Le courrier de Madagascar
nous apporte une énergique protestation des Saintmariens contre l’arrêt de la
Cour de Tananarive, dont nous avons donné l’analyse. On se souvient que la Cour
a admis les droits civils des Saintmariens, mais non leurs droits politiques. À
ce dernier point de vue, ils auraient, d’après l’arrêt, un statut indigène.
C’est contre cette
décision et surtout contre les motifs sur lesquels elle s’appuie, que s’élèvent
les Saintmariens.
Ils affirment qu’ils ont
toujours joui du statut français, et que l’arrêt de la Cour innove en pareille
matière. Ils n’admettent pas la thèse que leurs mœurs soient un obstacle à leur
qualité de citoyens français, puisque depuis longtemps ils ont abandonné leurs
coutumes pour adopter les mœurs françaises.
À la vérité, l’union
libre est assez couramment pratiquée chez eux ; mais depuis quand,
disent-ils, cette pratique constitue-t-elle un empêchement dirimant à
l’exercice des droits de citoyens français ?
La Cour semble établir
une incompatibilité absolue entre les lois de la civilisation et la pratique
d’une vie « très voisine de la douce nature. » – « Nous ne
pensons pas, répliquent les Saintmariens, que les lois françaises fussent si
antinaturelles. »
Les protestataires ne
réclament point le droit de vote. Ils s’élèvent même contre l’idée
d’institutions électives à Sainte-Marie.
Ce qu’ils veulent, c’est
être traités en citoyens français, pour n’être pas à la merci du fisc qui
n’hésite pas, disent-ils, à démolir leurs pauvres cases quand ils ne peuvent
payer l’impôt et à les réduire à coucher à la belle étoile.
S’ils étaient citoyens
français, de tels procédés ne seraient point permis à leur égard ; ils
comparent le fisc au cheval d’Attila sur le passage duquel l’herbe ne poussait
plus !
Les Saintmariens, qui ont
toujours eu le respect des autorités constituées, entendent que celles-ci
respectent leurs droits. Aussi vont-ils se pourvoir en cassation contre la
décision de la Cour de Tananarive.
Le Courrier colonial
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