11 février 2014

Il y a 100 ans : La paresse et le bâton

Les anciens rois malgaches étaient des gens pratiques ; ils connaissaient bien leurs sujets et les traitaient en conséquence :
Si tu trouves des gens couchés après le lever du soleil, disait le bon prince Andrianampoinimerina à ses fonctionnaires, tu les réveilleras à coups de bâtons.
Le temps est passé de ces moyens aussi radicaux qu’efficaces pour secouer la paresse indigène.
Cependant, il est urgent de mettre un frein aux rapines de trop nombreux Malgaches qui ont pris la douce habitude de remplacer le produit du travail par celui du vol.
À l’œuvre, nos bons humanitaires et dites-nous au moins comment il faut s’y prendre pour transformer les fainéants parasites de nos colonies en travailleurs… conscients.
Peut-être proposerez-vous de leur envoyer certains délégués de la C. G. T., que des malheurs récents ont mis en disponibilité. Ils enseigneront à nos sujets que l’homme est libre de son travail et qu’il a le droit de gagner beaucoup en besognant peu. Mais, d’un tel enseignement, l’indigène tirera probablement cette conclusion qu’il a le droit de gagner beaucoup en faisant le seul effort de se tourner les pouces.
Allons, messieurs les humanitaires, nous attendons votre glose !

Un conflit théâtral

Il y a conflit entre Tamatave et Saint-Denis de la Réunion à propos de spectacles. Les colons malgaches reprochent aux Bourbonnais de n’aimer que la musiquette et pas la comédie, tandis qu’eux, à Tamatave, préfèrent, à l’esprit d’un Maurice Donnay, la force tragique d’un Bernstein et la bonne et franche gaîté d’un Courteline et d’un Feydeau aux flonflons de Manon ou de la Mascotte. Et comme c’est la même troupe qui dessert les deux colonies, nos compatriotes de Tamatave déclarent que, payant davantage, ils doivent être servis à leur goût.
Là-dessus, les Bourbonnais de Saint-Denis répliquent qu’ils aiment autant l’esprit qu’à Tamatave, mais qu’ils réprouvent le théâtre grivois où l’on ne peut aller en famille.
Espérons que l’on trouvera bientôt un terrain d’entente et que nous n’aurons pas le douloureux spectacle de voir la guerre allumée entre ces deux colonies pour les beaux yeux de Maurice Donnay, d’Audran ou de Courteline.

Le Courrier colonial


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