De cerveau trop débile
pour concevoir quelque grand dessein, l’actuel Gouverneur Général de Madagascar
se complaît aux méchancetés mesquines, aux petites roueries malfaisantes d’un
gamin rageur et grognon. Peu importerait, s’il n’en résultait pour la colonie
et ses habitants les conséquences les plus déplorables.
Entre beaucoup d’autres
choses, la santé de ses administrés laisse Micromégas totalement indifférent.
Il lui semble amusant de brimer certains médecins pleins de mérites et de
dévouement, mais de caractère trop indépendant pour lui plaire ; de priver
de médecins, de longs mois durant, des populations qui ne le prennent point du
tout pour un grand homme et le lui disent ; de « saboter » enfin, le mot n’est pas trop fort ; le service
de santé.
Les hôpitaux et les
postes dépendant de l’Assistance médicale indigène sont dépourvus des
instruments et des médicaments les plus indispensables. Entre cent exemples, on
peut citer une maternité où il existe un seul bock injecteur et une seule
canule vaginale pour six ou huit femmes en couches, et pas un gramme de coton
hydrophile.
Mais tout cela ne touche
point Micromégas qui se désintéresse entièrement de la santé des autres pour ne
s’occuper que de sa santé à lui, sa
chère, précieuse et fragile santé. Ah ! sur ce chapitre, par exemple,
notre homme est d’une sollicitude, d’une vigilance à toute épreuve. Dût
Madagascar en périr, il n’écourterait pas d’un jour sa saison aux eaux
bienfaisantes d’Antsirabe. Les affaires les plus urgentes peuvent attendre, et
les dossiers s’entasser sur sa table, pourvu que sur ses jambes flageolantes et
précautionneusement emmitouflées, le podagre claudicant puisse faire sa petite
– oh ! toute petite ! – promenade quotidienne.
Et voilà comment, à
Madagascar, la santé de Micromégas est la seule qui compte. Malgaches naïfs,
colons infortunés, sachez-le bien : sous le règne de Micromégas
l’impotent, vous n’avez pas le droit d’être malades…
Les Annales coloniales
Madagascar il y a 100 ans - Janvier 1913 est disponible :
en version papier (123 pages, 10 € + frais de port)
en version epub (4,99 €).
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire