On va construire une
caserne pour douaniers à la Pointe-Hastie, et déjà, comme les gardes
républicains, à Paris, l’année dernière, les douaniers de Tamatave se plaignent
des inconvénients du casernement. Ces braves gens, qui ne sont plus des bleus,
dont beaucoup même sont pères de familles, souffriront d’une désagréable
promiscuité. Le travail terminé, ils aimeraient être chez eux en famille, se
délasser de leurs fatigues ; or, ils vont se trouver en plein
caravansérail.
De plus, le nombre de
« pièces pour ménages » étant limité, ne se mariera pas qui voudra.
Il faudra attendre le départ, la retraite ou la mort d’un camarade pour
convoler à son tour. Encore sera-t-il prudent de prendre son numéro !
Les célibataires
prendront leurs repas en commun, et c’est là un autre motif de récriminations.
Ce corps étant recruté un peu dans toutes les provinces de France, voire même
aux colonies, le maître-queue aura fort à faire pour donner satisfaction au Bordelais
qui aime le bon vin, au Marseillais qui se délecte d’aïoli et au créole qui
préfère le riz et la rougaille. Fera-t-on la cuisine au beurre, à l’huile ou au
saindoux ? Cruelle énigme !
On parle d’envoyer dans
les postes isolés, c’est-à-dire dans la brousse, le surplus des ménages ;
ils seront loin de tous secours médicaux, privés des ressources que fournissent
les grands centres.
Qu’un enfant vienne à
tomber malade et voilà un grave sujet de préoccupation pour le père dont le
service ne pourra qu’en souffrir.
Il paraît que ce projet
de caserne a pour cause une question d’économie : le bâtiment de la
Pointe-Hastie coûtera, il est vrai, 45 000 francs, mais permettra de
supprimer l’indemnité de logement. Nous ne croyons pas qu’il soit digne de l’État
de lésiner ainsi sur le dos de fonctionnaires méritants.
Il paraît, d’ailleurs,
que M. Picquié n’y serait pour rien ; l’initiative de cette décision
reviendrait au chef du Service des Douanes, récemment rentré en France. Elle
n’a pas une bonne presse à Tamatave.
Le Courrier colonial
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