27 mai 2014

Il y a 100 ans : Une cité de lépreux (2)

(Suite.)
Qu’étaient les mœurs, les sentiments, les occupations, les misères, la vie et la physionomie des pauvres habitants de cette cité de la lèpre dont le nom seul nous paraît déjà un cauchemar, malgré le tableau bucolique de ses cases toutes chevelues de feuilles, sous ses larges allées ombragées de grands arbres ? Les lettres privées des admirables Sœurs vouées au salut et au soulagement de ces malheureux ne nous en laissent pas ignorer grand’chose, par les détails simplement donnés, mais singulièrement caractérisés, qu’elles nous apportent.
La lèpre, d’abord, dans cette partie de Madagascar, ne produit pas l’effet d’horreur qu’elle nous cause, et qu’elle inspire dans d’autres régions de l’île. Très naïvement résignées, et possédant, peut-être sans le savoir, dans leur inoffensive sauvagerie, une grande philosophie de la misère humaine, ces primitives populations malgaches semblent un peu considérer l’effroyable maladie comme nous considérons le rhumatisme. Elles n’en sont pas épouvantées, et la lèpre, au surplus, sauf dans les cas extrêmes, n’offre pas en général, au moins dans ces pays-là, l’atrocité de légende que nous supposons. Le lépreux du Faravangana se désagrège insensiblement, petit morceau par petit morceau, sans que cela soit même trop visible, et s’arrange avec son affreux mal comme nous nous arrangeons avec l’asthme ou la goutte. Vous voyez un Malgache en qui rien ne vous frappe. En le regardant toutefois avec un peu d’attention, vous vous apercevez qu’il lui manque un doigt de pied ou un doigt de la main. C’est la lèpre ! Au bout d’un certain temps, tous les doigts de la main ou du pied seront tombés, puis le pied et la main eux-mêmes. Beaucoup de lépreux n’ont plus ainsi que des moignons, mais dont ils se servent avec une habileté surprenante. Ils marchent et travaillent comme les autres, vont et viennent, allument le feu, font la cuisine, tissent des nattes, fabriquent des instruments de musique, et en jouent. Et aucune douleur ! Leur chair ne sent même plus les brûlures. Seulement, ils ont toujours froid, et, pour un rien, prennent des pleurésies dont ils meurent !
(À suivre.)

Le Gaulois


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