(Suite.)
Il aime aussi beaucoup
les volailles domestiques, poules, canards, oies et dindons, qu’il avale aussi
aisément qu’une sarcelle. C’est un grand pillard de poulailler et son goût
prononcé pour les poules lui fait souvent parcourir de longues distances sur la
terre ferme ou accomplir des escalades et des tours d’acrobate, dont on
n’aurait pas cru capable son vilain corps. Cet amour de la volaille le met même
parfois en fâcheuse posture, tel ce caïman qu’un de mes amis trouva un beau
matin dans sa volière, dont il avait mangé consciencieusement tous les hôtes.
Ses autres proies
habituelles les plus volumineuses habitent la terre ferme, où il ne peut songer
à les poursuivre. Aussi attend-il patiemment que la soif ou toute autre cause
les amènent au bord de son domaine. Caché au loin dans l’onde, ses yeux jaunes
effleurant à peine à la surface, il surveille attentivement les allées et
venues de la proie qu’il guette et, sitôt qu’elle approche du rivage, plonge et
s’approche de la berge en suivant le fond. Si l’animal convoité s’approche
alors à sa portée, il le saisit d’un grand coup de mâchoires et l’entraîne dans
les eaux. Il noie ainsi sa victime et, lorsqu’elle est réduite à l’impuissance,
l’emporte vers son réduit ou aux environs et attend patiemment, couché dessus,
que la chair soit dans un état de putréfaction assez avancée pour qu’il puisse
la dépecer à son aise.
Je ne crois pas
d’ailleurs que ce soit par simple goût que le crocodile malgache fasse ainsi
faisander les grosses pièces de ses chasses, car on le voit avaler presque
vives toutes les autres proies qui peuvent passer entières dans son vaste
gosier. Je crois plutôt que cette habitude bizarre est nécessitée par la
conformation des mâchoires de ces sauriens, plus propres à arracher la chair
par lambeaux qu’à la découper. Quoiqu’il en soit, une des conséquences à
retenir de cette habitude est que l’on peut toujours espérer retrouver le corps
d’une de leurs victimes et même, dans certains cas, lorsqu’elle ne s’est pas
défendue ou s’est vite évanouie, cette victime elle-même encore en vie.
(À suivre.)
Perrier de la Bathie.
Bulletin
de l’Académie malgache
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