dirigeante anglaise ; à Maurice, il prit le parti des Mauriciens contre
les fonctionnaires anglais. Comme ceux-ci étaient, pour la plupart, des laissés
pour compte de l’administration métropolitaine, il ne lui fut pas difficile de
les prendre en faute, et il les remplaça par des Mauriciens.
(À suivre.)
Francis Mury.
Le Courrier colonial
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